Pétrole : malgré la remontée des cours, le marché s’inquiète d’un surplus d’offre

LE BARIL de Brent de la mer du Nord pour livraison en août valait 62,23 dollars à Londres, vendredi 7 juin, en hausse de 56 cents par rapport à la clôture de la veille. À New York, le baril américain de WTI pour le contrat de juillet gagnait 52 cents à 53,11 dollars. Les cours restent cependant relativement proches de leurs plus bas depuis janvier atteints mercredi 5 juin, à 59,45 dollars pour le Brent et à 50,60 dollars pour le WTI.

Les cours ont depuis « suivi les Bourses à la hausse, alors que les investisseurs ont espéré que les droits douaniers américains sur le Mexique pourraient être évités », ont commenté les analystes de JBC Energy. L’or noir est considéré comme un actif à risque, et souffre donc des tensions commerciales qui pourraient affecter l’économie mondiale. « L’attention du marché se tourne de plus en plus vers l’OPEP+ », ont ajouté les analystes de JBC Energy.

Vienne en ligne de mire

L’Organisation des pays exportateurs de pétrole (OPEP) et ses partenaires, dont la Russie, doivent se retrouver dans les prochaines semaines à Vienne, pour décider de renouveler ou non leur accord de limitation de la production. Alors que les États-Unis produisent à plein régime, les tensions commerciales et des signes de faiblesse de la croissance mondiale pourraient limiter la hausse de la demande, rendant l’accord de l’OPEP+ essentiel à l’équilibre du marché. Or, la position des deux poids lourds de l’accord, l’Arabie saoudite et la Russie, diffère légèrement, Ryad souhaitant un prix élevé quitte à produire moins tandis que Moscou semble hésiter à perdre des parts de marché en faveur des États-Unis.

Si Khaled al-Faleh, le ministre saoudien, a affirmé être « sûr » que l’accord serait renouvelé, Alexandre Novak, son homologue russe, s’est montré plus prudent, affirmant qu’il aurait l’occasion de revoir al-Faleh avant la réunion de l’OPEP+.

Malgré ce rebond, « essayer de parier contre la baisse des prix est aussi dangereux que d’attraper un couteau qui tombe », a prévenu Neil Wilson, analyste chez Markets.com. En effet, la chute récente des cours du pétrole a de quoi donner le vertige. 

Le Brent, qui culminait fin avril à 75,60 dollars, a perdu près de 19 % depuis, tandis que le WTI a chuté de plus de 21 % par rapport à ses sommets, à 66,60 dollars, atteint à la même période. Ils évoluent désormais proches de leurs plus bas depuis la fin janvier, et leurs gains de 2019 ont fondu (+13 % depuis le début de l’année).

L’essentiel de ces pertes s’est concentré sur trois séances de la dernière semaine de mai. Un phénomène « très inhabituel » pour les analystes de Morgan Stanley, qui soulignent que de telles périodes de ventes se retrouvent historiquement lors de récessions ou durant le contre-choc pétrolier de 1986. 

Lors de la semaine achevée le 31 mai, les réserves commerciales de brut ont augmenté de 6,8 millions de barils pour s’établir à 483,3 millions, selon les données publiées par l’Agence américaine d’information sur l’Énergie (EIA). La production américaine est, pour sa part, restée à un niveau record (12,4 millions de barils par jour, selon l’EIA). Dans ce contexte, les investisseurs se tournent vers l’OPEP et ses partenaires, notamment la Russie, dont l’accord de limitation de la production doit arriver à échéance fin juin.

Divergences d’opinion

Vladimir Poutine, le président russe, présent au même Forum, a reconnu devant des responsables d’agences de presse qu’il y avait « certaines divergences d’opinion » au sein de l’OPEP+. Selon lui, la Russie se satisfait d’un prix du Brent entre 60 et 65 dollars, alors que certains membres de l’OPEP, comme « par exemple l’Arabie saoudite », calculent leur budget en espérant des cours plus élevés. Même la date de la prochaine réunion de l’OPEP+ n’est pas certaine. Officiellement toujours prévue pour la fin du mois de juin, elle pourrait être décalée à début juillet, à la demande de la Russie.

C’est pour la première fois que le prix du baril de pétrole de Brent, référence européenne, est passé sous les 60 dollars en quatre mois, plombé par des stocks commerciaux abondants aux États-Unis et par le conflit commercial. 

Le baril de Brent pour livraison en août perdait 2,24 dollars et s’échangeait à 59,73 dollars. Le baril de WTI pour livraison en juillet, référence américaine, perdait 2,75 dollars à 50,73 dollars.