Equity BCDC : une vision et une ambition claires

Si elle a été surprise par la fusion d’Equity Bank/RDC avec la BCDC, la concurrence a désormais peur depuis la publication des chiffres clés de l’exercice 2020. Un bénéfice net de 4,4 millions de dollars, un total actif en croissance de 143 % se chiffrant à 2,5 milliards de dollars, un portefeuille de crédit en croissance de 125 %, se situant à 829 millions de dollars, et un portefeuille de dépôt à hauteur de 2,2 milliards de dollars.

LE MODÈLE d’affaires d’Equity BCDC, filiale d’Equity Group Holding née de la fusion en 2020 d’Equity Bank/RDC et BCDC, est calibré de manière à tirer le marché bancaire congolais vers le haut. Cependant, cette vision claire n’est pas du goût de la concurrence. En coulisse, le travail de sape aux intentions cachées se fait pour ternir l’image de James Njuguna Mwangi, le CEO d’Equity Group Holding, qui croit fermement en l’avenir de la RDC. « Les enjeux de la fusion des deux banques donnent à coup sûr des insomnies aux autres banques commerciales du pays. La nouvelle banque affiche des ambitions de leadership qui dérangent les autres banques », analyse un observateur. 

Dans son message qui a ressemblé à des adieux à l’issue de la cérémonie de passation de flambeau, après 17 ans de « bons et loyaux services », Yves Cuypers, le dernier directeur général de la Banque commerciale du Congo (BCDC), avait souligné un fait. « Le monde de la banque a énormément évolué ces dix dernières années et j’ai assisté personnellement à cette évolution, tant sur le plan mondial que sur le plan local, par un changement du paradigme bancaire », avait-il déclaré. 

Cette évolution s’est opérée sur trois points majeurs. 

Premièrement, c’est la mondialisation : « Tout se fait maintenant à une échelle mondialisée. Une banque ne peut pas travailler si elle n’a pas à l’extérieur du pays où elle opère des correspondants qui lui font confiance. Et les règles de ces correspondants ont été fortement renforcées. » Rien à faire, les banques doivent aujourd’hui s’adapter à l’évolution. Deuxièmement, c’est l’entrée dans la concurrence des Fintech et des sociétés des télécoms dans le marché bancaire. De ce fait, le paradigme change également sur le plan de la technologie. Et troisièmement, c’est l’adaptation des normes et instructions du régulateur local, c’est-à-dire la Banque centrale du Congo aux standards internationaux.

L’effet Darwin

Et donc pour ne pas rester au bord de la route et finalement disparaître face à cette évolution, il a paru important pour l’« Éléphant » de 110 ans de « trouver un opérateur bancaire et financier de premier rang pour prendre le relais et continuer à perpétuer la longue histoire de la banque. Les premiers contacts entre la BCDC et Equity Group Holding ont été noués, il y a deux ans. Dire maintenant que James Mwangi a roulé la République démocratique du Congo dans ce dossier d’acquisition de banque, une première en RDC, faut-il le souligner, c’est vraiment mal connaître l’homme et son parcours du combattant.

Quoi que l’on puisse penser ou quoi que l’on puisse juger, James Mwangi est un homme d’action et pragmatique. Cet investisseur kenyan, parti de rien, est un bâtisseur dans le secteur bancaire et, par-dessus tout, un panafricaniste invétéré devant l’Éternel. Pour lui, le rachat de la majorité des actions dans BCDC par son groupe n’est pas une acquisition pour l’acquisition. Bien au contraire. Dans sa tête, offrir à la RDC une puissante plateforme financière où les hommes d’affaires congolais peuvent opérer, transacter et interagir en toute sérénité, sans avoir à se déplacer.

