Véritable casse-tête pour le consommateur congolais, le ciment gris a vu son prix triplé en 15 ans. Reste à savoir si la dizaine de projets de construction d’usines en cours vont inverser la flambée des prix.
Importé ou produit localement, le consommateur congolais n’a qu’un seul rêve : acheter le ciment gris à un prix abordable. Tel n’est pourtant pas le cas. Ce produit fait l’objet d’une spéculation disproportionnée sur le marché congolais : 16,5 dollars à Kinshasa et au Bas- Congo, 17 au Katanga, 20 dans les Kivu, 22 à l’Equateur, 30 en Province Orientale, 37 dans les deux Kasaï, 40 au Maniema… La Cimenterie de Lukala (Cilu), la principale du pays, livre pourtant son produit aux grossistes à 12 dollars, au sortir de l’usine. « Le congolais achete le ciment au prix le plus élevé de la sous région. Il coûte 6 dollars en Angola, 8 en Namibie, 11 en Zambie et en Tanzanie, 15 au Cameroun, au Tchad, en Guinée Equatoriale, au Congo-Brazzaville et au Rwanda », soutient Guy Nzaba, ingénieur en bâtiment et chef de chantier chez Afritex, une société congolaise de construction. Selon lui, cet état de choses est due à une faible production, par rapport à la demande.
Faible production nationale
La production annuelle du ciment gris en RDC dépasse à peine les 500.000 tonnes, contre une demande estimée à 3,5 millions de tonnes, selon le ministère de l’Economie et Commerce. Si le boom immobilier et le programme gouvernemental de reconstruction des infrastructures de base, observés, depuis quelques années, se consolident, les projections les plus réalistes de la Banque mondiale tablent sur une demande annuelle de 5 millions, à l’horizon 2017, a fait observer un conseiller du ministre de l’Industrie, Petites et Moyennes entreprises. L’inadéquation entre l’offre et la demande a toujours rendu difficile la maîtrise du prix du ciment sur le marché congolais.
De cinq cimenteries existantes en RDC, il n’en reste plus que deux qui fonctionnent. Il s’agit de la Cimenterie de Lukala (Cilu) avec une production annuelle de 400.000 tonnes et la Cimenterie du Katanga (Cimentkat) avec une production annuelle de 50.000 tonnes..
En 2008, la carence du ciment gris sur le marché national, due à l’explosion de la demande nationale, a entrainé une affolement des prix. Un sac se négociait entre 30 et 50 dollars, à Kinshasa et à Mbuji-Mayi. Le gouvernement avait alors décidé d’ouvrir ce marché, longtemps fermé, à l’importation.
La décision a eu le mérite de ramener le prix à 12 dollars, pendant quelques années. Mais la demande de plus en plus croissante, doublée de la multiplicité de taxes à l’importation, provoque la flambée des prix de ce produit sur le marché, constate un responsable des importations ciments chez Congo Futur, un des grossistes majeurs du marché congolais. Les taxes à l’importation de ce produit comme transport maritime, entreposage, manutention, assurance, dédouanement, Foner, Occ, Anr…, viennent enfoncer le clou. Selon cet importateur, le sac de ciment, acheté en Chine ou en Turquie et livré au port de Matadi, coûte 6 dollars.
La production insuffisante
De cinq usines existantes en RDC, il n’en reste plus que deux qui fonctionnent. Il s’agit de la Cimenterie de Lukala (Cilu) du Bas-Congo, avec une production annuelle de 400.000 tonnes (soit 80 % de la production nationale) et la Cimenterie du Katanga (Cimentkat), à Lubudi, qui a une production annuelle de 50.000 tonnes. Toutes deux, propriétés de Malta Forrest, ont ouvert, en 2011, leur capital à l’allemand Heidelberg Cement. L’objectif est de développer et de moderniser l’outil de production afin de porter la capacité de production annuelle à 1.5 million de tonnes, à l’horizon 2016. Toutes les autres cimenteries sont aux arrêts, pour des raisons essentiellement techniques. Le cas de la Cimenterie de Kalemie, ou celle de Katana, au Sud Kivu.
Concernant la cimenterie nationale de Kimpese (Cinat), les plans de recapitalisation n’ont pas été concluants. Le français Lafarge et l’angolaise Nova Cimangol, ont abandonné la piste. Ils seraient découragés par l’énorme dette sociale et commerciale de l’entreprise (41 millions de dollars), mais aussi par le veto d’un actionnaire, pourtant, minoritaire, Rawji (patron du groupe Beltextco, rawbank et Raga TV). Cet entrepreneur refuse toujours de se plier à la proposition de vendre ses actions à l’Etat, en vertu d’une disposition qui prône le consensus comme le seul mode de décision.