Le plaidoyer pour le référé commercial dans les Tricoms

Avant même que le député Jean-Pierre Kayembe ne prenne l’initiative de la proposition de loi sur la réforme des Tribunaux commerce en RDC, beaucoup de voix se sont élevées pour revendiquer la procédure qui permet au demandeur, justifiant d’une diligence et des mesures provisoires nécessaires et urgentes, de saisir le juge de commerce siégeant seul.

LE FORMAT du Tribunal de commerce (TRICOM) : un juge permanent siégeant avec des assesseurs a des avantages (technicité) mais aussi des inconvénients que beaucoup de critiques, juristes et non juristes, relèvent au-delà de l’anachronisme  même de la loi 002/2001 en vigueur au pays, voilà bientôt 19 ans (le 3 juillet prochain). Dans la pratique, la procédure est jugée onéreuse. Or, soutiennent certains critiques, le déroulement du procès dans le TRICOM doit être diligent, c’est-à-dire prompt dans l’exécution, une célérité qui ne tient pas compte des règles normalement établies par la loi.

Pendant des années, on a critiqué, à tort ou à raison, l’échevinage du TRICOM et la notion de « parere », c’est-à-dire l’avis donné par un syndicat ou un organisme professionnel de commerce sur une chambre de commerce, sur l’existence et le contenu d’un usage commercial. En matière de parere, le problème se pose quand le juge a face à lui deux adversaires : l’un commerçant et l’autre non-commerçant. Dans ce cas, entre en jeu une autre notion, celle de l’exception « res inter alios acta » dont bénéficie le non-commerçant. Il appartiendra donc au juge de commerce de d’interpréter les intentions de la partie non-commerçante, pour ressortir le caractère occulte de l’exercice de la profession commerciale. C’est également le cas  pour sanctionner, dans la pratique, la commercialité frauduleuse ou l’exercice du commerce clandestin.

Vide juridique

L’article 17 de la loi 002/2001 du 3 juillet 2001 donne au juge de commerce la compétence de connaître de toutes les infractions à la législation économique et commerciale. D’après certains critiques, il se pose un réel problème de vide juridique. En effet, ce type d’infractions est quasi inexistant en droit congolais. Ce qui ne rend pas aisée la tâche du juge de commerce pour apprécier les faits avec exactitude. 

Les juristes vont remarquer que les infractions en matière de sociétés sont commises dans un cadre propre à la vie des affaires. Et que cela demande une définition appropriée des faits infractionnels dans ce domaine. En droit OHADA, par exemple, la nomenclature des sanctions portant sur les infractions en matière de sociétés commerciales est du ressort de la souveraineté nationale de chaque État-partie au Traité OHADA. 

Ces infractions portent sur la constitution : la simulation de souscription ou de versement, la publication de faux faits, la déclaration mensongère dans l’établissement du certificat de dépôt de ses souscriptions ou de versement, la surévaluation des apports. Mais aussi de la constitution irrégulière des sociétés directement ou indirectement, l’émission d’actions et la négociation de celles-ci lorsque la constitution de la société n’a a pas été réalisée ou a été mal réalisée.

Elles sont également relatives à la gérance, à l’administration et à la direction : la distribution des dividendes fictifs, la publication de faux bilan ou de l’inventaire inexact, l’abus de biens sociaux et de crédit de la société. Ou à la modification du capital : l’émission des actions avant que le certificat du dépositaire n’ait été établi, l’émission des actions avant les préalables à l’augmentation du capital sans avoir accompli les formalités régulières. etc.

Par ailleurs, la RDC ayant adhéré au Traité de l’OHADA, il y a longtemps que l’article 10 de la loi 002/2001 devait être modifié, tout comme l’article 4 de l’ordonnance 79-025 du 7 février 1979 relative à l’ouverture d’un nouveau registre de commerce (NRC). En effet, le Nouveau registre de commerce (NRC) a été remplacé par le Registre de commerce et de crédit immobilier (RCCM). Ce dernier confère la qualité de commerçant. Il contient toutes les informations classiques du NRC et institue l’inscription des sûretés mobilières dans le même document. C’est un fichier central à partir duquel toute personne, même à l’étranger, peut prendre connaissance des données de son créancier. Tous ces fichiers RCCM de l’espace sont gérés à l’OHADA. Il y a un fichier central national et un fichier régional qui est logé à la Cour commune de justice et d’arbitrage.

Les sûretés mobilières concernent le nantissement des actions et des parts sociales. Le titre de nantissement est déposé auprès du greffe de commerce avec toutes les mentions exigées par l’Acte uniforme de l’OHADA relatif au commerce général (article 44, titre III), le nantissement du fonds de commerce avec possibilité d’inscription du privilège du vendeur, le nantissement du matériel professionnel et des véhicules automobiles (affectés à l’exploitation commerciale : tracteur chariot…). 

Référé commercial

Le référé commercial est une procédure qui permet au demandeur qui justifie d’une diligence et des mesures provisoires nécessaires et urgentes, de saisir le juge de commerce siégeant en juge unique, en principe, le président du Tricom. Le déroulement du procès est diligent, c’est-à-dire avec une célérité sans tenir compte des règles normalement établies par la loi. Par exemple, un commerçant qui assigne un adversaire dont il craint le voyage imminent ou une dilapidation de son patrimoine (risque d’insolvabilité). 

Pour ses pros, le référé permet de résoudre des affaires urgentes qui ne sauraient pas attendre ou être soumises à la procédure régulière (respect du délai d’assignation et des actes de procédures). À cette procédure, s’ajoutent trois autres procédures caractéristiques des tribunaux de commerce : la procédure d’injonction de payer, la procédure d’injonction de délivrer et la procédure d’injonction de restituer. Les trois procédures sont organisées en droit OHADA. Les principes en droit OHADA portent notamment sur les procédures simplifiées. La procédure simplifiée de recouvrement de créances est une procédure très expéditive du recouvrement des petites créances. Elle consiste par le fait que le créancier dont la prétention apparaît manifestement justifiée, mais faute de titre exécutoire, saisit le juge de commerce directement sans faire assigner le débiteur et obtient du juge une ordonnance portant injonction de payer sans délai. Si celle-ci est signifiée au débiteur et, sauf contredit, elle donne un titre exécutoire comme le ferait un jugement définitif. Le gain de temps est considérable. S’il n y a pas de contredit.

Les procédures simplifiées de recouvrement des créances pour prévues par l’Acte uniforme portant organisation des procédures simplifiées de recouvrement et des voies d’exécution. L’article 1ER stipule : « Le recouvrement d’une créance certaine, liquide et exigible peut être demandé suivant la procédure d’injonction de payer ». Les créanciers dont les créances sont conditionnelles ou simplement éventuelles ne peuvent recourir à la procédure d’injonction de payer. La contestation des caractères de certitude, de liquidité et d’exigibilité de la créance est le plus souvent implicite dans les décisions de justice.

La procédure d’injonction de payer peut être introduite lorsque la créance a une cause contractuelle et que l’engagement résulte de l’émission ou l’acceptation de tout effet de commerce, ou d’un chèque dont la provision s’est révélée inexistante ou insuffisante. La cause d’une créance susceptible de procédure d’injonction ne peut être contractuelle, elle ne pourra l’être si elle est statutaire, à cause de la rareté de ce genre de créances. L’introduction du chèque en la matière est une innovation du droit OHADA.