C’EST HENRI Yalowando, chercheur en agronomie, qui l’a dit lors du Week-end de l’entrepreneuriat organisé, mi-avril, par le journal Business & Finances en partenariat avec l’agence Joy Services. Pour l’expert, une ferme de 5 ha peut produire au moins, à partir de 4 ans, 50 tonnes de régimes de palme. Mais face aux problèmes financiers et de gérance en Afrique, Henri Yalowando propose à quiconque veut investir dans l’industrie des huiles de s’appliquer plutôt dans les mini-huileries.
D’après lui, la voie à suivre, c’est de développer la production agroindustrielle de l’huile de palme et de ses dérivés en utilisant une ligne technologique simple et logique, basée sur un équipement de petite taille, fiable, simple, robuste et permettant un montage facile et rapide avec la main-d’œuvre locale non savante taille et qui exige un faible investissement.
« Nous pouvons citer, dit-il, l’exemple de la Côte d’Ivoire qui est aujourd’hui premier producteur mondial de cacao avec une superficie totale plantée de 2 300 000 ha, constitués toutes de petites exploitations du type familial avec des tailles moyennes comprises entre 3 ha et 5 ha ».
Production en déclin
En République démocratique du Congo, l’intérêt économique du palmier à huile s’est manifesté depuis le 15è siècle avec la découverte du continent par les explorateurs portugais qui comparaient le palmier à huile à l’olivier produisant l’huile d’olive. D’où l’appellation de « Elaeis guineensis ». Mais ce n’est qu’au 20è siècle qu’a commencé l’exploitation industrielle du palmier au Congo belge et dans d’autres pays de l’Afrique sub-saharienne et de l’Asie du Sud-Est, extension des plantations industrielles et des fermes villageoises avec les nouvelles variétés du palmier l issues des croisements assistés entrepris à l’INEAC Yangambi.
La production des huiles de palme et de palmiste au Congo-belge s’accrut au point que le pays en devient à partir de 1959 le premier producteur et ce, jusqu’aux années 1980. Mais à partir des années 1990, des troubles politiques suivis de pillages ont détruit le tissu économique existant et rendant impossible le renouvellement des usines et des plantations. La situation se dégrade de jour en jour si bien qu’aujourd’hui la RDC est devenue aujourd’hui importatrice à 70 % des huiles de palme.
Sur un champ de 84 ha de palmeraies, avec un investissement de moins de 150 000 dollars pour l’achat, entre autres, de la mini-huilerie de palme type Palmito (capacité: 350 kg de régimes par heure, soit 756 tonnes/an) ou encore une mini-usine de production d’huile d’amandes palmistes type Mini-Jatrex (capacité : 80 kg de palmiste par jour, soit 172 tonnes/an), l’on peut réaliser des bénéfices nets d’environ 50 000 dollars à la première production, fait savoir l’ingénieur Yalowando. Mais où trouver 150 000 dollars?, s’est-on interrogé dans l’assistance composée notamment des jeunes entrepreneurs. Les banques ne prêtent qu’à la tête du client.
Crédits agricoles, l’État dilapide…
Alors que l’État peine à relancer la Banque des crédits agricoles (BCA) qu’il a pourtant reprise en janvier 2016 dans les 28 mesures urgentes, des banques commerciales prêtent et gagnent dans le secteur agricole. Equity Bank dit disposer d’un encours crédits de 250 millions de dollars qu’elle a mis à la disposition des entreprises notamment des PME et micro-entreprises du secteur agricole. Pour ce faire, la banque a notamment déployé ses agents focaux dans l’arrière-pays, selon Djedje Kungula Makoso, responsable de l’Unité agrobusiness à Equity Bank. Le secteur agricole emploierait jusqu’à 60 % de la population en RDC. Equity Bank a levé l’option d’accorder non seulement des facilités de financement aux entreprises agricoles mais aussi des orientations à tout entrepreneur du secteur en fonction notamment de la taille de son entreprise. Ainsi, dans l’Est, par exemple, à Kalehe et Bukavu, des micros-entreprises qui se sont organisées en coopératives, ont dû bénéficier chacune des prêts de 50 à 100 dollars alors que le plafond fixé par la banque est de 2 000 dollars.
À Tshela, dans le Kongo-Central, la banque qui se veut un partenaire financier toujours à l’écoute de ses clients, a notamment financé la relance des cultures du café et du cacao, grâce notamment à l’accompagnement des organisations non gouvernementales. À ce jour, foi de Kungula, le caféiculteur qui n’arrivait pas à remplir la moitié d’un conteneur de sacs de café, réalise une production de 5 conteneurs !
Pour sa part, Afriland First Bank soutient avoir investi 10,4 millions de dollars dans le domaine agricole en RDC. Selon Patrick Kafindo, son directeur général adjoint, Afriland First Bank a la ferme volonté d’accompagner l’État dans l’implantation des projets visant à lutter contre la pauvreté en milieu rural. « Notre expérience dans le financement du secteur agricole et l’élargissement de notre réseau d’agences dans les provinces à vocation agricole démontre à suffisance notre intérêt d’intégrer les zones rurales dans le processus du développement », souligne-t-il. Avec son portefeuille des crédits destinés au secteur agricole, Afriland First Bank, a offert un prêt à 246 exploitants agricoles. Des emprunts à rembourser après une période de 3 ans au taux de 12 % l’an. À ce jour, les provinces bénéficiaires des crédits agricoles sont le Lualaba, le Tanganyika, le Haut-Lomami et le Sud-Ubangi. Advans Bank offre également des crédits agricoles d’une durée de 3 à 24 mois, le montant de ces crédits varie de 500 à 14 999 dollars. En matière des crédits agricoles, l’État s’est plutôt illustré ces dernières années par des gâchis : achetés à grand frais, des tracteurs ont été distribués à des non-exploitants agricoles, bien souvent des députés et ministres. Un tracteur estampillé « don du gouvernement à la population de Bandundu » est cependant resté à Kinshasa et acheminé sur les hauteurs de Binza, où il a plutôt servi à débrayer le terrain de la résidence d’un député puis ministre.
Mi-2018, la RDC a reçu de ses partenaires un prêt de 80 millions de dollars en vue de relancer l’agriculture. Officiellement, l’État compte créer un Fonds de 120 millions pour financer le secteur agricole, avec l’appui des banques commerciales. Mais cette demande n’a nullement été formulée auprès des banques commerciales dont Equity que Business & Finances a contactée