Dix ans après la mise en œuvre d’un vaste programme de transformation d’une vingtaine d’entreprises publiques en sociétés commerciales, l’opinion s’interroge sur le niveau des résultats atteints. Cet anniversaire coïncide avec la fin du Projet compétitivité et développement du secteur privé (PCDSP) de la Banque mondiale d’un financement de près de 180 millions de dollars, à travers le Copirep.
Aux yeux de plusieurs observateurs, le tableau de plusieurs entreprises publiques concernées par la réforme reste sombre, en dépit de la supervision du Comité de pilotage des reformes de entreprises publiques (Copirep). A la Société congolaise des ports et transports (SCPT, ex Onatra), Société nationale d’électricité (Snel), Regideso, Régie des voies aériennes (Rva), Société nationale des chemins de fer du Congo (Sncc) et bien d’autres entreprises, les mauvaises nouvelles s’accumulent : services peu ou mal rendus, vétusté de l’outil de travail, climat social malsain avec des interminables grèves des travailleurs et plusieurs mois d’arriérés de salaires, managers contestés, baisse progressive du rendement… Et finalement, le dysfonctionnement de la majorité de ces entreprises. Au Copirep, les spécialistes restent optimistes, malgré toutes ces déconvenues. Lors l’atelier de clôture du Projet compétitivité et développement du secteur Privé (PCDSP) de la Banque mondiale, tenu en août dernier, ils ont défendu leur bilan, en estimant que le chantier de réforme est sur la « bonne voie ». Le travail du Copirep s’inscrit dans une politique de promotion d’une croissance entrainée par le secteur privé, en améliorant, particulièrement, le climat des investissements et en favorisant l’essor de l’activité économique par des réformes appropriées, au niveau des entreprises publiques clés.
Des préalables juridiques
Le travail du Copirep s’inscrit dans une politique de promotion d’une croissance entrainée par le secteur privé, en améliorant, particulièrement, le climat des investissements et en favorisant l’essor de l’activité économique par des réformes appropriées, au niveau des entreprises publiques clés.
Un cadre de cette institution a indiqué qu’il est impossible de penser à la réforme des entreprises, sans des préalables juridiques, tels que la consolidation du système judiciaire du pays par des appuis conséquents, au bénéfice des organismes comme le Centre d’arbitrage du Congo, des tribunaux de commerce, l’Inspectorat général des services judiciaires, des Cours et Tribunaux, particulièrement les Tribunaux de Commerce et le Journal Officiel. Il faut aussi consolider l’adhésion à l’Ohada. Ce dernier acte a eu lieu en juillet 2012 et est l’une des plus grandes victoires à l’actif du Copirep, pour améliorer le climat des investissements. La réforme du droit des affaires est apparue comme une impérieuse nécessité pour la RDC, compte tenu, notamment, de l’archaïsme et des lacunes de son système juridique, tant au plan matériel qu’organique. C’est fort de ces instruments juridiques que le guichet unique de création d’entreprises a été créé. Grâce à cette réforme, il est désormais possible de créer une entreprise en République démocratique du Congo, sans trop d’acrobaties.
La réforme des entreprises
La seconde composante de la mission du Copirep porte sur la réforme des entreprises publiques qui passe par la modernisation du cadre juridique et institutionnel, leur transformation et restructuration. A l’actif du Copirep, on peut citer l’initiative du nouveau cadre législatif qui régit les entreprises publiques aujourd’hui. Il s’agit notamment des lois n° 08/007 du 7 juillet 2008, n° 08/008 du 7 juillet 2008, la loi n° 08/009 du 7 juillet 2008, portant respectivement sur la transformation, le désagrément et l’organisation des entreprises publiques. Étant entendu que l’ancienne loi n° 78-002 du 6 janvier 1978, qui régissait les entreprises publiques, présentait des faiblesses notamment en mettant sous un même chapeau, des entreprises à vocation commerciale et celles qui avaient des missions de service public. Les statuts de 20 sociétés commerciales ont été adoptés et déposés au greffe des tribunaux et publiés au Journal Officiel, le 30 décembre 2010. Cela constitue une grande avancée quand on connait les différents conflits d’intérêts qui ont souvent miné et parfois paralysé ces entreprises, devant les tribunaux. La transformation de ces sociétés n’était pas l’effet de la simple mécanique. Elle relevait d’une démarche échelonnée en plusieurs étapes dont la détermination du capital social de la société transformée, la rédaction des statuts et leur adoption par l’assemblée générale des actionnaires, son inscription, la publication des statuts au Journal Officiel. Les nouvelles sociétés commerciales ont aussi été inscrites au Registre de commerce.
Difficultés et défis
Il convient cependant de noter, que devant les difficultés des entreprises à produire un inventaire détaillé de leur situation patrimoniale, en vue de la détermination de leur capital social, le gouvernement a décidé de la fixation d’un capital social minimum de façon à boucler le processus de la transformation sur le plan juridique. La détermination du capital social a posé des difficultés en ce qui concerne l’inventaire de la situation patrimoniale, la question des dettes croisées entre entreprises et la problématique du passif non assurable. La conséquence de ces problèmes est que de nombreuses entreprises transformées en sociétés commerciales ont de la peine à déterminer le capital social définitif, à établir le bilan de clôture et d’ouverture de leurs sociétés. L’inventaire exhaustif de la situation patrimoniale comprenant obligatoirement un état détaillé de l’actif et du passif de la société, un inventaire exhaustif dûment certifié par le collège des commissaires aux comptes et par un auditeur externe, est un élément clé du processus de transformation. Il permet, en effet, de déterminer le capital social définitif, en vue de son adoption par l’assemblée générale des actionnaires de la société. En situation de gestion « normale », le management de l’entreprise doit tenir à jour cette situation patrimoniale. Cela n’a pas été le cas pour la quasi-totalité des entreprises en transformation. Dans la plupart des cas, la comptabilité n’était pas à jour, et le patrimoine notamment immobilier, lorsqu’il était connu, n’était certifié par aucun titre de propriété. Toutes les entreprises ont bénéficié de l’appui des missions de consultance d’institutions spécialisées pour relever le niveau et harmoniser leurs états comptables. A ce jour, 10 entreprises publiques, sur 15 en activité, ont bouclé l’ensemble du processus de leur transformation en société commerciale, avec, en dernière étape, la détermination de leur capital social et l’établissement de leur bilan d’ouverture. Quant aux dettes et créances croisées entre entreprises et entre ces dernières et l’Etat, il a été mis en place une commission pour examiner et arbitrer la question des dettes dites « croisées » pour les situations arrêtées au 31 décembre 2011.