Avec notamment sa Cour commune de justice et d’arbitrage (CCJA), l’harmonisation du droit des affaires en Afrique est porteuse des vertus juridiques, selon ce professeur de l’Université de Kinshasa (UNIKIN).
Lors d’une conférence-débat organisée dernièrement au barreau de Matadi, dans la province du Bas-Congo, le professeur Grégoire Bakandeja est intervenu sur « la mise en œuvre du droit de l’OHADA en République démocratique du Congo : défis et perspectives ». Il a ainsi expliqué à l’assistance, constituée en majorité des juristes, les avantages de l’Organisation pour l’harmonisation du droit des affaires en Afrique (OHADA). Ces avantages se situent principalement dans la mise en place de la Cour commune de justice et d’arbitrage (CCJA), une juridiction supranationale spécialisée pour le contrôle de l’application de droit.
Pour l’orateur, « cette juridiction constitue une arme redoutable pour les juges dans la plupart des Etats membres de l’OHADA. » Car elle est la seule cour qui connaît des pourvois en cassation contre un jugement. « Quand un juge sait que l’interprétation qu’il a à faire d’un texte pourra faire l’objet d’un contrôle d’une autre juridiction qui est supranationale, il aura tendance à mieux appliquer le droit qu’à ne pas faire ce que bon lui semble », pense cet ancien doyen de la faculté de droit de l’Université de Kinshasa. Il voit la force du droit OHADA sur ce point. Un droit qui, s’il est bien appliqué, contribue à l’amélioration du climat des affaires, une des conditions pour attirer des investissements en Afrique.
Il est possible, dit-il, de contribuer au changement des règles du jeu lorsqu’on est membre d’une organisation : « à ce sujet, certains analystes comptent sur la RDC, surtout sur des universitaires pour améliorer les actes uniformes ».
Un acte uniforme, selon le dictionnaire de droit de l’OHADA, est un ensemble des dispositions légales qui réglementent un domaine déterminé en droit de l’OHADA, lesquelles s’appliquent dans tous les pays africains signataires du traité de Port-Louis. Des actes uniformes qui ne sont pas des paroles d’évangile, soutient le professeur Bakandeja. « Ils sont appelés à changer, à s’adapter aux situations », a-t-il fait savoir. Membre de la Force africaine de l’OHADA, une structure qui se réunit pour discuter des problèmes d’application des actes uniformes, le prof Grégoire Bakandeja a aussi expliqué le rôle des commissions nationales. Celles-ci examinent les différentes propositions de modification des actes uniformes. Plutôt que de se limiter sur cette tâche, la commission OHADA en RDC se serait lancée dans le travail de vulgarisation du droit OHADA, réservé aux initiés. « La commission OHADA n’a pour travail, d’aller faire la vulgarisation. Les gens qui sont sensés faire ce travail doivent maîtriser la question. On ne doit pas prendre n’importe qui pour ça parce qu’il y a de l’argent derrière », s’est-il indigné. Sinon, souligne-t-il, la formation sera biaisée. Il faut avoir la culture des limites, a-t-il conseillé avant de demander aux avocats de se former eux-mêmes en lisant les actes uniformes. Etant donné qu’ils sont confrontés au quotidien à ces questions aussi bien dans le cadre de la transformation des entreprises que dans les cours et tribunaux.
Avocat belge et les honoraires
La Quand un juge sait que l’interprétation qu’il a à faire d’un texte pourra faire l’objet d’un contrôle d’une autre juridiction qui est supranationale, il aura tendance à mieux appliquer le droit qu’à ne pas faire ce que bon lui semble.
Professeur Grégoire Bakandeja
Me Pierre Bogaerts du barreau d’Anvers en Belgique est également intervenu lors de cette journée d’échange sur « les honoraires de l’avocat belge, état actuel des règles légales et déontologiques ». Il a informé que le code judiciaire et la déontologie déterminent et confèrent la liberté à l’avocat belge de fixer, lui-même, ses honoraires. « L’avocat belge a la liberté complète de taxer ses honoraires. Il n’y a pas de tarif et pas de directive », a-t-il souligné. Ce qui permet à l’avocat de s’adresser aux tribunaux pour le recouvrement de ses droits. Me Pierre Bogaerts a aussi indiqué que beaucoup de différends concernant les honoraires sont provoqués par un litige concernant la qualité des services de l’avocat.
« Le client refuse de payer les honoraires, soit par indigence, mais souvent parce qu’il n’est pas satisfait du service que l’avocat lui a rendu ou du résultat que l’avocat a obtenu », a-t-il fait savoir. Même si l’avocat a l’obligation des moyens et non du résultat. Pour lui, la mauvaise réputation que le barreau peut avoir au sein de l’opinion est souvent le résultat de la manière dont l’avocat taxe ses honoraires. Ces honoraires déterminent l’accès qu’a le public à la justice.
Du côté de l’assistance, on a salué l’initiative du bâtonnier de Matadi, Jacques Zakayi Mbumba. « Les thèmes développés par les deux orateurs, ont apporté un plus par rapport à ma connaissance sur l’OHADA particulièrement », a déclaré Me Yves Kabeya. Me Sylvie Mavindi Nkongo a indiqué que ce genre d’échanges devrait se multiplier pour permettre à l’avocat de se mettre à niveau sur des matières qui concernent sa profession.