Volonté politique et suivi de la mise en œuvre, clé de réussite

Comment arrêter la corruption en RDC, quand on sait que ce qui a été fait auparavant, n’a pas encore donné des résultats escomptés ? Le président de la République qui fait de la lutte contre la corruption une affaire personnelle, aborde le problème en termes d’« enjeu national ».

Une adresse électronique jedenonce2015@gmail.com est ouverte 24 heures sur 24 pour la dénonciation tous les actes de corruption et de détournement de l’argent public. Le 9 décembre 2016, Journée internationale de lutte contre la corruption décrétée par les Nations Unies, le conseil spécial du chef de l’État en charge de la bonne gouvernance et de la lutte contre la corruption, le blanchiment des capitaux est resté aphone. L’initiative de la commémoration a été reprise par les ONG de la société civile.

Nouvelles normes

Les Nations Unies, on le sait, avaient lancé, le 9 décembre 2003 à Merida au Mexique, une nouvelle convention mondiale contre la corruption. Elle établit de nouvelles normes et constitue une avancée considérable en matière de recouvrement des avoirs illicites envoyés à l’étranger. Mais son succès exige une volonté politique et un engagement à faire le suivi de sa mise en œuvre. Cette convention est une étape importante dans l’effort international pour combattre la corruption, selon Transparency international, principale ONG se consacrant à la lutte contre la corruption. Elle fournit un arsenal de normes et de mesures très complet tendant à « favoriser la coopération internationale et les efforts au plan national pour combattre la corruption ». La convention mondiale prévoit l’instauration d’un système efficace d’assistance juridique mutuelle afin de faciliter les poursuites judiciaires dans les cas de corruption transfrontaliers. Beaucoup d’affaires sont abandonnées par manque de coopération avec l’étranger. La convention révolutionne également en posant que les fonds transférés par des chefs d’État corrompus pourront être restitués aux pays d’où ils ont été pillés et employés pour améliorer le bien-être du peuple. Elle inclut aussi pour la première fois le mode opératoire de recouvrement des avoirs volés en matière de coopération internationale. Par ailleurs, les personnes victimes de la corruption ont le droit d’initier une action en justice contre des responsables.

Cependant, cette convention ne garantit pas l’efficacité de sa mise en œuvre. L’expérience des autres conventions sur la corruption (OCDE, Conseil de l’Europe, Organisation des États américains, etc.) a clairement démontré que les procédures de mise en œuvre sont essentielles pour s’assurer que les promesses diplomatiques se transforment en une action gouvernementale efficace. Transparency International s’est engagée à soutenir un processus efficace de suivi de cette convention. Mais établir un mécanisme efficace et constructif pourrait prendre du temps. L’impact de la convention mondiale sur la lutte dépendra de sa mise en œuvre efficace ainsi que de son application par un grand nombre d’États. Pour cela, il faudra créer une prise de conscience publique et accroître l’engagement.

La RDC toujours dans le rouge 

Malgré les différents mécanismes de lutte et les « bonnes intentions » au sommet de l’État, la corruption se développe comme une hydre, c’est-à-dire un mal qu’on ne peut pas maîtriser. Elle est même devenue un « sport national » par manque de « volonté politique » pour l’éradiquer sinon réduire son impact sur la société. Avec un score de 2 sur 10 sur l’échelle de perception de la corruption, Transparency International place la RDC au bas du tableau des pays les plus corrompus de la planète. Les surcoûts associés à la corruption se chiffrent entre 30 à 50 % de la valeur de la transaction, alors qu’ils ne sont que de 10 à 30 % dans le reste de l’Afrique. En 2010, le gouvernement avait décidé de mettre en œuvre pas moins de 45 mesures pour lutter contre la corruption (codes miniers et forestiers, processus de Kimberley…). Pour la majorité des investisseurs, les processus d’attribution des marchés publics, par exemple, demeurent encore trop peu transparents et sont encore un terrain propice pour le développement de la corruption et du trafic d’influence.

État de droit

Des rapports des ONG sur la corruption en RDC ne laissent entrevoir aucun progrès en matière de lutte anti-corruption. Au contraire, ils dénoncent « le dysfonctionnement du secteur judiciaire qui a fait que même les gens qui sont attrapés la main dans le sac peuvent s’en tirer à très peu de frais. Dans le classement Doing Business sur le climat des affaires dans le monde, la RDC est 181ème sur 183 pays. Pour elles, la justice a une fonction de régulation économique essentielle et constitue, de ce fait, un vecteur capital de développement économique et social. Or, la justice est le parent pauvre de trois pouvoirs constitutionnels sur lesquels reposent l’État et la démocratie en Afrique. Elle se caractérise par des dysfonctionnements importants. Par exemple, le nombre réduit de tribunaux de commerce et une corruption omniprésente rendent l’accès à la justice problématique pour les investisseurs, en particulier les petites et moyennes entreprises (PME) qui constituent de loin la majorité des entreprises nationales.

La question de l’indépendance de la justice reste posée. La population en général et les entrepreneurs en particulier font très peu confiance au système judiciaire. Il y a quelques années, les sociétés, tout comme l’État lui-même, étaient systématiquement condamnés à des lourdes amendes à chaque fois qu’elles étaient en procès contre les tiers devant les cours et tribunaux. À l’époque, bien des sociétés ont été forcées de fermer, dépitées par des décisions de justice. En son temps, la FEC avait dénoncé cet « acharnement » des juges sur les sociétés, qui avait l’air de tout sauf de l’indépendance de la justice. Certains chefs d’entreprises sont allés jusqu’à accuser des juges de corruption et de complicité avec les avocats.