« C’est donc un outil [le Programme de marquage moléculaire des produits pétroliers], par excellence, dont dispose désormais le gouvernement pour lutter efficacement contre le commerce illicite organisé par des cartels quasi institués. La contrebande sur les produits pétroliers génère des pertes importantes au détriment du Trésor public estimées à plusieurs centaines de millions de dollars par an, privant ainsi le pays de moyens substantiels dont elle a grandement besoin. Cela est inacceptable ! », a déclaré Aimé Sakombi Molendo, le ministre des Hydrocarbures.
« Le succès de ce programme sur l’ensemble du territoire national est important car il s’inscrit étroitement dans le cadre de la mise en œuvre du Pilier VI du Programme d’action du gouvernement sur l’ensemble du pays », a-t-il ajouté, comme en écho à la vision du développement du pays de Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, le président de la République.
Pour le ministre des Hydrocarbures, le résultat de l’implantation de ce programme débutée en 2023 est plutôt « encourageant » pour la suite. À Lubumbashi (Haut-Katanga) et à Kolwezi (Lualaba), Aimé Sakombi Molendo a présidé des réunions avec les responsables politiques, les opérateurs économiques dans les secteurs des mines et du pétrole, ainsi qu’avec des techniciens des sociétés Authentix et Mamo associées à la mise en œuvre de ce programme. Il a aussi visité les infrastructures de contrôle et de vérification mises en place avant l’opérationnalisation proprement dite du programme de marquage moléculaire des produits pétroliers.
On retiendra utilement que ce programme va entrer en application selon un chronogramme qui a été annoncé par le ministre des Hydrocarbures, lui-même, à savoir la mise en place de la Brigade des hydrocarbures, le 15 septembre 2024, le démarrage de la campagne de contrôle non répressif, le 1eroctobre 2024, ainsi que le début des opérations de contrôle répressif assorti de la stricte application du barème des sanctions avec possibilité du retrait du titre, le 1er novembre 2024.
Éradiquer la mentalité
Le ministre Sakombi a expliqué à Business et Finances qu’à l’issue de sa mission d’observation de terrain et surtout d’écoute à Lubumbashi et Kolwezi, des mesures importantes vont être prises pour lutter contre ce fléau économique et sécuritaire que constitue le commerce illicite des produits pétroliers. Il a notamment souligné qu’il fait de la lancinante question du trafic et/ou de la fraude sur les hydrocarbures dans notre pays une des préoccupations nationales majeures de son mandat à la tête du ministère. C’est en cela que consiste sa bataille : remonter les ramifications profondes du commerce illicite en général enraciné déjà dans la mentalité collective favorable aux pratiques frauduleuses.
Il a ajouté que l’approvisionnement et la consommation des produits pétroliers, souvent de mauvaise qualité et/ou de qualité douteuse, issus du commerce illicite constitue une menace très sérieuse et engendre un très grand manque à gagner en matière de mobilisation des ressources internes pour le gouvernement. « C’est dans ce sens que nous avons convoqué des réunions. Nous avons discuté de toute la problématique, que ça soit les sources d’approvisionnement, les conséquences que cette fraude entraîne, mais également et surtout les mesures à prendre pour éradiquer ce mal devenu endémique dans notre pays », a-t-il dit.
En effet, la fraude douanière et fiscale est très prégnante dans le pays, d’où il faut relever les faiblesses structurelles des dispositifs nationaux de lutte contre la fraude dans son ensemble. La République démocratique du Congo/RDC est un vaste territoire géographique qui s’étend sur 2 345 409 km². Elle ne dispose donc pas de moyens suffisants de contrôler les flux de marchandises entrant et sortant de son territoire.
La route reste, pour longtemps encore, la principale voie d’accès des marchandises sur le marché national. Et c’est justement là que se posent les grands défis pour les services de la douane afin de s’assurer une meilleure surveillance de tous les flots d’échanges commerciaux au regard, sans doute, de la porosité des frontières. D’où la naissance et le développement des « cartels quasi institués » dont parle le ministre des Hydrocarbures. Ils entretiennent un puissant trafic très lucratif, parfois en ayant des connexions avec des dirigeants au pouvoir. Conséquence : quand ce n’est pas la complicité active, c’est souvent la complaisance avec les fraudeurs qui constituent, du reste, un lobby national très influent.
À Lubumbashi et Kolwezi, Sakombi Molendo a insisté sur le bien-fondé du processus de marquage moléculaire des produits pétroliers, afin d’en assurer la traçabilité et lutter contre la contrebande. Les sociétés minières du Katanga consomment plus de 80 % du volume de produits pétroliers. Ce n’est pas rien. D’où la nécessité de certifier les produits qui y sont vendus, de s’assurer de la conformité à la réglementation nationale et internationale des opérateurs qui œuvrent dans le secteur de la distribution et de la vente de carburants, et de sécuriser les consommateurs et les vendeurs sur la qualité des produits.
Marquage des hydrocarbures
Le marquage des hydrocarbures est une méthode d’authentification utilisée partout dans le monde pour lutter contre le vol, la contrebande ou l’adultération des produits pétroliers. Aujourd’hui, c’est le moyen le plus avancé de protection des hydrocarbures contre la fraude, utilisé par des gouvernements et des compagnies pétrolières. Chez nous en RDC, le marquage moléculaire se fait sur les carburants terrestres, notamment l’essence, le gasoil et le pétrole lampant en provenance des pays voisins. C’est pourquoi des équipes de contrôle vont être déployées aux postes frontaliers.
La première étape du processus consiste à marquer chimiquement le carburant avec un marqueur unique. Le carburant ainsi marquer peut être transporté du terminal de stockage vers les stations-service où il est ensuite vérifié pour s’assurer que le produit vendu dans tout le pays provient de sources légales ou pour révéler tout signe de dilution. La Brigade des hydrocarbures est chargée d’effectuer des inspections des stations-service sur l’ensemble du territoire national afin de confirmer la présence du marqueur.