L’entrepreneuriat féminin : défis et perspectives

L’impact positif de l’entrepreneuriat des femmes sur la réduction de la pauvreté des ménages, l’amélioration de leur pouvoir et leur leadership ne sont plus à démontrer. Et le FPI n’est pas à sa première expérience dans le financement de leurs activités économiques.

 

Au cours de la première session de l’atelier sur la thématique de « l’entrepreneuriat féminin : défis et perspectives », le Fonds de promotion de l’industrie (FPI) a été à l’écoute des femmes entrepreneures et de celles qui veulent investir dans les filières financées par cette institution. Depuis 2008, selon le monitoring, le FPI a déjà financé 52 projets portés par des femmes. Près de 33 % de ces projets sont effectifs et 2 % sont en cours de réalisation. Par rapport aux hommes, les femmes sont plus respectueuses de leurs engagements en dépit de difficultés rencontrées dans la mise en œuvre de leurs projets.

C’est pourquoi, il y a nécessité d’un programme particulier d’encadrement pour les rendre performantes dans la création de conditions propices à l’entrepreneuriat afin de stimuler le démarrage et la modernisation de leurs entreprises. Plusieurs composantes font partie de ce programme de soutien : l’adhésion à des réseaux d’associations soutenant les mécanismes de renforcement du capital social entre femmes entrepreneures, le programme de mentorat ou de coaching, le développement des services financiers spécifiques, l’octroi des crédits d’investissement aux populations rurales…

À l’ouverture de l’atelier, le directeur général du FPI, Patrice Kitebi, a présenté la vision managériale et les principales réformes engagées depuis la désignation du nouveau management. Tout en rappelant la mission principale du FPI qui est « le financement de l’essor industriel tourné vers la satisfaction des besoins locaux et la réduction de la dépendance vis-à-vis de l’extérieur ». 

Les deux sessions de l’atelier

Au cours de la première session, la professeur Thérèse Kenge Ngomba Tshilombay, doyenne de la faculté de droit de l’Université de Kinshasa, ainsi que Mbuyi Bilonda, ingénieure agronome, fonctionnaire au ministère de l’Environnement, et vice-présidente de l’Association des ingénieurs agronomes de la RDC, ont donné des communications sur « la situation de la femme en République démocratique du Congo ». Elles ont mis en exergue la place de la femme dans la société. On retiendra utilement que la femme congolaise est une « femme active », à la campagne comme en ville, que ça soit dans le cadre de l’économie formelle ou informelle. Cependant, la femme est assimilée aux groupes vulnérables et généralement exclue de la sphère de prise de décisions aussi bien au niveau familial que communautaire. Les jeunes filles accèdent moins facilement à l’enseignement et les femmes souffrent le plus souvent d’analphabétisme par rapport aux hommes.

Un film documentaire « Debout Congolaises » est venu en appui à cette présentation. À travers ce documentaire, le FPI est allé à la rencontre de ces femmes entrepreneures qui n’ont pas bénéficié de financement externe et qui ont réussi pourtant à développer leurs entreprises. Entre les problèmes d’énergie, de sécurité, de financement…, elles racontent leurs parcours semés d’embûches dans le monde de l’entrepreneuriat, leurs situations actuelles ainsi que leurs aspirations.  

Les travaux de la première session se sont déroulés en panels. Dans le panel 1 (l’entrepreneuriat en RDC), les questions suivantes ont été évoquées : Pourquoi toutes les femmes ne sont pas logées à la même enseigne ? Est-ce le fait du choix du secteur, de la localisation géographique ? Pourquoi y a-t-il plus de femmes dans certains secteurs et moins sinon pas dans d’autres ? Quelques exemples de succès ont été épinglés et les raisons de l’échec analysés en vue de les éviter le cas échéant.

