Échanger avec les journalistes en vue de les informer sur les tenants et les aboutissants de la création de la Caisse nationale de sécurité sociale des agents publics de l’État (CNSSAP) a été un exercice auquel s’est livré avec brio son chargé de mission, Tombola Muke. Selon lui, la CNSSAP a été créée pour « répondre à une nouvelle problématique ». Avant décembre 2015, a-t-il expliqué, la retraite était directement gérée par le Trésor public. Il y avait au ministère du Budget toute une division qui s’occupait en quelque sorte de cette sécurité sociale spécialisée. Le Trésor public n’était pas suffisamment outillé pour maîtriser les bénéficiaires, retraités et ayant-droits. On était donc dans le régime dit « régime octroyé ».
Étant donné que le financement de la sécurité sociale coûte cher et dans le cadre de la réforme et la modernisation de l’administration publique, il a donc fallu changer de paradigme. C’est dans ce contexte que la CNSSAP a été créée le 14 décembre 2015 par le décret 15/031 comme un établissement public placé sous la tutelle du ministère de la Fonction publique. C’est « une caisse de retraite contributive » parce qu’elle génère non seulement des économies mais aussi des bénéfices pour « une pension décente » et une reconversion facile de la retraite.
Les prestations de la caisse
Dans son exposé de présentation, le chargé de mission a souligné que la CNSSAP a pour objet d’organiser et de gérer les prestations de sécurité sociale des agents publics de l’État. À ce titre, ses activités couvrent deux branches : la branche des pensions et la branche des risques professionnels. La branche des pensions est déjà opérationnelle. Elle concerne les prestations de vieillesse, de survivants et d’invalidité, tandis que la branche des risques professionnels incluse les prestations en cas d’accident du travail et de maladie professionnelle.
Concrètement, la CNSSAP qui a effectivement été lancée en 2017, a pour principales missions d’offrir aux agents publics de l’État et à leurs familles des prestations de sécurité sociale sur la base des cotisations recouvrées auprès de ces derniers et de l’État-employeur. Mais aussi de contribuer, à terme, au développement socio-économique du pays. Pour son opérationnalisation, la CNSSAP a bénéficié de l’appui du Projet de réforme et de rajeunissement de l’administration publique (PRRAP). En 2017, la CNSSAP a mené quelques activités, notamment l’attribution des cartes de sécurité sociale au terme d’un processus d’immatriculation des agents nouvellement à la retraite, le recouvrement des cotisations des agents et de celles de l’État-employeur et le versement des premières prestations aux éligibles des ministères pilotes du PRRAP qui seront à la retraite.
Selon Tombola Muke, l’immatriculation est « l’acte par lequel une personne assujettie obligatoirement au régime se trouve officiellement inscrite par la CNSSAP sur la liste des assurés sociaux ». Il s’agit d’une étape clé qui permet d’établir des « dossiers fiables et précis » sur la base desquels les droits sont évalués, liquidés et payés. Quant au financement des prestations de la branche des pensions, le taux de cotisation est fixé à 9 %, à raison de 6 % à charge de l’État-employeur et 3 % à charge de l’agent. Le salaire assurable ou l’assiette de cotisations est le traitement de base. Quelque 300 retraités ont déjà touché leur pension à la CNSSAP en janvier, 600 autres pourront l’être en février avec effet rétro.
Population cible en 2017
La population couverte actuellement est d’environ 166 016 agents publics sur plus d’un million d’agents encore actifs. Seuls les agents de carrière des services publics de l’État cotisent à partir d’octobre 2017 et donc sont assujettis au régime de sécurité sociale de la CNSSAP, conformément à la loi n°16/013 du 15 juillet 2016 en son article 121 et au décret n°15/031 du 14 décembre 2016 en son article 4. Les autres catégories (armée, police, enseignement supérieur, magistrature, etc.) seront intégrées dès que leurs statuts spécifiques le permettront ou à l’adoption d’une loi spécifique sur la sécurité sociale des agents publics.
Pour 2017, il a été envisagé de lancer les prestations liées à la branche des pensions (pension de retraite, pension d’inaptitude, rentes de survie) en faveur de tous les nouveaux départs à la retraite dans les ministères pilotes du PRRAP. Il a été aussi envisagé des prestations en cas d’accidents du travail et de maladie professionnelle (branche des risques professionnels) seront plus tard, au terme d’une étude actuarielle devant déterminer le taux de cotisation requis pour financer cette branche.
La formule utilisée pour le calcul de la pension de vieillesse est celle des annuités liquidables avec un taux d’annuité liquidable fixé à 1,33 %, soit un taux de remplacement de 45,55 % du salaire de base pour une carrière pleine de 35 ans. Le stock actuel des retraités continuera d’être géré par le secrétariat général des retraités et rentiers et la Direction de la paie. Un plan d’intégration progressive de ces derniers dans le système de la CNSSAP est en discussion avec le secrétariat général des retraités et rentiers et soumis aux autorités. En 2017, la CNSSAP s’est concentrée principalement sur les nouveaux départs à la retraite.
Quant aux modalités pratiques de retenues sur les rémunérations, les cotisations sont retenues sur les traitements de base (uniquement sur les salaires de base) des agents de carrière des services publics de l’État. Les cotisations sont mensuelles et obligatoires pour tous ces agents, conformément à la note circulaire interministérielle n°002/CAB/ME/MIN.BUDGET/2017, n°008/CAB/ME/MIN.FP/2017 et n°CAB/MIN.FINANCES/2017/001 du 11 juillet 2017. Les cotisations sont retenues à la source et versées au compte de la CNSSAP pour financer les prestations sociales qu’elle gère.
Le système contributif a ceci d’avantage que « les cotisations ne sont pas un impôt mais une assurance et une garantie d’un revenu de remplacement décent au moment de la retraite ». L’agent public contribue lui-même pour assurer sa retraite et une rente de survie à ses ayant droits. D’après Tombola Muke, si l’État cotise le double du taux de cotisation de l’agent public, c’est le seul souci de lui offrir une « retraite digne ». La retenue des cotisations aussi bien pour les agents de carrière des services publics de l’État que pour l’État-employeur ont commencé en octobre 2017.