Les rapports annuels de la BCC montrent que l’espérance de vie d’une banque en RDC dépassait rarement une décennie. Beaucoup de facteurs expliquent leur faillite. En amont, il y avait incontestablement la crise économique internationale amplifiée par les facteurs nationaux. Cependant, la mal-gouvernance semble être un des facteurs cruciaux car le rôle d’un manager, c’est de prévoir, d’anticiper et de savoir ployer sur ses jambes quand survient la tempête. Les anecdotes sont légion. Lorsque la NBK a commencé à éprouver ses difficultés au début des années 1990, des agents pointaient du doigt leurs dirigeants pour avoir accordé des crédits à des amis sans tenir compte des critères prudentiels de rentabilité du projet et de crédibilité de l’emprunteur. Un ancien P-dg de la banque publique NBK avait défrayé la chronique, en 1991, pour avoir débloqué une importante somme d’argent en faveur d’une femme qui s’était présentée comme l’envoyée de la première dame de la République. À la banque publique BCA, les hommes du pouvoir envoyaient des proches pour obtenir des crédits. Un ancien P-dg de cette banque publique était abasourdi de s’entendre dire par une cliente qu’elle ne savait pas que l’argent perçu était à rembourser («Toyebaki te ke ezalaki ya kozongisa»)… C’était le quotidien des banques publiques saignées à blanc par les hommes au pouvoir. Sur la crise de la BC, l’ancien gouverneur de la BCC, Jean-Claude Masangu, avait déclaré que les banques prenaient des « risques inconsidérés ».
Au regard de la situation, le sort des banques est suspendu à la gouvernance de la BCC. Depuis une trentaine d’années, l’autorité monétaire montre des signes de faiblesse dans l’accomplissement de cette noble mission. Le législateur lui a donné le mandat d’émettre la monnaie, de gérer les réserves de change du pays et de contrôler les intermédiaires financiers afin de protéger l’épargne du public. Tout semble partir de 1979 lorsqu’apparaissent les premiers effets de la crise économique internationale sur le plan national, notamment avec l’apparition du phénomène de thésaurisation de billets de banque. La BCC a opté pour la stabilisation économico-financière alors que l’économie venait de subir une transformation structurelle. Mêmes causes, mêmes effets. Appliquée quelques années seulement après la zaïrianisation, l’opération Alpha a accentué au contraire la crise de liquidité de la PME, entraînant ainsi sa disparition. Les étrangers, essentiellement libanais, ont profité du naufrage des PME autochtones alors que la population victime de la mesure de démonétisation n’avait plus accès au secteur bancaire ayant malheureusement élevé au rang des produits de luxe les services financiers réservés seulement aux entreprises et aux ménages à revenu élevé. Dans cette tourmente émergèrent des coopératives d’épargne et de crédit (COOPEC) sans que la BCC ne se préoccupât de leur réglementation. Ce n’est que dans les années 1980 qu’elle intervint après l’effondrement en cascade des COOPÉC.