Vive controverse autour de la protection des éléphants en Afrique

Alors que le braconnage baisse d’intensité en Afrique, voilà que le Botswana vient de lever l’interdiction de la chasse aux éléphants où leur nombre a augmenté depuis trois décennies. Pourtant, ces animaux sont importants pour le tourisme et les forêts.

LA PLUPART des rapports l’attestent : le braconnage des éléphants ou pachydermes est en recul en Afrique, notamment en raison de la baisse du prix de l’ivoire. Mais l’espèce animale reste plus que jamais en danger. Selon une étude de la revue « Nature Communications », publiée le mardi 28 mai, et citée par RFI, le nombre d’éléphants tués par braconnage a été divisé par deux entre 2011 et 2017, passant de 10 % à moins de 4 %.

Comment expliquer le recul du braconnage ? D’abord par la chute du cours de l’ivoire, dont le trafic se concentre notamment en Asie du Sud-Est. Là où le kilo d’ivoire brut se négociait à près de 2 000 dollars en 2015, il n’en vaut aujourd’hui que quelques centaines. De ce point de vue, l’interdiction par la Chine du commerce d’ivoire sur son territoire depuis janvier 2018 est encourageante, même s’il est trop tôt pour en connaître les effets, selon RFI.

Cependant, les pachydermes continuent d’être en danger de disparition en Afrique. Entre 10 et 15 000 d’entre eux sont abattus chaque année pour l’ivoire de leurs défenses, un rythme trop élevé pour être viable. Par ailleurs, le degré de pauvreté et de corruption joue aussi un rôle : plus il est élevé dans un pays, plus le braconnage y est important. En 2016, la population de pachydermes était estimée à 415 000 individus, soit deux fois moins que dans les années 1970.

Réactions mitigées

Un des responsables de l’ONG Eagle Network, qui aide les gouvernements des pays africains à lutter contre le trafic d’animaux et à faire respecter la loi, estime que les résultats de cette étude s’apparentent à des « données rassemblées dans un bureau ». « Du point de vue du combat que nous menons sur le terrain contre les réseaux de trafiquants, je peux affirmer que nous ne voyons aucun signe de déclin, mais plutôt une augmentation continue du trafic d’ivoire », souligne Ofir Drori. D’aucuns pensent que cette étude sur l’ensemble du continent africain masque d’importantes disparités régionales. 

Les taux de braconnage les plus hauts se concentrent en Afrique de l’Ouest et du centre. Le Sud et l’Est du continent connaissent, eux, des chiffres au plus bas, comme en Namibie, au Gabon, en Ouganda et au Botswana, qui vient cependant d’autoriser à nouveau la chasse aux éléphants. Il semble que ce pays a cédé à la pression des chasseurs en arguant du « trop plein d’éléphants ». D’autant qu’il faut distinguer les éléphants de forêt des éléphants de savane : les premiers sont bien plus menacés dans la mesure où le braconnage est le plus intense dans les espaces forestiers. Plus petite et surtout plus solitaire que leurs cousins de la savane, la population d’éléphants de forêt dans le bassin du Congo aurait par exemple chuté de 65 % en l’espace d’une quinzaine d’années.

Le biologiste Colin Beale, spécialiste de la conservation à l’Université de New York et l’un des auteurs du rapport de « Nature Communications » ne cache pas son inquiétude pour les éléphants de la forêt : « L’éléphant d’Afrique reste virtuellement menacé d’extinction », excepté dans de rares zones où il est très protégé. Julian Blanc, du Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE), quant à lui, pense qu’au niveau du continent, « les éléphants ne sont pas en danger immédiat de disparition liée au braconnage ». Certes, certaines populations pourraient disparaître, mais d’autres se portent bien, selon lui.