Le gouvernement a présenté, ce jeudi 23 juillet, un «plan jeunes». Mais l’une des principales propositions de Castex a tout du «faux plan» ! Il s’agit du développement du service civique, dont le nombre de contrats signés passerait de 140 000 en 2018 à plus de 220 000 en 2021. Autant de contrats précaires promis aux jeunes à défaut d’emplois.
Ouvert aux 16-25 ans, le service civique est, selon l’agence qui porte son nom, un «engagement volontaire au service de l’intérêt général». En effet, en allant faire un tour sur le site internet dédié, on trouve une grande diversité de missions utiles parmi les offres proposées. Par exemple, accueillir, rencontrer et accompagner des personnes en grande précarité au sein d’une une association. Ou encore, animer des ateliers de sensibilisation au numérique avec des enfants. Toutes ces missions ne sont pas réalisées au sein d’associations. L’Etat et les collectivités locales peuvent également accueillir des services civiques, comme cette gendarmerie qui propose une mission d’appui aux gendarmes pour réaliser des missions de prévention de la délinquance, ou ce commissariat où le volontaire aura en charge l’accueil et de l’orientation du public, pour faciliter ses démarches. Toutes ces missions sont utiles mais, alors, quel est le problème ?
Le premier problème est que ces «missions» ressemblent furieusement à de vrais emplois, même si, comme l’écrit le sociologue Simon Cottin-Marx, «les volontaires ne dépendent pas du droit du travail et ne profitent pas de ses protections» (1).
Le second problème est que les volontaires ne sont rémunérés qu’entre 580,62 euros et 688,30 euros par mois et ce, pour travailler officiellement entre 26 heures et 35 heures par semaine. Pourquoi les volontaires sont-ils payés en dessous du SMIC ? Parce qu’ils sont jeunes ? Parce que c’est un «engagement» ?
La volonté de s’engager pour l’intérêt général n’est évidemment pas absente des raisons pour lesquels les jeunes signent un service civique. Cependant, s’ils deviennent volontaires, c’est aussi parce que c’est mieux que de devoir pointer au chômage. Selon une étude réalisée par l’INJEP, ils sont 26% à avoir déjà eu une expérience professionnelle, 10% sont des chômeurs de longue durée sans expérience professionnelle, et 14% ont terminé des études supérieures. Qui peut croire qu’ils ne préféreraient pas un véritable emploi ? Et surtout, un revenu décent leur permettant de se loger et de manger ?
En 1994, Balladur n’a pas réussi à imposer son «SMIC jeune». En 2005, Villepin n’a pas pu imposer le contrat première embauche (CPE) qui créait un sous-contrat de travail pour les jeunes. Sous couvert «d’engagement pour l’intérêt général», dans un contexte où les nouveaux entrants sur le marché du travail voient leurs perspectives d’embauche plus que jamais obscurcies du fait des conséquences de la crise sanitaire, Castex et Macron sont sur le point de parvenir à un tour de force. En s’appuyant sur un monde associatif et des services publics essorés par les cures d’austérité budgétaires qui n’ont d’autre choix que d’embaucher des services civiques, ils sont en passe de généraliser le sous-contrat de travail. Une précarisation et un bizutage en règle de la jeunesse qu’il serait temps de stopper : tout travail mérite salaire, même si le travail est réalisé par un moins de 26 ans.
(1) Sociologie du monde associatif de Simon Cottin-Marx, éd. Repères, La découverte (2019).