UNE CONFÉRENCE de presse donnée conjointement par Wivine Mumba Matipa, la ministre du Portefeuille ; Albert Yuma Mulimbi, le président du conseil d’administration de Gécamines ; et le président de HKEMI, a sanctionné la cérémonie de signature de la convention de partenariat entre la Générale des carrières et des mines (GECAMINES), d’une part, et Hongkong Excellent Mining Invest Co, LTD (HKEMI) et Kik Mining SASU, d’une autre part.
L’accord signé au ministère du Portefeuille lundi 3 décembre est relatif à l’exploitation commerciale et au partage de la production des gisements de Kingamyambo et Kilamusembo. Cet accord de partenariat, premier du genre, est historique pour Gécamines. Il consacre un nouveau modèle contractuel pour les partenariats de l’entreprise publique minière.
Les pertes sèches
Pourquoi alors un nouveau modèle partenarial ? Les dirigeants de Gécamines S.A répondent immédiatement que le précédent modèle a montré son inefficacité. « Les partenariats des joint-ventures (JV) ont démontré leur inefficacité pour produire des dividendes au profit de Gécamines. Les intérêts des deux partenaires ne sont pas alignés.
Pire, le risque dans une JV est majoritairement supporté par le gisement de Gécamines qui rembourse tous les frais prioritairement, avant de produire bénéfice », argumentent-ils. Et d’ajouter : « La gouvernance des projets n’étant pas équilibrée, Gécamines n’a que peu de pouvoirs pour influer sur le projet. »
Tenez : à fin 2017, un seul partenaire minier avait versé à Gécamines des dividendes (en 2017), depuis 2001, soit 3,5 millions de tonnes de cuivre produites et 320 000 tonnes de cobalt. Les coûts de construction, d’exploitation et de financement ont toujours largement dépassé les études de faisabilité. La conjonction de ces charges supplémentaires, additionnées à l’amortissement dérogatoire, ont permis à ces partenaires de ne jamais déclarer un dollar de bénéfice, fait remarquer le conseiller financier et économique du PCA de Gécamines.
En conséquence, poursuit-il, ils n’ont jamais payé un dollar d’impôt sur le bénéfice à l’État, ni un dollar de dividendes à Gécamines. Au total, l’État et Gécamines ont subi un manque à gagner de 4,9 milliards de dollars de revenus entre 2005 et 2016, par rapport aux projections qui avaient décidé du choix de leurs partenaires.
Le nouveau paradigme
Pourquoi le partage de production ? Les accords de partage de production alignent les intérêts des deux partenaires. Par conséquent, le risque pèse désormais plus sur l’investisseur que sur Gécamines. L’investisseur est donc
incité à maîtriser ses coûts tandis que Gécamines est garantie de recevoir une part importante de la production du projet chaque année, et quoi qu’il arrive à partir de la mise en production, a encore commenté le conseiller d’Albert Yuma.
Ce qui change également, c’est la direction du projet qui devient conjointe par les deux parties, et la gouvernance du projet devient donc égalitaire, entre les deux partenaires. Si le projet est rentable, les parties augmentent leurs bénéfices.
Concrètement, comment le partenariat en question va-t-il fonctionner? « Les accords de partage de production (APP) viennent de l’industrie pétrolière où ils
Gestion opérationnelle
sont d’usage commun entre les pays ou entreprises d’État, qui concèdent le champ pétrolier et les sociétés exploitantes. C’est une innovation dans le secteur minier en RDC », explique-t-on également. Dans le cas d’espèce, Gécamines s’associe avec un contractant qu’est HKEMI, qui va financer le projet, faire réaliser la certification, faire construire les installations et assurer leur gestion opérationnelle. Le partenaire HKEMI bénéficiera, en contrepartie de ses apports financier et opérationnel, d’une partie
de la production, qui est contractuellement prévue dans le contrat d’association. On parle alors de « Cost Stop », c’est-à-dire « la limite maximum décidée contractuellement, et exprimée en pourcentage de la production, qui peut-être utilisée chaque année pour rembourser les frais du projet ». Cette part de la production est appelée « Part remboursable des frais ».
À titre uniquement d’illustration parce que les clauses de l’accord sont encore confidentielles, si le Cost Stop est fixé à 60 %, cela veut dire que chaque année, 60 % de la production est affectée au remboursement des coûts du projet, tant qu’il reste du remboursement à faire.
On parle aussi de « Part de profit », c’est-à-dire la part physique de la production, qui est affectée à chacun des deux partenaires à égalité. « Dans notre exemple, c’est donc 20 % de la production qui est affectée annuellement à chaque partenaire, quoi qu’il arrive. »
Mais également de « Part de profit supplémentaire », si le projet se déroule bien (coûts maîtrisés, cours des minerais en ligne avec les prévisions ou en augmentation), alors la part allouée aux remboursements va être trop importante pour couvrir les coûts. La différence sera partagée de nouveau entre les partenaires,
Contrat d’amodiation
HKEMI RDC est enregistré en République démocratique du Congo par HKEMI qui en est le seul actionnaire. Un contrat d’amodiation (mode d’exploitation dans lequel le propriétaire du gisement concède l’entreprise à un tiers en échange de prestations en nature et, accessoirement, en argent) est conclu entre Gécamines qui amodie son titre au profit de HKEMI RDC. L’enregistrement du contrat d’amodiation est fait au Cadastre minier (CAMI), ce qui permet à HKEMI RDC d’avoir un droit sécurisé à mener à bien le projet.
Par ailleurs, l’accord de partage de production détaille tous les termes et conditions du partenariat entre Gécamines et HKEMI. Le loyer d’amodiation est payé par HKEMI RDC en production (cathodes de cuivre et cobalt) dans le cadre du contrat d’amodiation. Le comité conjoint est établi entre Gécamines et HKEMI RDC et décide de tous les aspects de gestion opérationnelle et financière du projet.
En ce qui concerne le pas-de-porte (somme payée au propriétaire par l’acquéreur pour pouvoir prendre possession du gisement ou redevance supplémentaire exigée par le propriétaire et représentant le droit de prendre possession de la mine), HKEMI devra verser 40 millions de dollars à Gécamines comme première tranche d’ici la fin de l’année.