LE PROJET de développement de la riziculture de Masina (PDRM) à Kinshasa est le fruit des accords de prêts conclus entre la République démocratique du Congo, d’une part, et, d’autre part, la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA) et le Fonds de l’OPEP pour le développement international (OFID). Ces accords consistent en un financement de 17 millions de dollars : 10 millions de dollars (BADEA), 5 millions de dollars (OFID) et 2 millions de dollars (contrepartie du gouvernement). À ce jour, la réalisation de ce projet agricole, bénéfique pour les habitants de la capitale congolaise, est retardée par la partie congolaise dont l’apport permettra de rémunérer en partie les travaux, l’acquisition des équipements et l’encadrement des paysans.
Pour décanter la situation, le ministre du Développement rural a sollicité que le gouvernement débloque sa quote-part du financement dudit projet de 2 millions de dollars, en rappelant que ce montant est budgétisé dans la loi de finances 2020. À terme, le Projet de développement de la riziculture de Masina vise à augmenter la production dans la zone de son exécution.
Réduire la dépendance
Pour rappel, le gouvernement et ses partenaires arabes ont convenu d’étendre les capacités de stockage de la production du riz dans ce site hydro-agricole, à une vingtaine de km du centre-ville de Kinshasa. Il est prévu que la société Sisco construise des magasins de stockage de riz et aménage des aires de séchage sur le site pour quelque 259 000 dollars.
Le PDRM devrait produire 13 000 sacs de riz par an. Ce qui permettra à la RDC de réduire sa dépendance à l’importation de plus de 100 000 à 250 000 tonnes de riz chaque année, surtout en provenance de l’Asie, dont 30 % de brisures de riz. L’importation du riz ne coûte pas seulement à l’État des sommes importantes mais aussi des ennuis de santé à la population du fait des cargaisons qui ne respectent pas les normes sanitaires ou contaminées.
On a encore à l’esprit l’affaire Dana Rice du nom de cet importateur arabe, qui aurait usé de « ses » relations, surtout d’« espèces sonnantes et trébuchantes » pour faire enlever la marchandise des entrepôts de la douane. C’est Baba Aïdara, un journaliste installé aux États-Unis, qui a lancé l’alerte sur sa page Facebook, indiquant que « du riz pakistanais est contaminé dans des ports d’Afrique ». Il a ainsi invité à « éviter » la marque de riz du nom de « Dana Rice ». Il n’empêche, le riz pakistanais est très populaire pour sa « qualité supérieure » et sa « compétitivité » partout dans le monde. Les prix dépendent bien sûr de la destination, du conditionnement (CIF) et de la quantité (containers de 20/40 pieds).
En RDC, plus de 80 % des céréales consommés sont importés. Les importations en denrées alimentaires coûtent annuellement au pays environ 1,5 milliard de dollars. Les pouvoirs publics cherchent à se rapprocher de l’objectif de l’autosuffisance alimentaire sans vraiment y parvenir jusque-là. La crise financière internationale due à la chute des cours mondiaux des matières premières, et maintenant la pandémie de coronavirus, ont fait que le gouvernement décide de reprendre sa politique agricole. Dans le but de relancer la production et de diversifier l’économie.
La politique gouvernementale en matière agricole, telle que définie en 2012, a deux volets principaux : le soutien aux petits exploitants et les partenariats public-privé. Bref, il s’agit de redynamiser l’agriculture à la base, par la mobilisation et l’encadrement des paysans (1 ha pour un ménage), de manière à intensifier la production du maïs, du riz, du manioc, des haricots, de la pomme de terre, de la patate douce, de l’arachide, de la banane…
En décembre 2016, la Commission économique pour l’Afrique (CEA) a tenu meeting à Abuja (Nigeria) sur le thème : « Nourrir l’Afrique : vers une agro-industrialisation pour une croissance inclusive ». On y a parlé de l’élimination de la pauvreté, de la lutte contre la faim et de l’insécurité alimentaire… qui correspondent aux deux premiers Objectifs de développement durable (ODD) que les Nations Unies ont adoptés en septembre 2015. La CEA avait lancé à cette occasion un appel à une nouvelle politique pour soutenir l’agro-industrialisation de l’Afrique. Les experts de cette institution sont d’avis que l’Afrique peut apporter beaucoup à l’industrialisation des produits de base et à l’agro-alliance avec de nouvelles approches politiques. Ce qui permettra de réduire la facture des importations, surtout de produits alimentaires.
Consommation en hausse
Pour rappel, le riz est la céréale la plus consommée au monde et la plus cultivée après le blé. Selon l’IRRI, il faut environ 1 400 litres pour produire 1 kg de riz. En Afrique subsaharienne, la consommation de riz est toujours en hausse ces dernières années. D’après Osiriz, les importations de la région sont prévues pour augmenter autour de 6,5 % l’an. Cette hausse est portée par de nombreux pays consommateurs comme le Nigeria, la Côte d’Ivoire et le Sénégal. Au Nigeria, deuxième importateur mondial et premier importateur africain de la céréale, les achats devaient croître de 10 % à 2,2 millions de tonnes en 2019. Du côté de la Côte d’Ivoire, un volume record de 1,5 million de tonnes de riz devait être importé alors qu’au Sénégal, la quantité importée pourrait être supérieure à 1,6 million de tonnes.
L’Afrique subsaharienne produit moins de 5 % du riz mondial. La céréale constitue principalement un aliment de base en Afrique orientale et occidentale.
L’Afrique dépense plus de 7 milliards de dollars par an pour ses importations de riz (près de 24 millions de tonnes), indispensables pour sa sécurité alimentaire, alors que le continent est doté d’un grand potentiel de production, déplorent des experts. Africa-Rice est l’organisation intergouvernementale qui regroupe 26 pays d’Afrique de l’Ouest, du Centre et de l’Est.