Semaine française de Kinshasa autour du numérique et de l’agribusiness

 

Forte du succès de la troisième édition qui a accueilli plus de 11 000 visiteurs en quatre jours, la Chambre de commerce internationale franco-congolaise (CCIFC) a décidé de rééditer l’exploit. Elle va renouveler l’événement qui s’impose désormais comme un événement économique incontournable pour les acteurs économiques de RDC. La 4è édition de la Semaine française de Kinshasa se déroulera du 24 au 27 mai 2017, à la Halle de la Gombe. Cette année deux thèmes centraux ont été retenus : le numérique et l’agribusiness. Des conférences et tables seront organisées afin de débattre de « l’existant et des potentialités de développement de ces secteurs ».

Le coup d’envoi de cette édition a été donné en octobre 2016, par le lancement du concours d’identité visuelle. Cet événement de promotion de l’offre française en République démocratique du Congo, est organisé par la Chambre de commerce franco- congolaise, en partenariat avec l’ambassade de France et de la section locale des conseillers du commerce extérieur de la France. Comme pour les éditions passées des activités culturelles seront proposées chaque jour.

Manque d’initiatives

L’organisation de cet événement économique autour du numérique et de l’agribusiness arrive à point nommé, étant donné qu’en matière d’économie numérique, la RDC est en manque d’initiatives. Le secteur des télécommunications connaît depuis 2000 un taux de croissance très élevé. De même sa contribution au budget de l’État et à la formation du Produit intérieur brut (PIB) ne cesse d’augmenter. Il est dommage de constater que le développement de la téléphonie mobile ne s’accompagne pas de celui de la téléphonie fixe et de l’Internet. Il faut dire que l’Internet est encore un luxe pour la grande partie de la population congolaise dont le revenu est faible.

Pourtant, la RDC s’est engagée à entreprendre plusieurs projets de technologies de l’information et de la communication (TIC). Le programme gouvernemental procède du potentiel dans ce secteur et de l’étendue du marché et des besoins, présents et à venir, des entreprises nationales encore sous-exploités. Pour accroître la contribution des télécommunications à la croissance, à l’emploi et au budget de l’État, le gouvernement s’est fixé comme objectifs de construire une infrastructure nationale moderne des télécommunications (téléphonie mobile et Internet à haut débit) par le biais d’un partenariat public-privé ; d’améliorer le taux d’accessibilité aux services des télécommunications et des nouvelles technologies ; et de renforcer la libéralisation et la compétitivité du secteur pour attirer les investissements privés.

En 2016, il fallait porter la télé-densité à 40 lignes de téléphone fixe ou mobile pour 100 habitants ; poser 5 000 km de câble de fibre optique sur toute l’étendue du territoire national (réseau national de fibre optique ou backbone); connecter environ 30 millions de lignes fixes et mobiles (réseau métropolitain) ; informatiser l’administration publique et les services spécialisés de l’État, ainsi que les postes frontaliers. Pour atteindre ces objectifs, il était prévu d’améliorer la gouvernance et la concurrence dans le secteur, par l’assainissement du spectre des fréquences ; mettre à jour le cadre légal et réglementaire des télécommunications et de renforcer les capacités de l’Autorité de régulation des poste et télécommunications au Congo (ARPTC) ; accroître le taux d’investissements public dans le secteur et favoriser les partenariats public-privé ; finaliser les travaux de construction de la station d’atterrage de Moanda en vue d’assurer la connexion du réseau de transmission par câble à fibre optique avec le câble sous-marin du consortium WACS ; assurer l’exploitation commerciale de la première phase du backbone national entre Muanda et Kinshasa ; poursuivre la construction du backbone entre Kinshasa et Kasumbalessa ; finaliser le passage de la télévision analogique à la télévision numérique (TNT) ; restructurer les opérateurs publics, le Réseau national de télétransmission par satellite (RENATELSAT) et la SCPT…

Tous ces projets n’ont pas été menés à leur terme en 2016. Conséquence : la RDC est encore à la traîne des pays africains en matière d’initiatives via les services en ligne ou le téléphone portable. Mis à part le système de publication des résultats de l’Examen d’État, l’équivalent du baccalauréat, et le paiement via le mobile, plus rien ou presque. Pourtant, la plupart des pays d’Afrique subsaharienne ont un ministère de l’Économie numérique et investi dans les infrastructures télécoms et le développement de services en ligne ou via le téléphone portable. Autour de nous, après avoir lancé de nouvelles négociations pour l’attribution des licences 4G aux opérateurs de téléphonie mobile, le gouvernement togolais a inauguré dans plusieurs localités du pays un dispositif permettant d’offrir aux populations un service de communication à prix réduit baptisé « Wi-Fi Public ».

