La décentralisation en RDC a tout l’air d’un cuirassé de Potemkine. Un bateau ivre, dans lequel l’ordre d’un amiral peut se heurter au contrordre d’un capitaine de vaisseau. Les gouverneurs des provinces montent en prérogatives politiques, ils sont les représentants plénipotentiaires du chef de l’État dans l’arrière-pays. Pour autant, face à une instruction – à tort ou à raison- d’un ministre du gouvernement central, un gouverneur, ça la ferme ou ça démissionne. Particulièrement dans la gestion des ressources forestières et minières. De l’avis des experts, la décentralisation aura, voilà pratiquement dix ans, marqué plus le pas que des points. Faute non seulement de lois à élaborer, mais surtout à amender, comme le code forestier et le code minier. Le gouvernement central contrôle pratiquement tout au point de révolter certains de gouverneurs des provinces. Qui ont vu leur autorité et/ou influence s’effriter comme peau de chagrin.
Conflit des compétences
Longtemps, un bras de fer a opposé le ministre de l’Environnement et les gouvernorats de la Province-Orientale ainsi que de l’Équateur sur la coupe des bois. Le Kasaï-Oriental et le Katanga ont désapprouvé le diktat de Kinshasa sur les mines. Ce n’est un secret pour personne que tous les contacts menés par le gouverneur Ngoy Kasanji de l’ex-Kasaï-Oriental sur la relance de la Minière de Bakwanga (MIBA) se sont heurtés au niet de Kinshasa à quelque niveau que ce soit. L’accord laborieusement négocié entre l’ancien gouverneur de l’Équateur, Jean-Claude Baende, et un groupe d’investisseurs finlandais pour l’électrification de l’Équateur par la biomasse reste à ce jour sans suite car il a été gelé à Kinshasa.
Dans les mines, les prérogatives du gouverneur de province, par exemple, ne se limitent qu’à l’octroi des cartes de négociants de produits artisanaux. Est négociant, en fait, toute personne physique de nationalité congolaise qui se livre aux opérations d’achat et de vente des substances minérales provenant de l’exploitation artisanale.
Autre mission d’aussi moindre importance laissée aux gouverneurs des provinces, c’est celle de décider de l’ouverture des carrières pour les travaux d’utilité publique sur les terrains domaniaux.
Alors qu’octroyer ou refuser les droits miniers et/ou de carrières pour les substances minérales autres que les matériaux de construction à usage courant, retirer les droits miniers et de carrières, déchoir le titulaire d’un droit minier ou de carrières, donner acte aux déclarations de renonciation aux droits miniers et/ou de carrières et acter l’expiration de droit minier et/ou carrières, autoriser les exportations des minerais à l’état brut, instituer les zones d’exploitation artisanale, agréer et retirer l’agrément des comptoirs d’achat des produits de l’exploitation artisanale, tout cela relève de l’autorité du ministre du gouvernement central ayant dans ses attributions les mines.
La mainmise de Kinshasa mal vue au Katanga
Le gouverneur sortant du Katanga, Moïse Katumbi Chapwe, en sait quelque chose. Il a confié avoir eu le spleen de la politique suite à la mainmise trop étouffante de Kinshasa sur la gestion de sa province, particulièrement dans le secteur minier. Il l’avait appris à ses dépens en prenant des mesures d’interdiction d’exportations du brut, question de juguler la fraude et de donner de la valeur ajoutée au cuivre congolais. La prérogative, selon le code minier, revient au seul ministre du gouvernement central. C’est encore à Kinshasa que revient la mission d’exercer la tutelle des institutions, organismes publics ou paraétatiques se livrant aux activités minières et aux travaux de carrières, de réserver le gisement à soumettre à l’appel d’offres, d’approuver la Constitution des hypothèques, d’accepter ou refuser l’extension d’un titre minier ou des carrières aux substances associées ou non associées, de délivrer les autorisations de traitement ou de transformation des produits d’exploitation artisanale, de proposer au président de la République le classement ou le déclassement des substances réservées, des substances minérales classées en mines ou en produits de carrières et inversement ainsi que des zones interdites, d’établir une zone d’interdiction, de nommer et convoquer les membres de la commission interministérielle chargée de sélectionner les offres relatives à l’exploitation d’un gisement soumis à l’appel d’offres ainsi que les membres de la commission interministérielle chargée d’examiner les listes des biens à importer pour les activités minières et, enfin d’agréer les mandataires en mines et carrières.