Actuellement, les garanties et les voies d’exécution sont régies par le droit de l’OHADA (Organisation pour l’harmonisation en Afrique du droit des affaires). Dans sa version de 1990, il comporte des avancées potentiellement utiles au crédit, telles que le transfert temporaire de propriété à titre de garantie. Toutefois, certaines garanties immobilières se heurtent souvent aux incertitudes sur la propriété foncière et à l’imperfection des registres (cadastres). Par ailleurs, les voies d’exécution de l’OHADA posent le principe d’un titre exécutoire accordé généralement par une décision de justice (ou une décision arbitrale), puis diverses procédures de saisie-conservation et de saisie-vente. Du fait du coût et de la lenteur des voies d’exécution judiciaires, les procédures sont souvent utilisées pour des créances d’un montant supérieur au seuil de la micro-finance) ou pour sanctionner un débiteur de mauvaise foi…
Par contre, les procédures extrajudiciaires de recouvrement procèdent d’un règlement à l’amiable et les moyens de pression sont par conséquent limités. En droit pénal, le fait, pour un créancier qui n’a pas un titre exécutoire et en dehors du droit des voies d’exécution, de saisir le patrimoine d’un débiteur, et ce quand bien même il disposerait d’une créance certaine, liquide et exigible, constitue « une soustraction frauduleuse de la chose d’autrui et est donc qualifiable de vol ».
Le débat se corse
Aujourd’hui, certains voudraient que le risque juridique fasse l’objet d’une réglementation particulière. Ils proposent que la Banque centrale définissent mieux défini les méthodes de pression socialement acceptables en RDC. D’autres préconisent une corrélation entre la nature de la créance (somme d’argent) et les moyens mis en œuvre ne visant que le patrimoine du débiteur et non pas sa réputation ou son honorabilité. Ceci limiterait donc les pratiques à but vexatoires non justifiables par une volonté de recouvrement. D’autres encore militent pour que l’octroi d’un crédit ne soit pas subordonné à une garantie mais soit simplement conditionné par le suivi par la banque de la réalisation de l’objet pour lequel le crédit a été demandé. En effet, beaucoup de jeunes veulent bien demander un crédit mais ils n’ont pas de garanties à présenter quant à ce.
Par ailleurs, le droit OHADA permet à toute personne physique ou morale de recourir à l’arbitrage, notamment sur les droits économiques dont elle a la libre disposition : « La sentence arbitrale n’est susceptible d’exécution forcée qu’en vertu d’une décision d’exequatur rendue par le juge compétent dans l’État-partie. » Et « la reconnaissance et l’exequatur de la sentence arbitrale supposent que la partie qui s’en prévaut établisse l’existence de la sentence arbitrale. L’existence de la sentence arbitrale est établie par la production de l’original accompagné de la convention d’arbitrage ou des copies de ces documents réunissant les conditions requises pour leur authenticité. Si ces pièces ne sont pas rédigées en langue française, la partie devra en produire une traduction certifiée par un traducteur inscrit sur la liste des experts établie par les juridictions compétentes. La reconnaissance et l’exequatur sont refusés si la sentence est manifestement contraire à une règle d’ordre public international des États-parties. »
Si les procédures d’arbitrage commercial classique sont inadaptées, car trop longues et coûteuses, les parties sont libres d’imaginer et de convenir de procédures simplifiées et accélérées, qui pourraient être compatibles avec la gestion des contentieux de masse liés au recouvrement des créances impayées. Ainsi, on pourrait imaginer que l’association professionnelle qui est l’Association congolaise des banques (ACB) puisse convenir avec le Centre national d’arbitrage, de conciliation et de médiation (CENACOM) et/ou d’autres centres d’arbitrages implantés en RDC, d’une procédure spécifique pour surmonter les obstacles à la délivrance d’un titre exécutoire. Les sentences arbitrales doivent faire l’objet d’un exequatur apposé par le président du tribunal de grande instance (TGI)…
Le contrat de prêt détaille généralement les mécanismes de recouvrement de créance. Mais les banques préfèrent la voie de la négociation, aidant le client par une prorogation des échéances en vue d’améliorer sa capacité financière et à commencer à rembourser le prêt qui lui a été consenti. Ce n’est qu’en cas de mauvaise foi présumée que les garanties sont exécutées ou que la justice est saisie. Selon l’enquête, la plupart des clients ayant obtenu un crédit trouvent les politiques de recouvrement des banques assez agressives, parfois ne respectant
pas la dignité du client. Contrairement à ce qu’ont affirmé les banques, une petite poignée des participants aux focus groups ont signalé le recours à l’affichage des données des clients défaillants parmi les méthodes de recouvrement.
Dans certains cas, pour recouvrer leurs créances en souffrance, les banques font carrément recours à la garantie offerte par les clients. Ce sont notamment les maisons, les terrains, les véhicules, les équipements, les stocks de marchandises et les bâtiments commerciaux… L’enquête a révélé que les hommes s’endettent plus auprès des banques commerciales, puisqu’elles exigent des garanties formelles, alors que les femmes s’adressent le plus souvent aux institutions de micro-finance (IMF) et aux coopératives d’épargne et de crédit (COOPEC) dont certaines consentent des prêts solidaires. L’enquête a aussi montré que la plupart des clients (63,9 %) étant incapables de rembourser, contactent les banques pour renégocier un rééchelonnement de la créance. Et dans bien des cas, les clients et les banques ne sont pas tombés d’accord, et il s’en est suivi une saisie des biens placés en garantie.