ERIC YUAN est à la tête de Zoom Video Communications, l’entreprise spécialisée dans les téléconférences, appels vidéos et autres meetings virtuels. Autant dire qu’avec une pandémie planétaire qui a poussé une grande partie de la population mondiale à rester confinée chez elle, un marché était à prendre. Fils d’ingénieurs miniers chinois, Yuan récupérait, dans sa jeunesse, du cuivre sur des sites de constructions pour le revendre. Après des études en géologie et informatique, l’homme affirme avoir été attiré par les logiciels de visioconférence à la suite des trajets de trains interminables (plus de dix heures) qu’il faisait pour rendre visite à sa petite amie de l’époque, qui deviendra la mère de ses trois enfants.
Originaire de Chine donc, Yuan affirme avoir jeté son dévolu sur les États-Unis après avoir suivi une conférence de Bill Gates. Après avoir essuyé quelques refus de visas, il pose finalement ses valises en Californie en 1997 et rejoint Webex, une startup de visioconférence, rachetée en 2007 par le géant informatique Cisco Systems. Entreprise qu’il décide de quitter pour fonder Zoom en 2012. Les marches du succès s’offrent alors à lui. Son entreprise atteint dix millions d’utilisateurs en deux ans. Elle entre en Bourse en 2019 et lui dans le club des milliardaires par la même occasion.
Avec l’arrivée de la crise sanitaire, conjuguée à la simplicité de sa plateforme (pas besoin de télécharger une application ou d’être inscrit, un lien internet suffit), son business explose, malgré les critiques quant à la confidentialité, le respect de la vie privée et la sécurité de la plateforme. Bloomberg qualifie d’ailleurs Zoom de « Pandemic Social Network ». Si le nombre d’adeptes était resté relativement stable entre 2014 et 2019, en 2020, Zoom avait dépassé les 300 millions d’utilisateurs quotidiens. D’où l’entrée de son fondateur dans le classement Forbes des « 400 Américains les plus riches », avec une fortune personnelle et familiale estimée à 11 milliards de dollars.
La start-up en euphorie
Incontournable depuis le début de la crise sanitaire due au coronavirus, l’entreprise californienne a gagné plus de 663 millions de dollars de chiffre d’affaires d’avril à juin, soit 355 % de plus que l’année dernière à la même période. Mais ses concurrents n’ont pas dit leur dernier mot. Zoom est toujours sur son petit nuage. Le titre de la start-up bondissait cette nuit de lundi 31 août de 22 % après la clôture à Wall Street grâce à des résultats records, révélateurs de l’engouement pour ce logiciel de visioconférence désormais massivement utilisés par les adeptes du télétravail.
Son bénéfice net a atteint près de 186 millions, contre moins de 6 millions il y a un an. « Les organisations sont engagées dans une transition de leurs besoins immédiats pour assurer leurs activités à l’infrastructure nécessaire pour pouvoir travailler, apprendre et se connecter de n’importe où, via la plateforme Zoom qui fait passer la vidéo en premier », déclare Eric Yuan, le patron et fondateur de la société, dont la fortune a bondi de 4,2 milliards de dollars en quelques heures.
Dès le mois de mars dernier et les premières mesures de confinement, Zoom s’est imposé comme le logiciel star de la crise sanitaire, fournissant un moyen de communication à des centaines de millions de personnes bloquées chez elles. L’interface a servi, et sert encore, à des rendez-vous familiaux, des parties de poker, des cours d’école, des sessions de yoga ou encore… des réunions professionnelles. Les particuliers l’utilisent gratuitement, mais Zoom commercialise aussi des solutions professionnelles. Selon Zoom, le nombre de gros clients – les entreprises qui lui ont rapporté plus de 100 000 dollars de revenus dans l’année passée – a doublé à 988 ce trimestre.
Et la société ne voit pas la tendance faiblir, alors que le retour dans les bureaux et les écoles, notamment aux États-Unis, se fait très doucement ou pas du tout. Elle table sur un chiffre d’affaires compris entre 685 et 690 millions de dollars au troisième trimestre, et des revenus annuels entre 2,37 et 2,39 milliards. Zoom a finalement été peu affecté par les polémiques liées au manque de sécurité du service.
Si la start-up d’Eric Yuan domine le marché, ses concurrents ne désarment pas. En avril, Google a mis à disposition gratuitement un outil professionnel de visioconférence (Google Meet). Facebook a aussi musclé son offre, avec plus d’options dans les appels vidéos via ses différentes plateformes, ainsi que le lancement des « Messenger Rooms », qui permettent de retrouver ses « amis » dans des « salons virtuels », ou d’organiser des cours et conférences payants. Microsoft, de son côté, a donné une place plus centrale à la vidéo sur Teams, son outil de collaboration professionnelle pour la main-d’oeuvre des entreprises. Zoom ne pourra pas se reposer sur ses lauriers.
La crise sanitaire a modifié nos habitudes de travail et de communication. Et l’entreprise Zoom a su en tirer pleinement profit. Alors que les mesures de distanciation physique sont toujours en vigueur aux États-Unis et dans de nombreux pays.