AU COURS d’une conférence de presse avec Angela Merkel, la chancelière allemande, Emmanuel Macron, le chef de l’État français, a déclaré que « si les Britanniques ont besoin de davantage de temps, nous pourrons examiner une demande d’extension, si elle est justifiée ». Toutefois, il a rappelé que « l’accord de retrait ne peut être renégocié ».
« Si la Grande-Bretagne a besoin de plus de temps, il est évident que nous ne refuserons pas », a confirmé Angela Merkel, reçue à Paris, sans toutefois évoquer de conditions. Sur la même ligne que le président français, Pedro Sanchez, le chef du gouvernement espagnol, a déclaré de son côté que l’Espagne n’allait « pas s’opposer à la concession d’une éventuelle prolongation ». Mais « celle-ci doit avoir une perspective claire de règlement », a-t-il ajouté. « Prolonger l’incertitude en prolongeant les délais n’est une option qui n’est ni raisonnable, ni souhaitable », a-t-il averti.
Unanimité requise
Michel Barnier, le négociateur de l’UE, a quant à lui rappelé sur la radio France Info que « s’il y a une demande de prolongation, elle devra faire l’objet d’une validation à l’unanimité » des pays européens. « Et la question qu’ils poseront immédiatement, c’est ‘pour quoi faire ?’. C’est cela qui déterminera la durée d’une éventuelle prolongation », a-t-il expliqué. « Ils voudront être sûrs de ne pas se retrouver après cette prolongation dans la même situation d’impasse qu’aujourd’hui », a-t-il souligné.
Theresa May, la 1ERE Ministre britannique, s’est engagée devant le Parlement sur une procédure par étapes, la première étant un vote le 12 mars sur l’accord de sortie. En cas de rejet, les députés britanniques seront appelés à voter le 13 mars sur une sortie sans accord et si cette option est refusée, ils auront à se prononcer le 14 mars sur la demande d’un report de la date du départ. Ce report devra être limité à trois mois, jusqu’à fin juin, a précisé la dirigeante.
Un court report sera de toute manière nécessaire en cas d’approbation de l’accord de sortie, car il faudra au moins huit semaines pour la mise en œuvre de nouvelles législations, notamment celles concernant l’agriculture, la pêche et l’immigration, fait-on valoir dans l’entourage des négociateurs européens. Et « si la décision est prise d’organiser de nouvelles élections législatives ou un deuxième référendum au Royaume Uni, il faudra aussi plus de temps », soulignent Larissa Brunner et Fabian Zuleeg dans une analyse publiée par le European Policy Centre (EPC), un important centre de réflexion bruxellois. L’hypothèse d’une prolongation au-delà de juin a été écartée par Theresa May. Elle est pourtant évoquée à Bruxelles où elle a ses partisans. « Donner aux Britanniques la possibilité de faire une pause de réflexion pourrait être utile pour éviter le chaos », a ainsi estimé un diplomate européen. « Il faut lancer le débat maintenant », a jugé un autre.
Mais les élections européennes du 23 au 26 mai, prévues sans le Royaume-Uni, sont l’un des obstacles à une prorogation de l’adhésion britannique. Une prolongation encore plus longue, jusqu’en 2021, l’année du début du nouveau cadre financier pluriannuel (CFP) de l’UE, requerrait de nouvelles contributions budgétaires de la part du Royaume-Uni, rappellent les analystes de l’EPC.
En cas de hard Brexit
Les industriels britanniques pourraient avoir du mal à exporter leurs marchandises vers l’Union européenne en cas de hard Brexit. La plupart de leurs palettes ne seront en effet plus conformes aux exigences de Bruxelles. Voilà un obstacle imprévu pour le Royaume-Uni en pleine négociation sur le Brexit. Les palettes de livraison britanniques ne seront pas conformes aux normes européennes. Elles sont utilisées par de nombreuses entreprises pour transporter de gros volumes de marchandises.
Les représentants des industries concernées ont déclaré « ne pas savoir pourquoi il avait fallu tant de temps aux ministres pour se rendre compte de cette pénurie de palettes, car elles constituent un élément fondamental du commerce transfrontalier ». La transition devait leur donner deux ans nécessaires pour se préparer. De hauts responsables de l’agroalimentaire britannique ont déclaré qu’une entreprise sur huit pourrait cesser ses activités si le Royaume-Uni quittait l’UE sans un accord de retrait. Devant tant problèmes, Theresa May subit de fortes pressions pour empêcher un Brexit sans accord. Elle a annoncé le 26 février que les députés auraient la possibilité de voter pour une prolongation de l’article 50 mi-mars si elle n’obtenait pas un accord pour le Brexit approuvé par le Parlement.