Dans le panel 2, les échanges ont porté sur l’accès à l’information, à la formation, aux nouvelles technologies et aux marchés. Il y a été plus question de l’apport des réseaux, des besoins en formations et de l’importance de l’organisation des fonctions supports de l’entreprise (comptabilité, juridique, etc.). Dans le panel 3 (Femmes entrepreneures-acteurs clés dans le développement de l’agro-industrie en RDC), le débat a tourné sur les challenges, les opportunités et les mesures d’atténuation des risques liées à l’éclosion du secteur de l’agro-industrie pour les femmes entrepreneures. Et enfin dans le panel 4, l’analyse a porté sur les solutions à la facilitation de l’accès au financement des femmes entrepreneures.

La seconde session de l’atelier a été consacrée à l’accompagnement de l’émergence de l’entrepreneuriat des jeunes. Les participants ont suivi la communication du responsable du développement et de la formation à l’EMRC, François Kacen, qui a présenté l’étude de faisabilité technique et financière pour la mise en place des incubateurs de PME. Structure d’appui à la création d’entreprises, les incubateurs jouent un rôle essentiel dans la maturation d’un projet. Présents à la fois en amont de la création et au cours de la vie de l’entreprise, ils mettent à la disposition des porteurs de projet une multitude de services permettant de se lancer dans les meilleures conditions. Vu sous cet angle, l’incubateur est un outil d’excellence pour l’accompagnement des jeunes PME.

Quant à lui, le directeur général de l’Integral Group Limited (une firme israélienne spécialisée dans la fourniture des solutions clé en main aux clients privés et publics en Afrique dans les domaines de l’agriculture, de l’eau, du génie civil et des mines), Mme Tali Miller, a parlé de centres d’excellence en pisciculture, qui sont des incubateurs spécialisés. Ce sont en fait des lieux de formation adaptés à l’élevage des poissons (sexage, grossissement et commercialisation). La RDC possède un grand potentiel hydrographique et halieutique estimé à 700 000 tonnes par an. Malgré ce potentiel, la production est faible, environ 250 000 tonnes par an. Le pays importe environ 150 000 tonnes par an, soit 48,5 % de l’ensemble des importations. Pour revaloriser le secteur piscicole, le FPI propose le recours à l’élevage par le renforcement des capacités des techniciens. Deux villes pilotes ont été identifiées : Kinshasa et Lubumbashi pour appliquer cette stratégie.

Après les deux communications de ces experts, invités de l’atelier, une table ronde a été organisée autour de l’assistance technique et financière, les filières à développer, le modèle de gouvernance des incubateurs et du centre d’excellence. Le but a été de permettre aux parties prenantes d’exprimer leurs centres d’intérêt et de discuter directement avec le management du FPI sur les modalités de leur mise en œuvre.

La stratégie du FPI en faveur des jeunes entrepreneurs repose essentiellement sur la création de centres d’incubation des PME en vue de favoriser les emplois par la formation et l’encadrement des PME gérées par des jeunes. Elle découle aussi des recommandations de la table ronde des PME organisée par la Fédération des entreprises du Congo (FEC) en 2017 pour la mise en place des stratégies visant l’accompagnement et la promotion de la PME vue comme un des moteurs de l’émergence de l’économie nationale.

Cette table ronde s’est prononcée en faveur de l’appui au FPI et à la SOFIDE dans la négociation des lignes de crédits extérieurs pour le financement des PME ; l’installation des incubateurs de start-up pour l’accompagnement et l’encadrement, d’un système de mentorat pour la promotion des jeunes entrepreneurs et d’un programme national pour la promotion de l’entrepreneuriat féminin et celui des jeunes.

En 2016, à travers le Prix de l’innovation du chef de l’État initié par le ministère de l’Industrie, le FPI a récompensé 20 idées innovantes dans plusieurs domaines. Ces entrepreneurs ont bénéficié de subventions pour développer leurs entreprises, mais le suivi de l’évolution de ces projets n’a pas été optimal. Les start-up tenues par les jeunes n’ont pas de garanties et ne sont pas structurées comme les grandes entreprises. D’où l’idée de les assister. Pour cela, il a fallu mener une étude de faisabilité. Dans le programme d’actions 2018-2020 du FPI, la mise en place d’incubateurs se chiffre à 13,2 millions de dollars.