Fléau qui ronge l’économie, la corruption n’a pas encore retenu toute l’attention des autorités du pays, malgré que la RDC occupe la 154 ème place dans le classement de Transparency International. Le 9 décembre, journée internationale de lutte contre la corruption, a vu plutôt une chancellerie organiser une table ronde sur le sujet. Le chargé d’affaires de l’ambassade de Grande-Bretagne, Tim Morris, a accueilli ses hôtes venus de toutes les couches de la société congolaise. Tous ont redit leur volonté de « rompre les chaînes de la corruption », thème de cette année. Mais peuvent-ils y arriver ?
Milieu feutré de la résidence de l’ambassadeur britannique à Kinshasa avec des diplomates, quelques parlementaires, des hauts cadres de multinationales et de l’administration, des activistes de la société civile et des entrepreneurs du secteur privé… On est loin des terrains de prédilection de la corruption et des décideurs qui doivent l’éradiquer. La Grande-Bretagne a pris le leadership des bailleurs de fonds dans l’appui à la RDC pour la lutte contre la corruption. Son agence de développement, DFID, consacrera dans les cinq prochaines années, 150 millions de dollars au nouveau programme Développement du secteur privé. L’éradication de la corruption en RDC intéresse au plus au point le Royaume-Uni (et les autres pays occidentaux). « Le Royaume-Uni voudrait voir les entreprises britanniques concourir dans un contexte concurrentiel homogène et gagner des marchés à l’étranger à travers une concurrence loyale et ouverte. Nous ne voudrions pas voir nos entreprises, qui sont en majorité respectueuses des lois, être désavantagées par rapport à celles qui pratiquent la corruption.» Ces mots de Tim Morris à la table ronde anti-corruption illustrent à suffisance la réticence de bien des firmes pour investir en RDC. Et au diplomate britannique de conclure : « Il faut aussi constater que les entreprises qui suivent des régulations strictes sont les meilleurs investisseurs.»
Absence d’arsenal juridique en RDC
Si le Royaume-Uni est une référence avec sa loi anti-corruption, l’UK Barbery Act (il compte aussi publier bientôt son plan anti-corruption), la RDC est dépourvue d’un arsenal juridique en la matière. Les références à la corruption comme infraction sont vagues dans le code pénal congolais civil ou militaire, précise Alain Lubamba, député national et vice-président de la commission relations extérieures à l’Assemblée nationale. Selon lui, son collègue Henry- Thomas Lokondo, réfléchit et travaille sur une proposition de loi anti-corruption. Un sénateur présent à cette rencontre a posé une question de fond qui illustre à suffisance l’impasse dans laquelle se trouve la lutte contre la corruption : quel est le statut culturel que réserve notre société à la corruption ?
Faible mobilisation pour la lutte contre la corruption en RDC
Cette table ronde a aussi été organisée par l’Initiative du secteur privé pour la lutte contre la corruption présidée par Marie-Chantal Kanyinda, directrice des relations extérieures Afrique de Rio Tinto. Le vice-président de ce groupe de travail, Clément Ilunga, a rappelé à l’assistance qu’aucune avancée notable n’a été enregistrée depuis la signature du Pacte anticorruption entre les secteurs public, privé et la société civile le 9 décembre 2013. Il y a tout juste un an. En matière de lutte contre la corruption, chaque partie soupçonne l’autre. Le directeur général des Impôts a exhorté l’assistance à déclarer sincèrement les revenus. Une participante lui a fait remarquer que les agents du fisc ne sont pas exempts de reproches. Un autre intervenant a insisté sur l’importance des salaires conséquents à payer aux autorités comme à Singapour (dotation en millions de dollars). Le président des Etats-Unis n’a que 250 à 300 mille dollars par an car il faut éviter la convoitise et susciter le sens du service à la communauté nationale. On peut relever des efforts notables dans la lutte contre la corruption comme la bancarisation de la paie des fonctionnaires, le versement à la banque des recettes de l’Etat, le système de passation des marchés publics… La corruption a encore la peau dure en RDC, d’où la nécessité d’une mobilisation nationale contre elle. Celle-ci tarde à se mettre réellement en place…