Certes, tout changement génère l’incertitude, mais Yves Cuypers est convaincu que « les choses vont se mettre en place ». C’est peut-être « la vitesse à laquelle elles vont se mettre en place qui peut inquiéter ». Normal ! Une chose est sûre : la BCDC ne sombrera pas car elle est désormais dans les bonnes mains. « Il y a une vision extrêmement claire pour ce que la nouvelle banque pourra et sera demain. Donc, il faut garder la confiance et inutile de se mettre des mauvais scenarios et projections en tête. La vision est là, l’ambition est là aussi », c’est le testament qu’a légué Yves Cuypers. 

En 2019, le rapprochement entre la BCDC et Equity Group Holding était présenté comme un « partenariat stratégique ». À l’époque, Yves Cuypers avait indiqué que la recherche d’un partenaire n’était pas de « l’histoire récente ». En effet, depuis 2009, sous George Forrest, l’ambition de la BCDC a toujours été d’être le leader dans le secteur bancaire en RDC. En scrutant la cartographie bancaire du pays, « Equity Bank/Congo était la seule banque avec laquelle la BCDC a moins des points de concurrence mais la plus forte complémentarité sur les segments clientèle et réseau », témoigne encore le dernier DG de la BCDC. 

Fondements de l’acquisition

C’était là l’un des fondements de l’opération d’intégration. Et l’autre, c’était la capacité d’intervention dans le pays. Equity Bank/RDC avait deux atouts : complémentarité des produits et apport technologique (Equity a un système digital extrêmement développé). James Mwangi pense que pour avoir vécu plus de 110 ans, la BCDC était « une banque solide et résiliente » car elle a fait face à plusieurs défis. « Que la BCDC qui est une institution solide puisse s’associer à Equity Bank/RDC, une jeune banque dynamique et très développée dans tout ce qui est digital, cette association marquera l’histoire ».

Aujourd’hui, les premiers effets de la fusion sont là : toutes les plateformes ATM sont intégrées, les clients de l’alors BCDC ont la possibilité d’avoir les cartes internationales. En ce qui concerne le financement, au-delà du plafond de 25 millions de dollars de crédit de la BCDC, à partir du siège d’Equity à Nairobi, les clients de l’ancienne BCDC peuvent obtenir des prêts jusqu’à 430 millions supplémentaires par le simple fait d’appartenir au groupe. James Mwangi assure que la nouvelle banque deviendra « une grande institution pour le développement économique de la RDC ».

Banque d’investissement, institutionnelle, privée et de proximité, Equity BCDC affiche des ambitions également claires. Il s’agit de transformer l’économie de la RDC comme Equity l’a fait pour le Kenya. Pour cela, le groupe a les outils nécessaires d’inclusion financière dans tous les segments de la clientèle et dans tous les produits, rassure Célestin Mukeba Muntuaba, le directeur général d’Equity BCDC. La nouvelle banque a pris une nouvelle dimension dans le paysage économique de la RDC avec son réseau de 73 agences actuellement. 

Equity BCDC veut soutenir les hommes affaires pour investir selon leur taille et même dans des projets à long terme, fait remarquer James Mwangi, qui encourage les entrepreneurs nationaux à prendre le contrôle des activités économiques dans le pays. Le rachat du groupe Atlas Mara (banques en Zambie et au Mozambique) permettra à Equity d’étendre son réseau jusqu’au port de Beira et de desservir tout ce corridor utilisé par les hommes d’affaires congolais pour l’import-export. 

Par ailleurs, l’acquisition de la Banque populaire du Rwanda par Equity/Rwanda permettra au Rwanda et à la RDC de pouvoir intensifier leurs relations et faciliter ainsi les activités économiques entre les deux pays. « En travaillant ensemble, nous pouvons réellement optimiser les opportunités qui s’offrent à nous », fait voir James Mwangi. Pour les prochaines années, Equity veut vraiment asseoir sa présence dans les pays où ses filiales sont implantées. « Nous voulons y amener des produits qui n’ont jamais été introduits dans le marché. Nous voulons réellement transformer l’économie parce que si l’économie n’est pas transformée, nous ne pourrions pas non plus nous transformer nous-mêmes », déclare James Mwangi.