Maintenir la stabilité du cadre macroéconomique jusqu’à l’entrée du nouveau gouvernement

Le 1ER Ministre continuera à réunir chaque semaine le Comité de conjoncture économique jusqu’à son départ de la Primature. Le mardi 2 février, les membres du comité se sont retrouvés autour de lui pour faire le point de la situation dans le pays.

POUR LA PÉRIODE du 25 au 29 janvier 2021, le Comité de conjoncture économique a constaté une décélération de l’inflation à Kinshasa et une légère accélération à Lubumbashi, les deux principales villes du pays. Il a également noté un déficit mensuel de 29 milliards de nos francs dans les finances publiques. Lequel déficit budgétaire a été absorbé grâce à un appui budgétaire. 

Autres constats : la stabilité relative du taux de change à l’indicatif et une légère appréciation du taux de change et une légère appréciation de 0,43 % du franc congolais sur le marché parallèle. Le commerce extérieur, lui, a connu une hausse hebdomadaire de 88,6 % pour les exportations, notamment des produits miniers, et une baisse hebdomadaire de 9,4 % pour les importations. Le cobalt, l’étain et l’argent ont la semaine à la hausse, alors que le cuivre, le zinc et l’or ont vu leurs cours baisser. Les exportations minières ont augmenté comparées à la période précédente, entraînant ainsi l’augmentation de la redevance minière constatée et liquidée de 13,5 à 17,8 millions de dollars. Sur un tout autre registre, l’offre d’emploi a engrangé 1 % en décembre 2020 par rapport  au mois de novembre.

Décryptage

La gestion orthodoxe des finances publiques est le tendon d’Achille de l’État en République démocratique du Congo. Et c’est ce que les institutions financières internationales, notamment la Banque mondiale et le FMI, lui reprochent le plus souvent. Par exemple, jusqu’en octobre 2020, le gouvernement a mené des discussions avec le Fonds monétaire international (FMI) dans la perspective de la conclusion d’un programme économique triennal 2021-2023. Pour Sylvestre Ilunga Ilunkamba, le 1ER Ministre, le gouvernement qui viendra, devra sauvegarder cet élan dans les échanges engagés avec les services techniques du FMI, afin de bénéficier d’un appui au titre de Facilité élargie de crédit pour 2021-2023. 

En termes de perspectives, les estimations du FMI font état d’un possible relèvement de l’activité économique mondiale à un taux de 5,4 % en 2021, dans l’hypothèse d’une hausse progressive de la consommation et de l’investissement sous l’effet de réponses adéquates et concertées des gouvernements pour la maîtrise de la pandémie de Covid-19. Sur le plan national, les experts projettent un taux de croissance de 3,2 % en 2021, tributaire principalement du relèvement de la production minière consécutive à une bonne évolution des cours des matières premières. 

Le taux d’inflation estimé à 21,5 % à fin 2020, est projeté à 8,8 % fin 2021. Pour y arriver, le gouvernement Ilunga avait prévu de poursuivre la mise en œuvre des mesures de stabilisation du cadre macroéconomique arrêtées notamment dans le Pacte de Stabilité signé en août 2020 entre les ministères du Budget, des Finances et la Banque centrale du Congo (BCC). La stabilité du taux de change constatée actuellement devrait se poursuivre jusqu’en 2021 où le taux fin période est projeté à 2 013,4 FC pour 1 dollar.

Les plus importantes de ces mesures de stabilité du cadre macroéconomique concernent notamment le faible recours au financement monétaire du déficit du Trésor grâce à l’appui budgétaire du FMI et de la Banque africaine de développement (BAD) ; l’amélioration de l’offre de devises grâce aux recettes en devises provenant principalement des exportations minières ; le partenariat avec le FMI pour un soutien à la balance des paiements afin de renforcer le niveau des réserves internationales, qui représentent actuellement quelque 2 semaines d’importation. Pour rappel, la situation des finances publiques au premier semestre de 2020 a été jugée « catastrophique » au point de nécessiter une loi de finances rectificative. En effet, avant que le gouvernement Ilunga ne soit investi, les dérapages ont été constatés comme l’a révélé le procès dit « de 100 jours » qui a abouti à la condamnation de Vital Kamerhe, le directeur de cabinet du chef de l’État à 20 ans de prison. 

