À la Gombe, le centre des affaires de Kinshasa ou à Limete, jadis, le cœur industriel de la capitale, dans la mégapole de la RDC avec ses 12 millions d’habitants, on vit au rythme du ronronnement des générateurs électriques. Ce sont eux qui alimentent les grandes usines, les administrations, les appartements, et les systèmes de climatisation dans un pays où les températures dépassent fréquemment les 30° C. Un ancien ministre de l’Énergie a un jour ironisé : « Le diable en personne vit dans ce pays et son esprit malin est responsable de ces ténèbres ». Ce ne sont pas les initiatives qui manquent autour du secteur énergétique congolais. Pourtant, les Congolais en général ont l’impression que rien ne se fait pour améliorer leurs conditions de vie.
On a frôlé la catastrophe
Cet ancien ministre se demande sur ce que nous serions devenus, s’il n’y avait pas eu le financement de la Banque mondiale pour éviter à la capitale une situation de chaos total en ce qui la fourniture de l’électricité. En effet, à travers les projets SAPMP-PMEDE, la Banque mondiale a financé les travaux de renforcement de la capacité de production à Inga I et II de 700 MW à 1 300 MW, dont 55 MW sont déjà disponibles, et 230 MW devraient l’être en 2016. Grâce à cet appui de la Banque mondiale, une deuxième ligne Inga-Kinshasa a été mise en place et dont la mise en service a éloigné des Kinois de la catastrophe énergétique ; environ 300 000 personnes ont eu accès à l’électricité, dont 60 000 sont déjà connectés. Par ailleurs, l’éclairage public a été mis dans plusieurs quartiers de Kinshasa (Masina, Kinseso…). Depuis 2007, la Banque mondiale est engagée aux côtés du gouvernement dans une logique de développement durable. Cette vision justifie la complexité de son engagement qui porte encore un peu sur des projets d’urgence et plus sur des projets de développement durable. Dans les domaines de l’énergie, de l’eau et des télécommunications, la Banque mondiale appuie des investissements physiques de base, mais en parallèle, elle appuie la réforme des entreprises publiques qui interviennent dans ces secteurs afin d’assurer leur viabilité économique et financière. Alors que plus ou moins 1 milliard de dollars ont été investis dans Inga I et Inga II et dans la ligne de transport vers le Katanga pour une réhabilitation d’urgence, la Banque mondiale travaille avec la Société nationale d’électricité (SNEL) pour améliorer la gestion de cette dernière.
Cependant, la situation est telle que les ménages ne ressentent pas l’impact de ce qui est réalisé dans leur vécu quotidien. La précarité du secteur énergétique n’est pas irrémédiable. Le pays dispose du potentiel (100 000 MW) nécessaire pour satisfaire les besoins en électricité de l’Afrique toute entière. Outre l’énergie hydroélectrique, la RDC dispose de gaz méthane et peut recourir à l’énergie éolienne, thermique et solaire. En dépit de ce potentiel immense, le taux de desserte en électricité est l’un des plus bas au monde (9 %). Ce taux est inférieur à la moyenne de l’Afrique subsaharienne située à 30 %. Par ailleurs, les écarts sont considérables entre les villes et les villages. La Cellule d’appui technique à l’énergie a cartographié l’accès à l’électricité par province de la manière suivante : Kinshasa (44,1 %), Kongo-Central (11,3 %), Sud-Kivu (7,9 %), ex-Katanga (7,1 %), ex-Province-Orientale (3,6 %), Maniema (3 %), ex-Équateur (1,4 %), ex-Kasaï-Oriental (1 %), ex-Kasaï-Occidental (0,5 %). En milieu rural, l’électricité est indisponible.
Des mesures non appliquées
Pour inverser la tendance, le gouvernement a arrêté une stratégie dite « Énergie durable pour tous » (EDPT). Cette stratégie comprend trois objectifs ambitieux : doubler à l’horizon 2018 le taux d’accès à l’électricité (18 %), lancer de vastes chantiers d’ouvrages hydroélectriques à travers le pays et prendre les mesures incitatives avec la nouvelle loi sur la libéralisation du secteur de l’énergie. En cassant le monopole de la SNEL, le gouvernement veut attirer les investisseurs privés en leur offrant un cadre juridique sécurisant. La nouvelle loi a été suivie par la publication, en juillet 2014, de l’Atlas des énergies renouvelables, qui a permis d’identifier près de 780 centrales hydroélectriques au lieu de 217 connus précédemment. Grâce à cet atlas, on sait désormais qu’il y a un potentiel de 10 000 MW qui n’est pas concentré en un seul point mais répartis sur les 145 territoires du pays. Ceci offre la possibilité de développer de petites centrales hydroélectriques de 1 à 10 MW, voire en deçà à travers des microcentrales. Le potentiel de la RDC a l’avantage de s’adapter à tous les types de marchés et de consommateurs. Même les populations rurales peuvent accéder à l’énergie électrique.