IL Y A COMME un consensus général. La fiscalité est l’élément vital du développement. Et l’Afrique doit apporter une contribution essentielle au débat fiscal mondial. Selon une étude récente, les actions qui sont déjà engagées ne suffisent pas. Il faut faire davantage : renforcer les capacités des administrations fiscales pour stimuler le développement de l’Afrique. Un constat : si les recettes fiscales représentent plus du tiers du PIB dans les pays de l’Organisation des Nations Unies pour la coopération et le développement économiques (OCDE), ce n’est pas le cas des pays en développement, en particulier les pays d’Afrique subsaharienne, où elles représentent moins d’un cinquième du PIB.
Le débat se corse
Les experts sont formels : davantage de recettes fiscales permettraient aux États africains de mieux fonctionner et d’acquérir biens et services, mais aussi d’engager des réformes étatiques et de marché favorables au progrès économique, social et environnemental. Ici et là, le débat sur l’élargissement de l’assiette fiscale (alourdissement du fardeau fiscal) rebuter les dirigeants politiques dans les pays de l’OCDE. Frappés par la crise, ils cherchent à lever des recettes tout en maintenant une fiscalité aussi légère que possible au nom de la croissance.
Par contre, des experts pensent que des prélèvements fiscaux représentant 10 à 15 % du PIB seraient une augmentation judicieuse de la pression fiscale pour de nombreux pays en développement, notamment africains. De la même façon qu’une fiscalité trop lourde peut brider l’activité économique, une fiscalité trop faible peut asphyxier l’économie. Aujourd’hui, la réflexion se concentre sur comment les économies dites pauvres peuvent accroître leurs recettes fiscales. Le débat se corse.
Il y a ceux qui pensent qu’il faut générer plus de croissance. Mais comment y parvenir quand on sait que les pays africains n’ont souvent pas assez de ressources pour administrer l’impôt. Il faudra alors rendre l’administration fiscale plus efficace, afin d’accroître les capacités et les ressources affectées aux services aux contribuables et à l’application des lois, revoir les services fiscaux et investir dans les compétences et les modes de gestion favorisant des systèmes fiscaux exempts de corruption.
Selon l’OCDE, le rapport impôt/PIB dans les pays d’Afrique subsaharienne qui ont lancé des réformes de l’administration fiscale est désormais supérieur à 16,8 %, ce qui correspondait à la moyenne des pays fragiles et à faible revenu. Mais pour progresser davantage, il faut être mieux informé sur le fonctionnement réel des administrations fiscales et sur leurs problèmes concrets.
On évoque souvent la question du coût du recouvrement de l’impôt, comme l’un des principaux enjeux fiscaux en Afrique. Il représente 1 à 4 % des sommes totales perçues sur le continent. Aujourd’hui, les administrations fiscales en Afrique font un effort pour informatiser leurs services et systèmes.
La taxe sur la valeur ajoutée (TVA), les impôts indirects et directs sont les principales recettes fiscales dans les pays africains. Les recettes non-fiscales, notamment les bénéfices des entreprises publiques, les redevances et les autres paiements rémunérant des services publics, ne représentent qu’environ 1 à 2 % des recettes totales. Dans les pays en développement d’Amérique latine, par exemple, cette proportion atteint 10 %, voire plus.
Discipline fiscale
Autre enjeu : la discipline fiscale. Tous les pays s’estiment aptes à la faire respecter. Cela va des dispositifs institutionnels à l’autonomie de l’administration fiscale pour interpréter la législation fiscale, et être totalement responsable de la collecte des impôts et taxes, des droits de douane et des recettes non fiscales.
Les ressources allouées aux administrations fiscales le sont dans la plupart des cas (comme en République démocratique du Congo) par voie de budget de l’État voté au Parlement. Certains pays (comme la RDC) accordent des primes de résultat, correspondant à un pourcentage des recettes perçues, une pratique rare à travers le monde.
Les experts attestent que les efforts visant à mettre en place des administrations fiscales efficaces dans plusieurs pays d’Afrique sont indéniables. C’est de bon augure pour le développement économique du continent à long terme. Cependant, le diable se cache dans les détails, voilà pourquoi une étude plus exhaustive est menée en collaboration avec le Forum de l’administration fiscale africaine (ATAF) et d’autres institutions internationales.