DANS certains milieux d’affaires à Kinshasa, on a réagi « très positivement » au propos « mesuré et responsable » de Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, le président de la République, lors de la cérémonie d’ouverture de Sultani Makutano 5, sur les « tracasseries de tous ordres » dont les entreprises sont la cible par les agents des services publics. On pense qu’il fait suite à la correspondance (DJSF/LYK/BL/F.0768/2019), sous forme de plainte ou dénonciation, de la Fédération des entreprises du Congo (FEC) adressée à Vital Kamerhe Lwa Kanyiginyi Nkingi, son directeur de cabinet, en date du 21 août 2019, concernant « Mission de contrôle diligentée par l’IGF auprès de nos membres (les sociétés Bralima, Bracongo, Comexas, Central Motors et Socir) ».
Dans cette correspondance, Kimoni Bononge, l’administrateur-délégué, fait remarquer ceci : « Le contrôle diligenté auprès de nos membres par l’IGF et qui couvre l’ensemble de perceptions tant celles encadrées par le pouvoir central que celles des provinces relève non simplement de la pratique contralegem mais aussi soulève le problème de gouvernance administrative préjudiciable au climat des affaires. Ainsi, nous vous saurions gré, en qualité de l’autorité de qui dépend cette inspection, de bien vouloir recadrer ses interventions et les conformer aux textes… »
La FEC a précisé sa pensée dans un communiqué, le 4 septembre : « Conformément à ses statuts, en qualité de chambre de commerce et syndicat patronal, elle a pour mission de promouvoir les activités économiques et de défendre les intérêts de ses membres, en conformité avec les lois et règlements du pays, et ce, en harmonie avec le bien commun. C’est dans ce contexte qu’elle a eu à dénoncer, à maintes reprises, les missions de contrôle diligentées par les services étatiques entachées d’irrégularités, notamment les missions initiées par l’Inspection générale auprès du secteur privé. »
La FEC se réjouit donc de la réaction du directeur de cabinet du chef de l’État, à travers sa lettre n°1965/09/2019 du 2 septembre « qui, répondant sans atermoiements, enjoint l’inspecteur général des finances d’arrêter lesdites missions pour irrégularité ». D’après certains chefs d’entreprise, cela donne lieu à une « mise en garde », voire à un « rappel à l’ordre ». Car ils estiment que le « dérapage » des agents publics, notamment dans le cas de l’IGF, « est allé très loin ». Ajoutant que « cela arrive souvent », malheureusement. Il était donc temps que le président de la République « remonte les bretelles » aux agents de l’État, « tous sans distinction ! », et « mette fin » à l’inflexion pour que les uns et les autres se mettent au travail (lire aussi l’intéressante enquête de Business et Finances parue dans l’édition n°149, octobre 2017, et reprise dans cette édition).
Annonces importantes
Et pour un climat des affaires véritablement assaini, le chef de l’État a donné des orientations nouvelles. D’abord, il va prendre une série de mesures pour mettre fin aux tracasseries dont se plaignent les chefs d’entreprise et les investisseurs en République démocratique du Congo. « L’entrepreneur, le créateur de richesses, doit cesser d’être perçu comme un gibier ! C’est notre premier partenaire pour le développement. Je voudrai rassurer le monde des affaires que j’ai commencé à prendre un train de mesures pour éviter les tracasseries de tous ordres dont les entreprises font l’objet de la part de certains services de l’État. Je veillerai personnellement à ce que toutes les convocations intempestives dont font l’objet les opérateurs économiques puissent cesser et que, seules, celles qui sont légales et régulières soient autorisées (…) », a déclaré Félix Antoine Tshisekedi, chaleureusement applaudi.
Le chef de l’État a également annoncé la convocation très prochaine d’une table ronde sur le climat des affaires en RDC. D’ores et déjà, il lui assigne un objectif : écouter les opérateurs économiques, prendre en compte toutes leurs doléances et surtout « mettre en place un mécanisme de suivi pour un environnement propice du climat des affaires en République démocratique du Congo ». Encore, un tonnerre d’applaudissements !
Par ailleurs, le président de la République a fait part de son intention de créer des « zones agro-industrielles » pour « diminuer l’importation des produits de base ». Il va de soi que ce projet va contribuer à améliorer les conditions de vie des populations vivant en milieux ruraux, grâce aux investissements et à la construction des infrastructures dans le secteur agricole. Extrait du discours : « Avec sa population jeune, la République démocratique du Congo comptera près de 200 millions d’habitants à l’horizon 2050 dont plus de 60 % âgés de moins de 25 ans. Il s’agit là d’un véritable levier de développement mais qui peut, si nous ne prenons pas les bonnes décisions aujourd’hui, devenir un risque majeur. Actuellement, près de 40 % de la population congolaise vit dans les villes et ce chiffre pourra dépasser les 50 % à l’horizon 2050. Il est inquiétant de voir les bras qui devaient produire dans les milieux ruraux pour un échange agriculture-industrie venir gonfler les populations urbaines pour devenir des ventres à nourrir au lieu d’être des forces productrices. Ceci explique le fait que la République démocratique du Congo, aujourd’hui, importe 90 % des produits de consommation de base. »
Voilà pourquoi, dans sa vision, le chef de l’État a pris « la ferme résolution d’inverser cette tendance en améliorant les conditions de vie dans les milieux ruraux à travers des investissements dans le secteur agricole par la création de zones agro-industrielles et la construction des infrastructures de base ».