Tanga Tout meilleur que tous les autres projets au Hackathon de Kinshasa

Une vingtaine d’équipes de jeunes accros aux médias numériques ont pris part au concours de l’innovation dans le secteur de la production et de la diffusion de l’information appelé « médiathon » organisé par l’OIF avec le concours de plusieurs organisations partenaires. 

 

Avoir un projet et un jour, se lancer. Le rêve est devenu réalité le 1er octobre pour l’équipe Tanga Tout (Tout lire en français). C’est le projet qui a remporté le 1er Prix (3 500 euros) du Hackathon spécial média, organisé à Kinshasa du 29 septembre au 1er octobre dans les installations de l’Hôtel de la Poste. Il s’est agi d’un concours d’innovation dans le secteur de la production et de la diffusion de l’information dans le cadre de la 4è édition du Hackathon, selon une formule inédite. Contrairement aux trois précédentes éditions, le médiathon de Kinshasa, placé sous le thème : « Médiathon de jeunes entrepreneurs et porteurs de projets pour l’innovation dans les médias numériques », a réuni exclusivement des équipes de jeunes de 18 à 35 ans, déjà formées et à l’œuvre sur des projets de startups. Dans le cadre de ce « marathon de l’innovation », les développeurs ou porteurs de projets (participants) ont été outillés à travers les ateliers de formation pour la gestion des projets, axée sur les résultats, la construction du business plan, tout en valorisant les aspects innovants de leurs applications.

Enjeu principal : accompagner les porteurs de projets innovants (étudiants en journalisme, journalistes, producteurs de contenus, développeurs web ou mobile, codeurs, business développeurs, entrepreneurs, graphistes, designers…) dans la production et la diffusion de l’information de manière à « adapter l’offre de médias aux évolutions rapides des technologies et de leurs usages par les populations ».

C’est dans cette perspective que le concours a été organisé. Le président de l’équipe qui a présenté le meilleur projet, primé par le jury, Christian Ngotsho, ne cache pas sa satisfaction. Il explique que « Tanga Tout est une plateforme qui permet de commercialiser tous les titres de presse en ligne ». Ces titres, dit-il, seront vendus en ligne en mode lecture seule, c’est-à-dire sans la moindre possibilité de télécharger, ni de copier ni encore de transférer. La particularité de ce projet est de pouvoir vendre tous les journaux paraissant à Kinshasa sur toute l’étendue du territoire national, selon Christian Ngotsho. De même, vendre tous les journaux paraissant dans les autres villes du pays, comme Lubumbashi, Goma, Beni, Bukavu, Kolwezi, Matadi, Boma, Kindu… « L’avantage du projet, c’est donner la possibilité à tous les lecteurs qui sont en République démocratique du Congo d’acheter les différents titres de presse publiés dans le pays », souligne Ngotsho.

L’idée du projet, selon lui, est partie d’un constat : « Aujourd’hui, ceux qui sont à Kinshasa ne connaissent pas les journaux paraissant à l’intérieur du pays et vice-versa. La solution que nous apportons, c’est offrir la possibilité aux entreprises de presse de vendre leurs produits sur toute l’étendue du territoire national ».

Pourquoi la priorité aux jeunes ?

Pour le représentant de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF), Emmanuel Adjovi, le but de l’événement est de donner la priorité à la jeunesse. Et le domaine dans lequel les jeunes peuvent s’exprimer le mieux actuellement, c’est le numérique. « Voilà pourquoi, nous avons estimé qu’il est important d’accompagner les jeunes dans le renforcement de leurs capacités pour relever le défi du numérique, ce qui a conduit à la mise en place du Hackathon. Nous avons choisi le domaine des médias parce qu’il est celui de la production des contenus, qui constituent un vecteur culturel répondant en même temps aux préoccupations de la Francophonie », fait-il remarquer.

Concrètement, 8 mentors, dont deux locaux (Congolais), ont été chargés de l’encadrement techniques des équipes. Ce sont des professionnels des médias innovants, des TIC et des questions juridiques liées à la propriété intellectuelle dont la tâche a été de sélectionner les participants au Hackathon, les encadrer et les accompagner lors de la pré-session de formation, aider pendant la phase finale les équipes à faire preuve de créativité et affiner leurs idées pour les transformer en projet, voire en prototype, et servir de relais entre les participants et les membres du jury. Composé de 1 représentant du ministère de PT-NTIC, 2 représentants de la SCPT, 2 représentants de l’OIF et de 8 mentors, le jury devait délibérer sur les productions ou applications présentées par les compétiteurs sur la base d’une grille de notation conçue par l’OIF et finalisée par les 8 mentors.