Cadre budgétaire

Avant sa prise de fonction, en juillet 2019, Sylvestre Ilunga, 1ER Ministre nommé, avait tiré la sonnette d’alarme : les caisses de l’État étaient quasiment vides, les réserves de change érodées et le franc congolais en perte de vitesse. Et les provinces enregistraient plusieurs mois d’arriérés de rétrocession, d’autres engagements de l’État étaient en souffrance. Sur le plan budgétaire, le défi pour le gouvernement Ilunga était de corriger d’abord les différents déséquilibres afin d’asseoir les conditions indispensables à l’essor économique et social du pays. 

Le gouvernement Ilunga se dit fier, en dépit des circonstances difficiles tant du point de vue national qu’international, d’avoir maintenu la stabilité du cadre macroéconomique, gage de croissance et d’amélioration progressive des conditions sociales. 

Malgré l’accélération des prix intérieurs entre avril et juillet 2020, induite par les mesures de confinement, l’inflation a été contenue à environ 15 %, tandis que le taux de change a été stabilisé autour de 2 000 FC pour 1 dollar américain, depuis plus de six mois. Globalement, les perspectives budgétaires à fin décembre 2020 préfigurent l’exécution d’un budget déficitaire. 

Le challenge pour le nouveau gouvernement sera le cadre budgétaire à moyen terme 2021-2023 (CBMT). Il a été élaboré par le gouvernement conformément à l’article 13 de la loi relative aux finances publiques. Il contient la prévision, de 2021 à 2023, l’évolution de l’ensemble des dépenses et des recettes du pouvoir central, des provinces et des entités territoriales décentralisées. Il dégage aussi le solde des opérations financières, de même que l’évolution de l’endettement. 

De manière succincte, la trajectoire des finances publiques définie dans ce CBMT laisse entrevoir, pour le pouvoir central, un solde nul pour l’exercice 2021, un gap de 2 509,8 milliards de nos francs pour l’exercice 2022 et de 2 595,2 milliards pour l’exercice 2023. Au niveau des provinces comme des entités territoriales décentralisées (ETD), l’évolution des dépenses et des recettes postule des soldes nuls dans la programmation budgétaire 2021-2023. 

Le financement des gaps dégagés au niveau du pouvoir central obligera le prochain gouvernement à multiplier davantage les efforts pour l’amélioration de la fiscalisation de l’économie et la lutte contre l’évasion fiscale. Mais également à lever des fonds sur le marché financier local et extérieur dans le cadre de la stratégie de la dette à moyen terme. 

À cet effet, le gouvernement Ilunga avait prévu de veiller à ce que les emprunts à contracter le soient à des conditions favorables, afin de garantir le caractère solvable de l’État et maintenir le stock de la dette dans des limites acceptables. Au-delà, estiment des analystes, la mise en œuvre satisfaisante de la programmation budgétaire 2021-2023 reste vulnérable à certains facteurs exogènes et endogènes. Il s’agit principalement du risque macroéconomique lié à la baisse de la croissance ou à des cours de principales matières d’exportation du pays, et du risque lié au non-respect des engagements sur les ressources extérieures.

La priorité devrait être à la diversification de l’économie nationale, notamment à travers trois secteurs clés : l’agriculture, les infrastructures et l’énergie. Le gouvernement est appelé à mobiliser des fonds pour augmenter la production des cultures vivrières et maraichères (manioc, maïs, riz, pommes de terre et haricots) par des campagnes agricoles, poursuivre la création de centres de développement intégré, de parcs agroindustriels ainsi que la réduction de la vulnérabilité du secteur et la finalisation de l’architecture institutionnelle de tous les parcs agro-industriels. Le gouvernement est également appelé à construire des infrastructures pour le désenclavement du pays, la promotion de la circulation des personnes et des biens et la création de richesses à travers les axes routiers, ferroviaires maritimes et aériens…