D’importants pétrodollars échappent à la RDC faute d’accord avec l’Angola

La firme italienne ENI, l’américaine Chevron, l’angolaise Sonangol mais aussi d’autres grandes entreprises pétrolières internationales manifestent leur intérêt pour exploiter le pétrole congolais du plateau continental. Mais… 

 Il demeure un obstacle majeur. C’est la détermination de la Zone d’intérêt commun (ZIC) entre la République démocratique du Congo et l’Angola. Dans son rapport inhérent à la loi de finances 2018, la commission ECOFIN et  de contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale déplore que Kinshasa et Luanda n’aient jamais conclu un quelconque traité ou convention en ce sens, sinon que la Société nationale des hydrocarbures (SONAHYDROC), ex-COHYDRO, pour la partie congolaise, et la Sonangol, pour la partie angolaise, n’ont convenu que d’un  liminaire d’un accord de partenariat en 2006.

Jamais la RDC n’a perçu de l’Angola la bagatelle somme de 600 000 dollars pour la signature de la convention sur la ZIC comme l’a soutenu l’alors ministre en charge du pétrole et du gaz, Lambert Mende Omalanga, devant l’Assemblée nationale. Depuis, l’Angola fait cavalier seul dans ce projet et se rapproche du club de grands États pétroliers de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) alors que la RDC demeure encore un lilliputien dans le cercle de l’Association des pays pétroliers africains (APPA).

Pour 2018, le pays de Kabila table sur des recettes plutôt dérisoires d’un plus de 150,3 millions de dollars. Les assignations des pétroliers producteurs (PERENCO REP, LIREX, MIOC) pour l’exercice 2018 sont, en effet, de  272 677 517 498 FC, dont 109 071 007 072 FC pour la Direction générale des impôts (DGI) et 163 606 510 426 FC pour la Direction générale des recettes administratives, domaniales, judiciaires et des participations (DGRAD). Le gouvernement se félicite plutôt que les prévisions des recettes des pétroliers producteurs soient en hausse de plus de 7 % par rapport à 2017. Le cours du baril du pétrole a oscillé autour d’une moyenne de 53,98 dollars en 2017 contre 43,57 dollars en 2016, soit un  accroissement de 23,9 %.

Cette évolution s’inscrit dans un contexte marqué par la signature, par les pays membres de l’organisation des pays producteurs de pétrole, de l’accord de limitation du volume de production de l’or noir. En mars prochain, les pays de l’OPEP devront derechef renégocier entre eux leurs quotas de production. Il n’est pas certain que l’impulsion haussière soit alors maintenue, si certains pays se laissent tenter par la facilité de produire plus pour gagner plus tout de suite… vu que le cours du baril titillerait la barre de 70 dollars, selon les analystes.

Par ailleurs, l’OPEP ne représente plus que 40 % de la production mondiale. Par définition, les non membres ne sont pas engagés par les décisions de l’OPEP et mettent en œuvre leur propre stratégie de production perturbant d’autant plus l’efficacité des décisions de l’OPEP. Mais au sein même de cette organisation, des tensions très fortes existent entre le monde sunnite, Arabie Saoudite en tête, et le monde chiite, Iran en tête, notamment. Il est quasiment acquis que la Russie, traditionnel allié de l’Iran, semble plutôt jouer le jeu préférant gagner de l’argent grâce à l’effet prix (hausse du prix) que grâce à l’effet volume (hausse de la production).

Et la RDC dans tout ça

La RDC pourrait atteindre une capacité de production de 300 000 barils/jour, apprend-on au ministère des Hydrocarbures. Seule certitude, pas à court terme.

Et, en tout état de cause, les bases sur lesquelles sont calculées les recettes des pétroliers producteurs sont sujettes à caution si bien que la RDC ne peut pas espérer gagner gros en dépit de la hausse de la production du brut.

En 2017, les experts du ministère des Hydrocarbures ont recommandé que, dans les calculs des revenus pétroliers de l’État, soient notamment pris en compte la production journalière projetée (22 500 barils), le cours moyen de 56,7 dollars, la décote de 3 dollars le baril, le niveau des charges déductibles de 40 % ainsi que le régime fiscal par convention pétrolière.

Autre décision, l’intensification du recouvrement de la taxe rémunératoire annuelle, d’implantation et de pollution auprès des pétroliers producteurs. Hélas, rien n’a changé. Bien au contraire, l’État  n’a même pas prévu des recettes de bonus de production dans le budget.

Comme en  2017, alors qu’au premier trimestre (crédits provisoires), le Trésor public a encaissé plus de 1.9 milliard de francs au titre de bonus de signature initial. Déjà en 2015, le Trésor public n’avait rien perçu alors que plus de 2.3 milliards de FC avaient été prévus dans le cadre de bonus de production. En 2016, aucun franc n’a été versé par les pétroliers producteurs alors que les prévisions budgétaires étaient de l’ordre de 2.4 milliards de francs.

Voilà 30 mois déjà, depuis que le chef de l’État, Joseph Kabila Kabange, a promulgué la loi n°15/012 du 1er août 2015 portant régime général des hydrocarbures. Mais sur terrain, rien n’a véritablement changé dans le sens que ce code des hydrocarbures avait suscité lors de sa présentation officielle par le ministre des Hydrocarbures, Aimé Ngoy Mukena.