Les lauréats du concours ont reçu des dotations sous forme de prix : 3 500 euros pour le 1er Prix, 2 500 euros pour le 2è Prix et 1 500 euros pour le 3è Prix. Selon les organisateurs, ces dotations seront disponibles en deux tranches : le tiers en numéraires et les deux autres tiers serviront à financer l’éclosion des solutions innovantes proposées. Ces sommes seront mobilisées pour accompagner les lauréats dans le cadre d’un ou plusieurs incubateurs locaux. Plusieurs autres prix ont été également offerts aux lauréats avec le concours des sponsors et des partenaires.

Contexte et résultats attendus

Aujourd’hui, selon le Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD), les médias dits traditionnels sont en perte de vitesse. On assiste à une profusion d’informations sans garantie de fiabilité. Les frontières sont désormais brouillées entre les faits et les opinions, l’éthique professionnelle est défaillante… Bref, le journalisme est « sous les feux de la critique », pour reprendre le titre du colloque international qui s’est tenu à l’UNESCO, le 23 mars 2017. L’heure est donc venue de se demander si le « 4è pouvoir » constitue encore un pouvoir. Tellement qu’il perd sa crédibilité, peine à regagner la confiance du public.

Par ailleurs, poursuit le PNUD, les évolutions technologiques, économiques et politiques de cette dernière décennie ont fini par contaminer le champ médiatique mondial. La polarisation des médias qui constitue, certes, un outil précieux de la démocratie, favorise en même temps la viralité des contenus éditoriaux faux, truqués, souvent toxiques. Informé ou manipulé ? Le public a souvent du mal à faire la distinction entre la vérité et la contre-vérité. C’est dans ce contexte justement que l’OIF, avec le concours de LeMediaLabo organise le Hackathon. En RDC, la 4è édition a été placée sous le patronage du ministère des Postes et Téléphones et des Nouvelles technologies de l’information et de la communication. Plusieurs organisations ont aidé à l’organisation de la 4è édition du Hackathon spécial média ou Médiathon de Kinshasa, en tant que partenaires de l’événement. Parmi lesquels la Société congolaise des Postes et des télécommunications (SCPT), l’opérateur réseau de téléphonie mobile Africell, le PNUD, LN Communication, la Fondation Getler, l’ambassade du Canada et Habari RDC.

Le but poursuivi par le Hackathon de Kinshasa a été d’aider les entrepreneurs et les porteurs de projets innovants dans la maturation et l’éclosion des produits et services audiovisuels innovants. Mais aussi de confronter les talents, montrer leur potentiel aux professionnels de l’audiovisuel, aux entreprises et institutions internationales. Spécifiquement, soulignent les organisateurs, le Hackathon de Kinshasa a consisté à amener les jeunes désireux d’innover dans les médias numériques à se mettre en équipes pour compétir, améliorer leurs compétences en tant que porteurs de projets en matière d’innovation dans les médias numériques, accompagner les lauréats vers l’éclosion des solutions innovantes répondant aux besoins de leurs communautés.

Quant aux objectifs post-Hackathon, expliquent les organisateurs, il est question de favoriser l’émergence des startups et la production des solutions médiatiques innovantes, intégrer les bénéficiaires dans le réseau LemediaLabo de la Francophonie ainsi que les bénéficiaires des prix dans un incubateur local. Les organisateurs ont mis en évidence l’amélioration des capacités des candidats en matière de maîtrise des enjeux de l’innovation et des outils numériques conséquents, l’amélioration des solutions médiatiques innovantes de départ et le renforcement des capacités des porteurs de projets pour la création des startups. À l’issue du médiathon de Kinshasa, les organisateurs s’attendent (résultats post-Hackathon) à la création des startups à court terme, la mise à disposition des cibles identifiées des solutions innovantes, l’intégration des projets innovants dans le réseau de l’OIF à travers la plateforme LemediaLabo ainsi que dans un incubateur qui les aidera à assurer la finalisation de leurs projets.