Le Togo ambitionne de devenir une plateforme régionale sur le plan portuaire, aéroportuaire et financier. « Dans ce contexte, il est important d’avoir des infrastructures de télécoms. « Il y a plusieurs aspects pour lesquels le numérique est pertinent. Le premier est lié aux objectifs de croissance », explique un expert. Le numérique, qui représente environ 10 % du PIB, permet donc de soutenir la croissance du Togo évaluée à 5,4 % en 2015 », poursuit-il. Avec le ministère de l’Agriculture, le ministère de l’Économie numérique du Togo a lancé AgriPME, un dispositif utilisé par plus de 25 000 agriculteurs. AgriPME (contraction d’agriculture porte-monnaie électronique) permet de distribuer des subventions aux agriculteurs par paiement mobile. Au départ du projet, le ministère de l’Économie numérique a identifié ceux qui étaient les plus fragiles, les plus vulnérables du pays (76 522 ont été recensés), et leur a donné une carte SIM dotée d’un crédit, dont la valeur correspondait au montant de la subvention à laquelle ils avaient droit.

Sur son téléphone, l’agriculteur a reçu ensuite un code qu’il devait présenter à son distributeur d’engrais équipé d’un terminal. L’agriculteur qui n’avait pas de téléphone, présentait simplement cette carte SIM analysée par le système. Le distributeur entrait ensuite un code qui permettait de connaître le montant de la subvention en engrais qu’il devait verser à l’agriculteur. Le paysan pouvait payer le reste de ses engrais virtuellement, s’il avait au préalable crédité son compte, ou en liquide dans le cas contraire.

Ce système a permis une très grande traçabilité de l’utilisation des subventions agricoles et de connaître précisément la demande de chaque localité en engrais. AgriPME est intéressant pour le secteur privé car il permet de connaître la demande exacte d’engrais à distribuer dans une préfecture. C’est l’État qui, de façon très précise, aura communiqué cette information. Grâce au projet AgriPME, le Togo est le premier pays francophone à distribuer des subventions par paiement mobile. Le Togo développe aussi un projet d’e-village qui va concentrer 4 400 chefs de village et chefs de canton. L’idée est simple. On leur fournit un crédit mensuel, un téléphone et une carte SIM. Tous les mois, ils perçoivent un crédit qui doit leur permettre, par exemple, de prévenir leur préfet d’un danger, d’un accident grave ou de lui signaler la présence d’individus potentiellement dangereux puisque les frontières sont poreuses. Les maires ne peuvent plus dire : « Je n’avais pas de crédit » puisque celui-ci est versé chaque mois et doit servir dans certaines situations. Pour les épidémies de méningite, par exemple, ils ont le devoir d’alerter dès qu’une personne tombe malade de façon suspecte. Les chefs de village se sentent ainsi reconnus puisqu’on leur a donné un outil de travail. Des données GPS ont aussi été relevées au sein des villages pour différentes études.

D’autres pays africains, comme le Rwanda, le Ghana, le Kenya, le Cameroun, la Côte-d’Ivoire, le Nigeria, etc., ont développé plusieurs systèmes dans les domaines de la santé, de l’éducation, du commerce… Le Rwanda a beaucoup investi en matière de nouvelles technologies. Ce pays développe notamment un système de drones capable de porter des poches de sang dans des endroits difficilement accessibles. Le Kenya est très développé en systèmes de paiement mobile… L’accueil a été mitigé au départ, mais l’adhésion populaire à tous ces projets est souvent rapide. En Afrique, l’absence de statistiques et de données pèse souvent sur les décisions économiques. Les systèmes numérisés permettent d’obtenir des données très précises. Ils peuvent apporter des données économiques intéressantes.