Prochainement, un nouveau smartphone Blackberry sous Android arrivera sur le marché. C’est le KeyOne, un appareil doté d’un écran de 4,5 pouces avec clavier physique sous processeur quadri-cœur Qualcomm Snapdragon 625 à 2 GHz, 3 Go de RAM et 32 Go de stockage. Mais ce n’est pas l’entreprise canadienne qui le fabriquera. Celle-ci a en effet pris la décision, en septembre 2016, de déléguer la production et la distribution de ses terminaux à des partenaires tout en continuant néanmoins à fournir l’environnement logiciel hautement sécurisé. Pour ce qui concerne le KeyOne, c’est le chinois TCL (par ailleurs fabricant des Alcatel) qui va en assurer la production.
Retour aux fondamentaux
Une stratégie de désengagement « qui permet de repositionner l’entreprise sur les fondamentaux », justifie Dagobert Levy, responsable marketing d’Europe du Sud et de l’Est. À savoir l’offre logicielle et les services. « Il faut se souvenir que nous ne venons pas du monde grand public comme Apple ou Android, nous y avons eu un succès à un certain moment, mais il a fallu gérer le retour à la réalité », complète son collègue Jean-Philippe Combe, ingénieur avant-vente. Ce qui ramène la stratégie à l’offre logicielle (y compris pour smartphone) et les services. « Mais nous continuons de fournir le hardware pour les environnements les plus régulés car, dans ce cas, nous n’avons pas le choix », ajoute-t-il. Autrement dit, être en mesure de fournir une offre sécurisée de bout en bout.
L’offre logicielle se concentre aujourd’hui sur Blackberry Secure, une plate-forme héritée de Blackberry Enterprise Services (BES), le serveur de gestion des terminaux multi OS, qui s’enrichit au fil des développements et acquisitions. Comme celle de Good Technology en septembre 2015, qui a apporté la technologie de conteneurisation pour séparer les données professionnelles et personnelles et, surtout, permettre aux entreprises de développer et déployer leurs propres applications métier. Plus récemment, c’est le module WatchDox, issu d’un autre rachat, qui a été ajouté à la plate-forme. Devenu Workspaces, il permet de partager les données de l’entreprise internes comme externes de manière sécurisée en assurant leur traçabilité. S’y ajoute AtHoc, solution de communication de masse et collaboration en temps de crise avec système d’alerte multi supports et interaction avec les personnes, qui a notamment séduit la Mairie de Rosny-sous-Bois (en Seine-Saint Denis).
3 500 nouveaux clients
« Avec Secure, on va vraiment pouvoir couvrir la protection de la donnée de l’entreprise, y compris sur mobile, jusqu’à la protection des personnes et des biens physiques », résume Dagobert Levy. Une solution qui séduit. Au quatrième trimestre fiscal, Blackberry a revendiqué 3 500 nouveaux clients sur la période. Avec une progression de 30 % du chiffre d’affaires sur la partie logiciels et services, « en ligne avec les objectifs et un Ebitda positif pour le 14 trimestre consécutif », insiste le responsable. Qui souligne que « Blackberry Secure arrive premier sur l’ensemble des critères du Magic Quadrant de Gartner pour les suites de gestion de la mobilité en entreprise ». Pour lui, il ne fait aucun doute que le pivot 100 % logiciel amorcé avec l’arrivée de John Chen à la tête de l’entreprise en décembre 2013 porte aujourd’hui ses fruits. Lesquels vont continuer à pousser dans le domaine de l’Internet des objets (IoT). « Blackberry a toutes les bases pour être très pertinent sur ce marché en étendant la gestion des terminaux à tous les objets connectés dans l’entreprise qui vont collecter de la données », considère notre interlocuteur. Aujourd’hui, deux solutions confirment la pertinence de cette stratégie. D’abord QNX, société acquise en 2010 qui a développé un OS embarqué en temps réel aujourd’hui déployé dans 60 millions de voitures, connectées ou pas. « Cela nous donne la crédibilité nécessaire pour investir massivement sur ces sujets, notamment avec la création d’un centre de recherche sur la voiture connectée à Otawa », assure Dagobert Levy.
Transport et santé
Autre offre porteuse : Radar, une solution de sécurisation des conteneurs qui passe par un boîtier connecté fixé au caisson de transport et assure une traçabilité sur 5 ans. Position GPS, inclinaison, ouvertures des portes, hygrométrie, etc., rien n’échappe à Radar qui remonte les données vers une plate-forme mise à la disposition du client. En intégrant QNX, pour le pilotage des fonctions, et les modules Secure de gestion des terminaux, la solution est un concentré de l’offre technologique de Blackberry. « Avec Radar, on s’est focalisé sur un domaine qui fait sens pour démontrer notre savoir-faire », argumente Jean-Philippe Combe. Qui assure que l’offre est aujourd’hui utilisée par des clients transporteurs. Mais au-delà des conteneurs, elle peut adresser plus globalement les besoins du secteur des transports.
Ces derniers temps, Blackberry travaille aussi sur le monde de la santé, « où il y a aussi beaucoup de données à protéger » qui circulent entre le patient, les laboratoires, et l’hôpital. Mais le Canadien n’a encore séduit aucun client. Parallèlement, l’entreprise entend également développer son activité de services à travers du conseil, de l’audit en cyber-sécurité (avec l’acquisition d’Encription en février 2016) et l’implémentation de solutions. Après le retour sur les fondamentaux, les trimestres profitables et la consolidation des acquisitions, Blackberry élargit aujourd’hui sa stratégie sur l’IoT. « La voiture, les conteneurs, les équipements médicaux, les terminaux… la gestion sécurisée de tous ces éléments qui ont vocation à devenir des extensions de l’entreprise constituent la stratégie de Blackberry aujourd’hui », résume Dagobert Levy.