Les assises de Goma ont porté sur la mobilisation des recettes locales dans les provinces ainsi que sur la chaîne de la dépense des recettes provinciales. Autour du président de la République, Joseph Kabila Kabange ; du 1ER Ministre, Bruno Tshibala Nzenzhe ; du vice-1ER Ministre en charge de l’Intérieur, Emmanuel Ramazani Shadari ; et du ministre des Finances, Henri Yav Mulang (invité), les gouverneurs se sont employés à faire un état des lieux de leurs provinces respectives.
Le constat qui s’en est dégagé, est, à tout point de vue amer. Sur le thème principal de la conférence, seuls quatre provinces sur les vingt-six (Lualaba, Haut-Katanga, Kinshasa et Kongo-Central) sont à même de mobiliser des recettes propres pour soutenir les activités de développement. La situation est si inquiétante dans les nouvelles provinces issues du découpage territorial de 2015 que le ministre de l’Intérieur a émis le vœu de voir le gouvernement organiser une « réunion spéciale » pour « statuer sur les résolutions » de la conférence de Goma.
Il faut rappeler que la conférence des gouverneurs de province tire son cadre théorique (juridique) de la constitution du 18 février 2006. Instituée (article 200), la conférence des gouverneurs a pour mission d’« émettre des avis et de formuler des suggestions sur la politique à mener et sur la législation à édicter par la République ». La conférence des gouverneurs de province est composée, outre les gouverneurs de province, du président de la République, du 1ER Ministre et du ministre de l’Intérieur. Tout autre membre du gouvernement peut y être invité.
Présidée par le président de la République, la conférence des gouverneurs se réunit au moins deux fois par an sur convocation de son président – ce qui n’est pas le cas depuis son institution – et se tient à tour de rôle dans chaque province. La conférence des gouverneurs s’inscrit donc dans le processus de décentralisation administrative du pays, qui a pour finalité, d’une part, de « consolider l’unité nationale mise à mal par des guerres successives » et, d’autre part, de « créer des centres d’impulsion et de développement à la base ».
Ainsi, la constitution consacre l’existence des vingt-cinq provinces plus la ville-capitale de Kinshasa, dotées de la personnalité juridique et exerçant des compétences de proximité. Par exemple, les provinces et les entités territoriales décentralisées (ETD) jouissent de la libre administration et de l’autonomie de gestion de leurs ressources économiques, humaines, financières et techniques (article 3).
En sus des compétences de proximité, les provinces en exercent d’autres concurremment avec le pouvoir central et se partagent les recettes nationales avec ce dernier. La part des recettes à caractère national allouées aux provinces est établie à 40 %, retenue à la source (article 175). La loi fixe la nomenclature des autres recettes locales et la modalité de leur répartition. C’est ainsi que le devoir de solidarité et d’équilibre entre les provinces a conduit à l’institution de la Caisse nationale de péréquation placée sous la tutelle du gouvernement. En réalité, cette caisse n’a jamais fonctionné. Par ailleurs, deux ou plusieurs provinces peuvent, d’un commun accord, créer un cadre d’harmonisation et de coordination de leurs politiques respectives et gérer en commun certains services dont les attributions portent sur les matières relevant de leurs compétences (article 199). En cas de conflit de compétence entre le pouvoir central et les provinces, la Cour constitutionnelle est la seule autorité habilitée à les départager. C’est justement pour assurer une bonne harmonie entre les provinces, elles-mêmes, d’une part, et le pouvoir central, d’autre part, que la conférence des gouverneurs a été instituée avec pour rôle de servir de « conseil » aux deux échelons de l’État.