Un expert évoque la géologie de la RDC, le « coffre-fort » du monde

La 3è édition de la Conférence minière de la RDC organisée en septembre à Kolwezi est encore présente dans les esprits. En ouvrant ses assises le chef de l’État a clairement invité les investisseurs à « sortir du confort de l’exploitation des seuls gisements leur concédés… pour prendre de vrais risques en explorant le reste du pays, en vue de la découverte de nouvelles ressources. Quid de la Géologie de la RDC. Décryptage d’un expert.

Comme l’a déclaré Joseph Kabila Kabange, le président de la République, à l’ouverture des assises de la 3è édition de la Conférence minière de la RDC à Kolwezi, chef-lieu de la province du Lualaba, le Congo est un « coffre-fort des réserves du monde en ressources minérales ». C’est pour cela que le pays est très convoitée. La géologie de la République démocratique du Con-go attestée à ce jour est unique, jamais découverte ailleurs. Mais de quoi est faite cette géologie, au point d’attirer la convoitise des pays voisins et des firmes multinationales ? Tumba Di Khonda est géologue. Dans un entretien à « Business et Finances », il explique que « la géologie de la RDC est carac-térisée par deux grands ensembles structuraux, séparés par une discordance et une lacune importante ».   

D’une part, il y a les formations de couvertures (terrains phanérozoïques), non métamorphisées, généralement fossilifères et d’âge compris entre le car-bonifère supérieur et l’holocène. Et d’autre part, les formations de soubas-sement (terrains précambriens) et métamorphiques et plissées constituant un anneau ininterrompu autour du bassin du Congo.

Configuration

Selon Tumba Di Khonda, les terrains de soubassement sont subdivisés en unités « tectostratigraphiques ». Il s’agit des boucliers archéens d’âge supérieur ou égal à 2 500 MA affleurant le Congo septentrional et au Kasaï ; de la ceinture du précambrien inférieur et moyen (2 500 à 1 300 MA) dont les sédiments se sont déposés dans des zones mobiles méridiennes situées sur les bordures est et ouest du craton et dans des fossés intracratoniques transversés; de la couverture du précambrien supérieur appelée le « Katangien » dont les sédiments se sont déposés sur les plates-formes épicontinentales et dans les aires subsidentes du craton du Congo (Katanga plissé et tabulaire).

Tandis que les formations de couverture affleurent quatre zones : primo, une zone littorale, comprise entre l’Océan Atlantique et les monts du Mayumbe (Monts de Cristal), et des formations marines d’âge tertiaire et crétacique y sont bien développées. Secundo, la cuvette centrale où s’étalent les dépôts d’âges mézoïque et cénozoïque ; des vastes terrains affleurent sur le pourtour de la Cuvette. Tertio, la bordure des terrains anciens subdivisée en six régions non raccordables. Et quarto, les fossés tectoniques de l’Est occupés par des formations cénozoïques particulières et siège d’un volcanisme récent. Les formations de chacune de ces 4 grandes zones sont recouvertes indifféremment par des formations récentes, la série de sables ocres et la série de grès polymorphes.

Le lien avec l’environnement

Pour ce géologue, la minéralisation en RDC est liée à l’environnement géologique. C’est ainsi qu’on trouve, premièrement, le groupe du cuivre (cuivre, cobalt, uranium, zinc, plomb, cadmium, germanium). « Il s’agit des gisements d’indices de la ceinture cupro-cobaltifère katangaise exploitée en plusieurs endroits (la dolomie de Kakontwe) », souligne-t-il. 

Les gisements du faisceau R2 ou série de mines fournissent presque la totalité de la production du cuivre, du cobalt et d’uranium. « Il faut y ajouter les amas discordants de Zn-Cu-Pb-Ge de Kundelungu inférieur, le gisement filonien de Kipushi (Cu-Cd-Ge-Pb-Zn-Ag), le gisement de Tshibenda et autres gisements et indices répartis ailleurs (Bamba Kilenda, Lubi-Lukula, Ubundu etc.), précise-t-il encore.

Deuxièmement, le groupe de l’étain (étain, wolframite, colombo-tantalite, béryl, monazite). « Cette minéralisation se localise dans la partie orientale du Congo, formant ainsi une ceinture de plus de 700 km. Les différents gisements du groupe de l’étain sont caractérisés par leur situation dans la zonéographie des pegmatites et leurs environnements lithologiques et structuraux », fait remarquer Tumba Di Khonda.

Qui ajoute, troisièmement, les minéralisations liées à la différenciation des magmas basiques et alcalins : chrome, nickel, niobium et diamant. Pour lui, les gisements et les indices se rapportent aux gîtes kimberlitiques (diamants), aux gîtes carbonatitiques à pyrochlore (Nb-Ce) et aux gîtes filoniens à berytine. « Les éluvions et alluvions diamantifères des pipes kimberlitiques sont localisées en plusieurs endroits, Mbuji-Mayi et Tshikapa, étant les plus importants. Les teneurs et réserves des carbonatites de la Lueshe et de Bingo permettent de classer ces gîtes de pyrochlore parmi les plus gros au monde. Les gîtes résiduels du chrome et de nickel sont situés dans la région du Kasaï-occidental (Nkonko et Lutshatsha) », poursuit Tumba Di Khonda dans ses explications.   

Quatrièmement, il évoque le groupe de métaux précieux : or, argent et platine. D’après lui, « l’or a été signalé sur toute l’étendue de la ceinture précambrienne du Congo, en liaison avec les roches du craton archéen et des cycles orogéniques kibalien et burundien ». Les gisements les plus importants sont localisés dans la province Orientale et dans le Nord-Kivu. On trouve des gîtes dans le Kasaï, le Katanga et le Kongo-Central. « L’argent provient en grande partie du traitement des minerais cupro-zincifères de Kipushi, de l’ex-province Orientale et du Kivu. Tandis que les gîtes et indices de platine sont liés à des intrusions basiques (Kasaï), à des intrusions de composition moyenne (province Orientale) et aux gîtes stratiformes de la ceinture cuprifère.   

Cinquièmement, il y a le groupe du fer et le manganèse. Selon ce géologue, l’existence d’importants gîtes de fer a été reconnue dans l’ex-province Orientale, le Kasaï et le Katanga. Les réserves des gîtes de l’ex-province Orientale et du Kasaï sont estimées à plusieurs millions de tonnes, souligne-t-il. Le manganèse, par contre, apparaît comme un « élément accessoire » dans de nombreuses associations minérales. Les gisements de Kasekelessa et Kisenge sont les plus importants, les réserves étant évaluées à 14 millions de tonnes.   

Des indices d’hydrocarbures

Et sixièmement, le groupe de combustibles minéraux : charbon, schistes bitumineux, pétrole et ses dérivés gazeux et solides. Tumba Di Khonda note que les bassins houillers de la RDC sont localisés dans le Katanga, précisément à Luena, Lukunga et Tanganyika, et présentent des caractéristiques communes avec ceux de l’Afrique australe et de Madagascar. Les Schistes bitumineux sont rencontrés dans le sédiment marin des séries de Kisangani et de la Loïa qui affleurent la bordure de la cuvette centrale (ex-province Orientale, Kongo-Congo). Selon la Cellule technique de coordination et de planification minière (CTCPM), les indices d’hydrocarbures solides et liquides sont connus dans les formations de couverture d’âge crétacé récent de la zone littorale Atlantique de la cuvette centrale et du Rift des Grands Lacs. Il y a également un gisement très particulier de gaz naturel dans le lac Kivu dans l’Est de la RDC.