Cihangir Cilingir, manager général de Katmerciler, s’est entretenu à ce propos avec Marcel Ilunga, ministre de l’Industrie, début juillet. Cihangir, qui a conduit la délégation de cette entreprise auprès du ministre de l’Industrie, a précisé que celle-ci est venue présenter un projet et ses différents produits au gouvernement congolais. Il a laissé entendre que sa société compte produire les pièces des véhicules dans ses installations de la Turquie, avant de les amener en RDC pour le réassemblage et le montage dans les ateliers au pays. De son côté, le ministre de l’Industrie a rassuré la délégation de son soutien et de son accompagnement dans la facilitation pour l’obtention des documents administratifs en vue de la concrétisation de ce projet qui s’inscrit dans le cadre du transfert de technologie et de compétences.
Quelques jours avant l’arrivée de la délégation turque à Kinshasa, la firme allemande Volkswagen (VW) signait un protocole d’accord avec l’agence nationale, Rwanda Development Board (RDB) pour le montage d’une usine d’assemblage de VW à Kigali. VW dispose déjà d’une unité du genre à Thika, près de Nairobi, au Kenya. Le constructeur allemand avait précédemment ouvert des usines d’assemblage au Nigeria, en Afrique du Sud et en Algérie. La RDC, apprend-on, disposait déjà des unités de montage de bus du temps de la colonisation. L’on parle particulièrement du Gyrobus, ce long véhicule de transport en commun utilisant l’électricité. Les Gyrobus ne suivaient pas une ligne électrique placée au-dessus du véhicule, mais des perches électriques alimentaient un moteur couplé à un volant de stockage d’énergie et permettaient une autonomie de 6 à 10 km selon le terrain. Aujourd’hui, il n’existe plus de ligne de Gyrobus en activité. Léopoldville, actuellement Kinshasa, a pourtant été la deuxième ville au monde à exploiter un système de Gyrobus, après la Suisse où le système a été mis en service pour la première fois, entre Yverdon et Grandson, en 1953.
Les Gyrobus de Léopoldville ont, en effet, été montés sur place. Ils mesuraient 10,4 m de longueur, pesaient 10,9 tonnes et transportaient jusqu’à 90 passagers à une vitesse maximale de 60 km/h. Une douzaine de véhicules du genre avaient été montés et exploitaient quatre lignes et les installations de recharges étaient situées toutes les deux kilomètres. Le Gyrobus sera abandonné peu après l’indépendance, en raison d’une usure excessive du volant d’inertie causée par l’utilisation régulière des raccourcis empruntant des voies de circulations non goudronnées.
« Cobalt contre bus Renault »
Plus d’une décennie après, la société britannique Leyland a installé une unité de vente et de montage de gros véhicules, des tracteurs et autres engins de génie civil, à Kingabwa, sur l’avenue des Poids Lourds. Dans le faubourg est de Kinshasa, l’actuel district de Tshangu, dans la municipalité de Masina, non loin du boulevard Lumumba, la firme américaine General Motors produira également des véhicules lourds et des camionnettes Pick-Up de transport ainsi que des voitures de tourisme de marque Chevrolet. Il appert que la succursale kinoise de General Motors était dans le viseur de l’homme d’affaires rwandais, feu Médard Gahiga, jadis proche du Front Patriotique Rwandais (FPR).
Mais les pillages que connurent Kinshasa en 1991 et en 1993 annihilèrent le projet d’investissements de Gahiga. (…) Au début des années 1980, au lendemain de l’intervention des troupes françaises à Kolwezi, les principales sociétés françaises de construction auto, à savoir Renault et Peugeot, vont aussi monter des voitures de tourisme et des camionnettes Pick-Up à Kinshasa, dans leurs usines installées à Ndolo et à Limete, dans le quartier industriel. Des sociétés de transports en commun naîtront de la « coopération fraternelle » Mobutu-Giscard d’Estaing, OTCZ et STK ainsi que la société franco-zaïroise SOTRAZ, sur base d’un échange : cobalt contre bus Renault. Quarante ans plus tard, le cobalt de la RDC se retrouve derechef au cœur du marché d’auto mais cette fois à l’échelle mondiale avec des enjeux pas seulement économiques.
Autre entreprise, l’allemande DIFCO plus tard débaptisée Azda qui montait des voitures de tourisme de marque VW également à Ndolo, en face du grand magasin des Israéliens Léon Hasson et Frères. Azda disposera d’une deuxième unité de montage sur l’avenue du Haut-Commandement, actuellement Avenue des Forces armées, dans la commune de la Gombe.Quelques entrepreneurs congolais (zaïrois à l’époque) ont aussi tenté leur chance dans le secteur des montages, disons de recyclage des automobiles du fait de la demande sans cesse galopante en moyens de locomotion dans la mégapole kinoise. Aujourd’hui encore, dans certaines municipalités populaires comme Ndjili, Limete-Mombele, Yolo, on retrouve ces ateliers qui rachètent carcasse par ici, moteur par là, accessoires, etc., montent des véhicules qui donnent à tout point de vue l’air d’une occase qui a encore longue vie. Par le passé, l’on a noté, entre autres, la mémorable société de transport en commun Auto Service Zaïre de feu André Mutambayi, le « MB » et d’autres petites initiatives qui n’ont guère survécu à leurs initiateurs. De tous, c’est Augustin Dokolo Sanu qui s’est distingué avec une technicité… à l’occidentale. Sa société Elve Zaïre est, en effet, le premier concessionnaire de la marque coréenne Hyundai dans le pays. Mais en plus de l’importation, de la vente et du service après-vente des voitures et bus de cette marque, Elve Zaïre qui était aussi une entreprise de construction.
Autre firme de Dokolo, Districar. Une société privée à responsabilité limitée, qui gérait la première concession de la firme japonaise Mazda en RDC alors Zaïre. Elle avait donc pour objet principal l’importation, la vente et le service après-vente des voitures et bus de marque Mazda. Les voitures Mazda, modèles 323, 626 et 929 étaient devenues populaires à Kinshasa grâce à cette société qui était le fournisseur de plusieurs autres concessionnaires à Kinshasa et à travers le pays. Jusqu’au début des années 1990, la musique populaire était d’ailleurs ponctuée des tubes célébrant des véhicules, made in Zaïre… à quelques exceptions près.