LES MESURES de mobilisation tous azimuts des recettes publiques commencent à donner des résultats positifs même si les régies financières doivent encore fournir davantage d’efforts. Sur le marché des changes, il s’observe une accalmie, concrétisée par une légère appréciation de la monnaie nationale face aux devises étrangères, en l’occurrence le dollar. On a été tous témoins de la liesse populaire le week-end du début du mois d’août. Des gens sont sortis dans la rue pour manifester leur joie en apprenant la chute du dollar par rapport au franc congolais. Certes, la baisse est légère mais ç’a été un symbole, un signe fort de la maîtrise de la situation de crise.
Naturellement, dans cette euphorie ambiante, les changeurs de rue en ont profité pour faire de la spéculation, en présentant des taux de change pour le moins fantaisistes : entre 1 500 et 1 700 francs congolais pour 1 dollar. Pourtant, la Banque centrale du Congo (BCC) a fixé son taux indicatif à CDF 1 900=USD 1. Pourvu qu’il dure, ce phénomène bienvenu dans l’opinion a plusieurs explications.
Parmi les facteurs d’appréciation, la Banque centrale épingle la politique budgétaire stricte, notamment l’application d’un dispositif de gestion des finances publiques sur base caisse ; la politique monétaire, à savoir la ponction des liquidités via la vente des devises ; et la politique de change en matière de paiement des dépenses du Trésor en devises. Selon Deogratias Mutombo Mwana Nyembo, le gouverneur de la Banque centrale, d’autres mesures, notamment celles de politique budgétaire, sont en application en vue de relancer l’économie nationale. Pour des analystes, « on revient à l’orthodoxie ». Avec la pandémie de coronavirus qui a secoué l’économie déjà affaiblie, expliquent-ils, Sylvestre Ilunga Ilunkamba, le 1ER Ministre, ne pouvait pas se coucher de bonne heure. Maintenant, il le peut, « certain d’avoir eu raison contre ceux qui l’ont accusé de ne rien faire face à l’inflation ».
L’une des réponses positives qu’il a préconisées pour juguler la crise monétaire, c’est d’avoir pensé au respect de la mesure du rapatriement des recettes d’exportation (la loi n° 18/001 du 9 mars 2018). Selon le code minier révisé, le titulaire (toute personne morale au nom de laquelle un droit minier ou de carrières est accordé et un titre minier ou un titre de carrières est établi, conformément aux dispositions du code minier révisé. Toutefois, l’amodiataire est assimilé au titulaire. Seules les personnes morales sont éligibles aux droits miniers et de carrières. En conséquence, elles seules peuvent revêtir la qualité de titulaire) qui ne rapatrie pas les 60 % des recettes d’exportation, conformément aux dispositions de l’article 268 alinéa 2, est puni d’une amende d’un montant égal à 5 % du montant non rapatrié.
L’impulsion des miniers
En se conformant à cette instruction du 1ER Ministre à la Banque centrale, les analystes estiment que les miniers ont donné par là une impulsion pour la stabilisation de la monnaie nationale. Selon une correspondance interne au ministère des Mines, datée du 3 août, suivant les rapports mensuels sur les mouvements des fonds transmis par les sociétés minières dans la période de juillet 2018 à juin 2020 ; les montants des recettes d’exportation et ceux dûment rapatriés se présentent respectivement comme suit : de juillet à décembre 2018 (3 217 251 828,33 dollars/1 932 833 050,13 dollars, soit 60 %) ; de janvier à décembre 2019 (6 523 109 569,61 dollars/ 4 341 291 389,36 dollars, soit 66,55 %) ; de janvier à juin 2020 (2 826 842 820,70 dollars/1 807 712 085,01 dollars, soit 63,95 %). Le total est de 12 567 204 218,64 dollars comme recettes d’exportation, et 8 081 836 524,50 dollars, comme montant rapatrié, soit 64,31 %.
Sur pied de l’article 271 du code minier révisé relatif au contrôle des opérations du compte principal local et extérieur, la direction des mines et la Banque centrale vont exercer leur pouvoir de contrôle, de surveillance et de vérification pour « inciter les titulaires de rapatrier obligatoirement dans leurs comptes en RDC 60 % des recettes d’exportation dans les délais prescrits par la loi minière et la réglementation de change, d’une part, et sanctionner les exportateurs miniers défaillants en leur appliquant les dispositions de l’article 309 bis du code minier, d’autre part ».
L’administration des mines a proposé à la Banque centrale de « travailler en toute synergie dans une commission mixte ad hoc ». En juillet dernier, la Banque centrale a annoncé des missions de contrôle auprès des sociétés minières qui ne se conforment pas à cette disposition de la loi minière. La baisse de l’offre de devises sur le marché des changes provoquant ainsi l’instabilité monétaire, est aussi le fait du non-respect de cette disposition et de la mesure de suspension des vols à l’international. En effet, les compagnies aériennes ramènent aussi des devises au pays.