L’État devra jouer un rôle primordial dans la protection de l’épargne des ménages

Une bonne définition de politique nationale de l’épargne ou pro-épargne est un gage de relance de l’activité économique via l’octroi des crédits qui, à court terme, augmentent successivement les capacités productives, la production nationale et par conséquent le revenu par habitant. 

DE NOMBREUX défis s’imposent déjà au secteur financier congolais. La stratégie classique des banques et des institutions de microfinance, c’est de principalement cibler les villes compétitives du pays, en termes d’importance des activités commerciales. Au Nord et au Sud-Kivu, dans l’ex-province Orientale, la bancarisation a pris du retard à cause de l’instabilité due aux conflits armés.

L’implantation des agences coûte cher aux banques, certaines recourent désormais à des intermédiaires locaux (agents bancaires), contribuant ainsi à l’émergence des nouveaux acteurs financiers. Les agents bancaires offrent aux clients des banques le service de dépôt et de retrait d’argent sur un compte. Actuellement, les banques courtisent les TPE/PME/PMI. Rien que pour la seule ville de Kinshasa, on estime à plus d’un million d’entrepreneurs de cette catégorie. Il faut donc développer des produits financiers adaptés aux TPE/PME/PMI, dont la grande majorité évolue encore dans l’informel. 

Le système financier national n’inspire pas totalement encore confiance aux agents économiques, notamment les ménages et les TPE/PME/PMI. Il y a un grand travail de sensibilisation à faire. D’après les experts, une bonne politique pro-épargne passe par une bonne gestion macroéconomique du pays. Ils pensent qu’il faut assainir l’environnement économique, développer l’esprit d’entreprendre tout en réduisant les tracasseries administratives, fiscales et financières afin que les banques trouvent des débouchées pour l’épargne.

Dans le milieu rural, les gens vivent essentiellement de l’agriculture. Il faudra donc que l’épargne soit dirigée vers les activités agricoles, notamment pour l’achat des tracteurs, des intrants agricoles et même vers le financement de la recherche dans ce domaine, afin d’améliorer la productivité et la différence entre le prix aux producteurs et le prix aux consommateurs. En effet, le développement du secteur agricole entraînera celui du secteur manufacturier.

Épargne, facteur de développement 

Le développement vise à améliorer la qualité de vie des individus et à accroître leur capacité à influer sur leur avenir. Cet objectif suppose une augmentation du revenu par habitant. L’accès aux crédits exerce une influence positive sur la croissance des entreprises et du pays. « Pour que ceux-ci soient accordés, l’on doit disposer préalablement de l’épargne car il n’y a pas de crédit sans épargne préalable », insiste Patrick Kabuya.

Pour cet expert, l’épargne est considérée comme une des principales sources de financement de la croissance et donc du revenu par habitant, car elle permet de financer les investissements, assure le maintien et la croissance du niveau de la production. « En l’absence d’incertitude et de transferts intergénérationnels, l’épargne reste l’unique vecteur du transfert du pouvoir d’achat d’une période à l’autre, pour adapter le profil inter temporel des ressources à celui de la consommation désirée », fait-il encore remarquer.

L’objectif premier de la politique d’épargne doit être de favoriser l’optimisation du bien-être des ménages (épargnants) dans une perspective de cycle de vie. Vu sous cet angle, l’épargne revêt une importance accrue si l’on veut garantir et améliorer le bien-être présent et futur des ménages, soulignent des économistes. 

Patrick Kabuya rappelle que « L’émergence des pays comme la Chine, le Brésil, la Corée du Sud, Singapour, l’Inde, l’Afrique du Sud réside en grande partie dans l’importance qu’ils accordent au futur, donc à l’épargne ». Cependant, le taux d’épargne est faible en RDC. 

Quelques chiffres : de 1964 à 1990, ce taux a fluctué autour de 11.6 % du Produit intérieur brut (PIB). Entre 1990 et 1993, le taux a baissé de 9.3 % à 3.98 %, après avoir atteint le plancher de 1.8 % en 1991. Entre 1994 et 1996, on a observé des chiffres se situant au-dessus de 10 %, le taux le plus élevé étant de 27.6 % en 1996. Enfin, de 1997 à 2005, on a observé un faible taux d’épargne fluctuant autour de 4.47 % du PIB avec une moyenne d’environ 10 % du PIB pour la période allant de 1960 à 2007. 

Les ménages congolais n’ont pas une forte préférence pour le futur (épargne) à cause notamment de plusieurs phénomènes, dont l’environnement macroéconomique et financier instable, le système financier sous développé, la sous bancarisation de l’économie nationale, les faibles taux d’intérêt, l’inflation… Face à tous ces défis, l’épargne des ménages n’est pas protégée. 

Certes, il est clair que si l’on encourage les ménages à épargner, l’augmentation du taux d’épargne qui en résulterait, permettra de résoudre plusieurs problèmes dont celui du financement de l’économie. 

Pour Patrick Kabuya, le fait que les ménages ont peu confiance en le secteur financier, ils accordent beaucoup plus l’importance à l’épargne en actif réel et en capital humain des enfants.