L’Agenda 5 % consiste à passer du taux actuel de 1,5 % des actifs sous gestion à une part significative de 5 %. Les 16 grands projets du continent ciblent les secteurs clés de l’énergie, des transports, de l’eau et des technologies de l’information et de la communication. Cependant, sur les 16 projets, deux seulement ciblent la République démocratique du Congo.
Le premier concerne les transports, c’est-à-dire la construction d’un pont route-rail sur le fleuve Congo entre Brazzaville-Kinshasa, la connexion au chemin de fer Kinshasa-Ilebo et la construction d’une route, d’un pont de chemin de fer combiné et d’un poste d’arrêt unique à la frontière dont la ligne ferroviaire sera connectée à la ligne Lubumbashi-Ilebo. Ce projet qui vise la liaison ferroviaire entre l’Afrique centrale et l’Afrique du Sud à partir de la RDC, est évalué à 1,65 milliard de dollars.
Les gouvernements de la République du Congo et de la RDC sont censés mettre la main à la poche. Selon la Communauté économique des États de l’Afrique centrale (CEEAC), il faut plus de 400 millions de dollars pour la réalisation du pont route-rail et la construction du poste frontalier unique. La Banque africaine de développement (BAD) devrait apporter plus de 250 millions de dollars au projet alors que les deux gouvernements s’apprêtaient à mobiliser environ 110 millions. Les 40 millions restants devraient provenir d’autres bailleurs selon l’approche partenariat public-privé.
Brazzaville ménage sa monture
Le pont route-rail devrait être jeté en aval de Kinshasa, à environ 30 km. La construction de cet ouvrage ne fait pas l’unanimité en RDC. Des notables Ne Kongo redoutent qu’il ne signe l’arrêt de mort des ports de Boma et de Matadi, qui constitue la principale plateforme de l’économie de la province du Kongo-Central. À Brazzaville le projet « Nouvelle espérance » a déjà pris corps. Brazzaville a, en effet, obtenu de l’Union européenne, une convention visant à réhabiliter le port autonome de la capitale, avec un financement de plus de 38 millions d’euros. Et les autorités de Brazzaville ont également décidé que le futur pont s’ouvre sur un port sec de 1 000 à 2 000 ha, destiné à stocker des marchandises, qui sera construit à l’intersection de la RN 1(Route nationale n°1) et du chemin de fer Congo Océan. Brazzaville se met, avec notamment l’appui des industriels miniers et forestiers, à construire la route dite « Route lourde Pointe-Noire-Brazzaville » – en fait la future RN1 – pour un coût initial de 172,450 milliards de FCFA. Pendant que le chemin de fer Matadi-Kinshasa (385 km) meurt de dégradation, et toute tentative de sa reprise en main par un opérateur privé déraille, le chemin de fer Congo-Océan, 511 km, n’a pas non plus trouvé repreneur répondant aux conditions de l’État. Mais loin de le laisser à l’abandon, le gouvernement de la République du Congo a injecté, en 2007, 61 millions d’euros dans le CFCO pour sa réhabilitation et son équipement.
Les effets escomptés sont là. Le chemin de fer Congo Océan mise sur un trafic de marchandises hors minerais de 1 100 000 tonnes et 600 000 voyageurs.
Débaptisé depuis 2008 « Congo Terminal », le terminal à conteneurs du port de Pointe-Noire a en effet été concédé à un consortium formé par Bolloré Africa Logistics, Socotrans, Samariti et Translo qui ont injecté des investissements échelonnés d’environ 570 millions d’euros. Depuis 5 ans, le terminal traite en moyenne 460 000 conteneurs. Alors qu’il est déjà le port le plus profond de la région, le PAPN développe parallèlement des activités de feedering, c’est-à-dire de transbordement des marchandises entre les grands navires de ligne et des bateaux de plus petite taille, puis d’acheminement vers des ports moins profonds et moins bien équipés, que les armateurs ne desservent pas en ligne directe dont Matadi.
Le Congo tient à renforcer sa vocation de transit de l’océan vers l’hinterland, redevenir la voie de transit privilégiée entre ses voisins enclavés d’Afrique centrale et le golfe de Guinée… Mais pour mériter son titre de pays de transit, il reste au Congo à réaliser une connexion digne de ce nom avec le grand voisin qu’est la RDC…
Le second projet porte sur le barrage hydroélectrique de Ruzizi III d’une capacité de 147 MW, dans le cadre du Programme de développement des infrastructures en Afrique (PIDA) qui implique aussi le Burundi et le Rwanda. Avec ces deux pays, la RDC forme la Communauté économique des pays des grands lacs (CEPGL), une structure régionale de coopération. L’électricité de Ruzizi III alimentera également l’East African Power Pool (EAPP), un projet d’interconnexion électrique rassemblant une dizaine de pays membres du Marché commun de l’Afrique de l’Est et australe (COMESA). La 30è Assemblée de l’énergie des Grands lacs, en juin 2017, a recommandé l’accélération du processus préparatoire du projet de construction de la centrale de Ruzizi III. Les travaux devraient commencer en 2016 après grâce à un financement de la Banque africaine de développement (BAD) de 138 millions de dollars annoncé en décembre 2015.
L’énergie, les transports, l’eau et les technologies de l’information et de la communication sont les quatre secteurs prioritaires répartis en 51 projets identifiés par le PIDA adoptés en janvier 2012 par les chefs d’État et de gouvernement de l’Union africaine. Le NEPAD entend promouvoir ces projets rentables et viables pour persuader les investisseurs institutionnels d’être parties prenantes dans la mise en œuvre de la feuille de route de l’Agenda 5 %. Pour le NEPAD, « les fonds souverains ont émergé comme une source de financement potentiellement idéale pour combler le déficit du secteur des infrastructures en Afrique, estimé à 68 milliards de dollars ».