Gouvernement Suminwa : place à une nouvelle génération politique ?

Après presqu’un mois d’agitation médiatique et des tractations politiques quant à la possibilité de former son cabinet, Judith Suminwa Tuluka a soumis, le 28 mai 2024, la liste des membres de son équipe à Félix Antoine Tshisekedi, qui l’a acceptée : 54 membres, dont trente-sept hommes et dix-sept femmes : six vices-1ER Ministre, dix ministres d’État, vingt-quatre ministres, quatre ministres délégués et dix vice-ministres. Décryptage.

En attendant la passation de pouvoir, le Premier ministre sortant et son successeur.

LE gouvernement Judith Suminwa est le premier gouvernement de la République démocratique du Congo de l’ère Fatshi version mandat II depuis le 29 mai 2024. Après des consultations des regroupements politiques et des associations de la société civile, plusieurs listes de nominations, concernant les titulaires des ministères de plein exercice ainsi que les ministres délégués auprès de la Première ministre, ont été rejetées par le président de la République avant que celle annoncée par la porte-parole du chef de l’État, Tina Salama, le 29 mai 2024. 

Et contrairement à ce qu’elle avait annoncé aussitôt après sa nomination, en tant que Première ministre, par le président de la République : aller vite et mettre hors-jeu les chefs des partis et des regroupements politiques dans son gouvernement, Judith Suminwa Tuluka a perdu son temps en conflits internes à la majorité. La publication tardive de son cabinet reflète les nuits de longs couteaux qu’elle a connues pour former finalement son gouvernement. 

En effet, plusieurs ministres du gouvernement précédent dirigé par Jean Michel Sama Lukonde (Jean Pierre Bemba, Jean Pierre Lihau, Eve Bazaïba Masudi, Alexis Gisaro, Aimé Boji Sangare, Guy Loando Mboyo, Aimé Sakombi Molendo, Jean Lucien Bussa Tongba, Julien Paluku Kahongya, Patrick Muyaya Katembwe, Muhindo Nzangi, Samuel Roger Kamba, Augustin Kibassa Maliba, Marc Ekila, Didier Budimbu Ntubuanga, Gilbert Kabanda, Wivine Moleka, Godard Motemona, Crispin Mbadu, Irène Esambo, O’Neige Nsele, Elysé Bokumwana et Samy Adubango) ont été reconduits. 

Néanmoins, Jean Pierre Bemba quitte la Défense pour les Transports. Muhindo Nzangi laisse l’Enseignement supérieur pour le Développement rural. Jean Lucien Bussa est permuté du Commerce extérieur au Portefeuille, Aimé Sakombi Molendo abandonne les Affaires foncières pour les Hydrocarbures. Pareil pour Julien Paluku qui va de l’Industrie au Commerce extérieur. Didier Budimbu se voit confier les Sports après avoir été aux Hydrocarbures. Marc Ekila quitte les Transports pour la Formation professionnelle. Didier Mazenga Mukanzu reprend l’Intégration régionale. Crispin Mbadu, alors vice-ministre aux Affaires étrangères dans le gouvernement précédent, prend la tête de l’Urbanisme et de l’Habitat.

Par rapport au gouvernement précédent, le nombre total est réduit, passant de 59 des membres à 54. L’entourage de la Première ministre explique cette réduction par une recherche d’efficacité et d’agilité. Cependant, plusieurs observateurs évoquent une « génération politique » du gouvernement en raison de l’important nombre de ministres qui y font leur entrée. 

Comme vice-1ER Ministres : Jacquemain Shabani (Intérieur, Sécurité, Décentralisation et Affaires coutumières), Guy Kabongo Muadiamvita (Défense et Anciens combattants), Daniel Mukoko Samba (Économie), Guylain Nyembo (Plan et Coordination de l’aide au développement). Comme ministres d’État : Grégoire Mutshiayili (Agriculture), Thérèse Kayikwamba Wagner (Affaires étrangères), Raïssa Malu (Éducation nationale et Nouvelle citoyenneté), Constant Mutamba (Justice), Acacia Bandubola Mbongo (Affaires foncières). 

Comme ministres : Doudou Fwamba Likonde (Finances), Louis Kabamba Watum (Industrie et PME), Teddy Lwamba Moba (Ressources hydrauliques), Kizito Pakabomba Kapinga Mulume (Mines), Ephraïm Akuakua (Emploi et Travail), Chantal Mwadiamvita (Droits humains), Safi Songo Ayane (Enseignement supérieur), Nathalie Aziza (Action sociale et Solidarité), Léonie Kandolo Omoyi (Genre, Famille et Enfant), Jean Pierre Tshimanga Bwana (Pêche et Élevage), Yolande Elebe (Culture, Arts et Patrimoine), Didier Mpambia Musanga (Tourisme), Noella Ayeganagato Nakwipon (Jeunesse et Éveil patriotique).

Comme ministres délégués : Bestine Kazadi (Coopération), Didier Tenge Te Litho (Politique de la ville), Stéphanie Mbombo (…). Comme vice-ministres : Eugénie Tshela Kamba (Intérieur), Grace Yamba (Affaires étrangères), Samuel Mbemba (Justice), Jean Pierre Kezamudro (Initiation à la Nouvelle citoyenneté), Jean Baptiste Mwami Ndeze (Affaires coutumières).

Pour des politologues, il y a deux façons de former un cabinet gouvernemental. La première est d’y mettre des gens qui représentent toutes les tendances de la majorité parlementaire. La seconde est de ne prendre que ceux qui désirent aller dans la direction qui est impérativement dictée par la vision politique du président de la République que le 1ER Ministre se doit d’incarner, loin de tous ses instincts… 

En réaction à l’annonce du nouveau gouvernement, certains parlent de « mauvais départ » qui affaiblit déjà l’autorité de la Première ministre. D’autres pensent qu’elle n’avait pas le droit « d’effrayer les alliés qui ont mouillé la chemise » pour assurer le second mandat au président Tshisekedi.