Des milliards de personnes manquent toujours d’eau potable

Un expert indépendant de l’ONU a appelé la semaine dernière à davantage d’efforts pour réaliser les droits humains relatifs à l’eau potable et à l’assainissement d’ici 2030, année butoir de l’atteinte des 17 Objectifs de développement durable.

LÉO HELLER est le rapporteur spécial de l’ONU sur les droits de l’homme liés à l’eau et à l’assainissement. Il alerte que dix ans après la reconnaissance explicite de l’eau potable et de l’assainissement comme des droits humains à part entière par l’Assemblée générale des Nations Unies, des milliards de personnes manquent toujours d’eau potable et d’assainissement. « La pandémie de coronavirus nous a enseigné que laisser pour compte les personnes qui ont le plus besoin de services d’eau et d’assainissement peut mener à une tragédie humanitaire », souligne-t-il. Léo Heller ajoute : « Durant les dix prochaines années, les droits humains à l’eau et à l’assainissement doivent devenir une priorité si nous voulons construire des sociétés justes et humaines. » 

Le rapporteur spécial de l’ONU a lancé cette alerte à l’occasion de la célébration du 10è anniversaire de l’adoption, le 28 juillet 2010, de la résolution 64/292 de l’Assemblée générale portant sur l’eau et l’assainissement comme droits humains. Depuis, 193 États se sont engagés à garantir l’accès à l’eau potable et à l’assainissement pour tous. Ils ont réaffirmé explicitement leurs engagements pour les droits humains à l’eau et à l’assainissement à travers le Programme de développement durable à l’horizon 2030, dont les 17 ODD sont un appel universel pour mettre fin à la pauvreté, protéger la planète et améliorer les vies et les perspectives d’avenir de toutes les personnes.

Verre à moitié vide

Dix ans après l’adoption de la déclaration sur l’eau et l’assainissement et 10 ans avant l’échéance fixée pour réaliser pleinement ces droits, « le verre est à moitié vide et il est aussi à moitié plein », a dit Léo Heller. D’après lui, « le progrès accompli depuis 2010 peut montrer une mise en œuvre lente des droits humains à l’eau et à l’assainissement mais, la résolution de l’Assemblée générale de l’ONU, comme point de départ, a effectivement déclenché des initiatives et inspiré plusieurs avancées créatives ». Même si d’importants progrès ont été réalisés pendant les 10 dernières années, l’expert onusien a noté que les pays ne sont pas en bonne voie d’atteindre les objectifs relatifs à l’eau, l’assainissement et l’hygiène pour 2030. 

Une personne sur trois n’a pas encore accès à l’eau potable et plus de la moitié de la population mondiale manque d’accès à un assainissement sûr. Environ 3 milliards de personnes ne disposent pas d’installations pour le lavage des mains avec du savon et de l’eau, et plus de 673 millions de personnes pratiquent toujours la défécation en plein air. Cette situation inacceptable cause chaque année 432 000 morts dues à la diarrhée. « Les engagements du Programme 2030 sont un moteur pour ne laisser personne pour compte, mais ce ne sera pas suffisant si les pays abordent les objectifs et les cibles comme un exercice purement quantitatif, mettant de côté les droits humains à l’eau et à l’assainissement, a prévenu Léo Heller.

Afin de marquer les 10 ans des droits humains à l’eau et à l’assainissement, il a organisé une campagne d’une année pour jeter des ponts entre les aspects conceptuels et théoriques des droits humains à l’eau et à l’assainissement et leur application pratique sur le terrain. Pour rappel, les experts indépendants de l’ONU font partie de ce qu’on appelle les procédures spéciales du Conseil des droits de l’homme des Nations Unies. 

Par procédures spéciales, il faut entendre le plus grand corps d’experts indépendants au sein du système onusien des droits de l’homme. Le titre est généralement attribué aux mécanismes indépendants d’enquête et de supervision mis en place par le Conseil des droits de l’homme afin de traiter de la situation spécifique d’un pays ou des questions thématiques dans toutes les régions du monde. Les experts des procédures spéciales travaillent bénévolement. Ils n’appartiennent pas au personnel de l’ONU et ne perçoivent pas de salaire pour leur travail. Ils sont indépendants de tout gouvernement ou de toute organisation et exercent leurs fonctions à titre individuel.