Plusieurs contraintes structurelles ne permettent pas aux banques commerciales de jouer un rôle-clé dans le développement de la RDC.
Le taux de croissance macro-économique du pays ne cesse de grimper et devrait dépasser largement la moyenne africaine, en atteignant 8,8 % à la fin de l’année. Malgré cette embellie, l’un des indicateurs qui contribuent à la définition de l’amélioration du niveau de vie de la population ne pourra pas être renforcé : l’accès au système bancaire. Les banques commerciales installées en République démocratique du Congo proposent toute une panoplie de services : gestion de comptes des clients, divers placements, épargne, fourniture de moyens de paiement (chèque, carte bancaire…), opérations de change, prêts, intervention sur les marchés … Environ 4 millions de personnes, sur une population estimée à plus de 70 millions d’habitants, peuvent accéder à ces services.
Pour plusieurs raisons, il n’est pas encore possible d’aller plus loin. En plus des faibles revenus d’une très grande partie des Congolais, d’autres contraintes expliquent également le faible financement de l’économie nationale. Il faut citer, entre autres, le contexte politique plutôt frivole, le climat des affaires pas encore suffisamment assaini, les faiblesses de l’appareil judiciaire. Des prêts sont, généralement, octroyés à court terme et libellés, souvent, en dollars. La capitalisation totale des actifs de la vingtaine de banques agréées avoisinerait les quatre milliards de dollars. Dans un contexte où le produit intérieur brut (PIB) tourne autour de quinze milliards de dollars, il est difficile de concevoir un financement de projets nécessitant des montants qui peuvent atteindre, voire dépasser, le pic de cinq milliards de dollars. Il faut également prendre en compte la masse des fonds propres de ces banques. Elle ne dépasse pas, en général, les 12 millions de dollars. La Banque centrale du Congo (BCC) indiquait, en juillet dernier, que le volume des crédits proposés par les banques commerciales n’a pas encore atteint 2 milliards de dollars : il se limite à 1,8 milliard. Quant aux crédits accordés en monnaie locale, ils ne sont pas au-delà de 100 millions de dollars. Ce secteur devrait, pourtant, donner un coup de pouce non seulement au développement d’une classe moyenne nationale, mais aussi à une consolidation des chiffres d’affaires des PMI et PME. Le 15 septembre, au cours de leurs allocutions marquant l’ouverture de la session ordinaire d’octobre, les deux présidents des deux chambres du Parlement sont revenus sur cette donne. Pour le président du sénat, Léon Kengo wa Dondo, ces institutions bancaires doivent avoir un réel impact sur l’épanouissement du secteur privé, considéré comme un des moteurs de la création des emplois et de la croissance. Le président de l’Assemblée nationale, Aubin Minaku, a également demandé au gouvernement de « réfléchir sur le positionnement actuel du taux directeur de la Banque centrale du Congo à 2 %, afin de mobiliser les crédits en faveur du secteur privé. »
Alléger le coefficient de réserve obligatoire
En juillet, compte tenu des contraintes soulevées par les banques commerciales, la BCC avait décidé de faire passer leur coefficient de réserve obligatoire de 3 à 0 %, pour les dépôts à terme, et, de 7 à 5 %, pour les dépôts à vue. Le 10 septembre, à la fin de sa réunion mensuelle, présidée par le gouverneur de la Banque centrale, Déogratias Mutombo Mwana Nyembo, le Comité de politique monétaire (CPM) a noté qu’ « au regard de l’analyse de la conjoncture, tant au niveau interne qu’externe, qui est marquée par l’absence de chocs majeurs, le CPM a décidé de maintenir le dispositif actuel de sa politique monétaire. Ainsi, le taux directeur demeure à 2 %. Quant aux coefficients de la réserve obligatoire, ils sont maintenus à 8 et 7 %, pour les dépôts en devises, à vue et à terme, ainsi qu’à 5 et 0 %, pour les dépôts en monnaie locale, à vue et à terme.»
Mais les banquiers refusent de revoir leurs taux d’intérêt. Le taux débiteur annuel oscille entre 18 et 20 %, pour les crédits en monnaie locale, et est de 14 %, pour les prêts en monnaies étrangères. L’accès au crédit devient un parcours du combattant. Des instances gouvernementales, comme le ministère des Finances et la BCC, ne parviennent pas à réguler ce secteur. Toutes ces institutions bancaires commerciales, intervenant dans le pays, ne peuvent pas être logées à la même enseigne. Si certaines, les moins nombreuses, connaissent des moments peu reluisants, d’autres, parmi les plus puissantes, sont en train de ratisser large sur toute l’étendue du territoire national. En faisant une cartographie de certaines d’elles, comme la Banque commerciale du Congo (BCDC), Standard Bank RDC, la Banque internationale pour l’Afrique au Congo (BIAC), ou encore la Raw Bank et la Bank of Africa (BOA), leur présence est manifeste, essentiellement dans les régions à fortes transactions commerciales, comme Kinshasa et le Bas-Congo, ainsi que les provinces du Sud, de l’Est et du Nord du pays (Katanga, Sud-Kivu, Nord-Kivu, Province Orientale).
Si l’accès au crédit reste un défi pour la majorité des clients ayant un compte bancaire, il sied aussi de reconnaître que bien de situations ont évolué, dans ce secteur. Il y a encore une dizaine d’années, pour ouvrir un compte bancaire, il fallait avoir un « parrain solvable » et prouver être détenteur d’un montant élevé, dépassant même les 2000 dollars. Tous les agents et fonctionnaires de l’Etat, soit près d’un million de personnes, vont avoir un compte bancaire. Selon les prévisions, à l’orée 2016, entre 20 et 30 % de la population congolaise aura accès aux différents services des institutions bancaires.