L’eau et l’électricité n’ont jamais coûté aussi cher

Eau, électricité, transport en commun... Les gestionnaires de nos prestataires quotidiens semblent s’être tous donné le mot pour gonfler la note. À la fin du mois, ça finit par faire beaucoup.

 

Vingt dollars ou l’équivalent en franc par-ci, trente dollars par-là, voire bien plus. Partout à Kinshasa, les fournisseurs de services publics que sont l’eau et l’électricité, à savoir la REGIDESO et la Société nationale d’électricité (SNEL) font monter l’addition largement au-dessus du niveau des moyens du citoyen lambda. Eau, électricité, transports… aucun secteur n’est épargné ! Et toutes les raisons sont bonnes pour en demander plus aux clients alors que le service rendu n’est nullement à la hauteur de ce qu’on le paie. Certaines hausses sont utiles, pour assurer l’entretien des réseaux pourrait-on ainsi dire. Mais d’autres, très nombreuses, sont franchement beaucoup moins légitimes.

Mauvaise presse

Ce dernier temps, de gros rouleaux de câbles estampillés « Câbles du Liban »  ont été vus, stockés, par endroits, à Kinshasa, voilà des mois. On voit aussi des ouvriers enfouir des câbles du côté de Limeté vers Lemba Salongo. Mais les abonnés se plaignent toujours du délestage devenu la norme. Il y a des quartiers qui sont dans le noir depuis belle lurette. Dans les ménages, tous appellent de leur vœu l’application de la loi sur la libéra lisation de la fourniture d’électricité dans la capitale. Peut-être la concurrence loyale viendrait arranger les choses, estime une dame de 70 ans dont 55 passés à Kinshasa. Elle connaît bien cette ville comme sa poche. Pour cet autre Kinois, la SNEL et la REGIDESO n’ont plus bonne presse auprès de la population. D’où il faut, pense-t-il, les dissoudre pour laisser la place aux privés. Ce qui se passe déjà à Goma le rassure que les privés pourront sortir les Kinois du calvaire que leur imposent la REGIDESO et la SNEL. Et c’est déjà le branle-bas. Il en est qui brandissent des matériels prétendus de qualité, et d’autres des capitaux frais. D’autant plus que ni la SNEL ni l’État actionnaire unique n’ont pas la capacité de financer la réhabilitation et la modernisation des infrastructures énergétiques existantes. Celles-ci nécessitent au moins 1 milliard de dollars, dont 300 millions pour les infrastructures de transport et 40 millions pour celles de distribution, selon le constat du Comité de pilotage de la réforme des entreprises publiques (COPIREP). Et le check-up de la SNEL réalisé par le Bureau central de coordination des projets (BCECO) – agence gouvernementale – conclut à la nécessité d’une thérapie de choc. À voir comment on travaille dans les agences de la SNEL, tout fait défaut : câbles, transformateurs, approvisionnement, prélèvements, entretien, facturation. Bref, tout est archaïque et laisse à désirer. Les abonnés sont devenus la bête des agents de la SNEL, qui sont passés maîtres dans l’art de la truanderie. Vives les tracasseries ! La libéralisation du marché du courant a le mérite de porter la couverture énergétique de 9 à 60 % d’ici 2025, selon le COPIREP. L’électrification urbaine, particulièrement, devrait, elle, quadrupler de 35 à 90 % au cours de la même période.  L’accès à l’électricité demeure un casse-tête en RDC. Comment la SNEL peut-elle se développer, améliorer la qualité de son énergie, répondre aux besoins de la population, quand l’outil de production n’est plus entretenu, quand le stock de pièces de rechange est inexistant, quand elle est privée des recettes d’exportation ?