LE BARIL de Brent de la mer du Nord pour livraison en juillet valait 34,15 dollars vendredi 29 mai, le jour de la clôture, à Londres, en baisse de 3,23 % par rapport à la clôture de jeudi. À New York, le baril américain de WTI pour la même échéance perdait de son côté 3,80 %, à 32,43 dollars. L’Agence américaine d’information sur l’Énergie (EIA) a révélé le jeudi 28 mai que les réserves de brut aux États-Unis avaient bondi de 7,9 millions de barils lors de la semaine se terminant le 22 mai, alimentées notamment par une forte hausse des importations de brut en provenance d’Arabie saoudite. Les analystes avaient pour leur part tablé sur une baisse. Cette hausse surprise « a inversé le déclin prometteur des dernières semaines et place maintenant les stocks à leur plus haut niveau depuis 2017 et à 13 % au-dessus de la moyenne des cinq dernières années », a commenté Eugen Weinberg, analyste pour Commerzbank.
Pour autant, le pétrole a clôturé en hausse le jeudi 28 mai et d’autres facteurs pourraient peser sur les prix, comme le fait que « les réactions internationales sur l’initiative de la Chine de proposer une nouvelle loi de sécurité pour Hong Kong continuent de s’intensifier, tandis qu’il y a une vingtaine de nouveaux cas Covid-19 en Corée du Sud », a souligné Bjornar Tonhaugen, analyste pour Rystad Energy. Dans un contexte de fortes tensions entre Pékin et Washington (Covid-19, Ouïghours, Taïwan…), Donald Trump, le président américain, a annoncé « ce que nous allons faire vis-à-vis de la Chine ». Selon Tonhaugen, les prix pourraient de nouveau s’effondrer si un nouveau confinement d’ampleur mondiale devait être instauré afin d’éviter une deuxième vague. Les trois premiers mois de l’année en cours ont été l’une des périodes les plus difficiles pour les 12 premières entreprises pétrolières cotées en Bourse.
Selon des données compilées par l’agence de presse Anadolu, ensemble elles ont affiché 20,6 milliards de dollars de pertes sur la période, alors que leurs profits combinés ont culminé à 23,4 milliards de dollars sur la même période un an plus tôt.
Ces sociétés sont : Exxon Mobil, Chevron, ConocoPhillips, Halliburton, Schlumberger, Baker Hughes, BP, Shell, Total, Eni, Rosneft et Equinor. Une situation qui, faut-il le rappeler, est le résultat de la contraction record de la demande liée à la pandémie de coronavirus, suivi d’une offre assez pléthorique. Au premier trimestre de 2019, le prix moyen du baril de pétrole était de 63,10 dollars. Il a chuté d’environ 50 %, un an plus tard. Ces compagnies ont, pour la plupart, suspendu leurs investissements dans de nouveaux projets. Par conséquent, de nombreux nouveaux champs ne verront pas leurs décisions finales d’investissement prises cette année. D’ailleurs, l’activité en amont en a souffert avec des producteurs qui se retrouvent en manque de liquidités pour exécuter des travaux basiques comme dans le permien aux États-Unis.
Réduction des dépenses
L’amont pétrolier africain va réduire ses dépenses d’investissement d’environ 33 % en 2020. Face au double choc de l’effondrement des prix du pétrole et de la pandémie de coronavirus, l’amont du secteur pétrolier africain devrait réduire ses dépenses d’investissement d’environ 33 % cette année. C’est ce qui ressort d’une nouvelle étude de l’analyste du marché Wood Mackenzie, publiée le mardi 26 mai.
Des réductions similaires des coûts d’exploitation sont également prévues par les producteurs pour rester neutres en termes de trésorerie. « Les majors, dont l’Afrique dépend, ont annoncé des réductions importantes des dépenses d’investissement de 20 à 30 %. Sur la base de ces informations et de notre évaluation des projets clés, nous prévoyons des réductions d’investissement de l’ordre de 33 % pour l’Afrique en amont », a commenté Gail Anderson, chef de l’équipe en charge de l’amont en Afrique chez Wood Mackenzie.
Plusieurs projets au Nigéria, au Sénégal ou encore en Angola devraient être retardés à cause de la situation. « La pandémie de coronavirus pose un problème croissant. Le secteur africain en amont est tributaire de chaînes d’approvisionnement longues et complexes dans de nombreux pays, qui fournissent des voies de transmission au virus. La production reste épargnée pour l’instant, mais plus les restrictions sur la circulation des personnes et des équipements s’accroîtront, plus il sera difficile pour les producteurs de la maintenir », a-t-il poursuivi.
Le pétrole devenu bon marché va réduire les budgets des pays producteurs en Afrique. Avec la chute des prix du pétrole en dessous de leur seuil de rentabilité, de nombreux projets seront retardés en Afrique.
C’est en substance le contenu d’une nouvelle étude du cabinet Rystad Energy publiée en marge de la situation actuelle du marché pétrolier. Les investissements dans les grands projets pétroliers et gaziers prévus vont connaître un changement de calendrier, voire une réduction des dépenses. Plusieurs projets de développement comme au Sénégal sont déjà pressentis pour être retardés. Le pays risque de ne pas pouvoir démarrer la production en 2022, comme prévu.