KINSHASA, (AFP) – Un incident impliquant un sous-officier de République démocratique du Congo (RDC) et des forces rwandaises s’est déroulé dimanche à la frontière des deux pays, l’armée de RDC parlant de “kidnapping”, celle du Rwanda d’arrestation d’un soldat “lourdement armé” en territoire rwandais.
“Le sergent Mulanga Kusakala revenait d’une visite de famille et, pendant qu’il se baladait dans la zone neutre, trois policiers rwandais lui ont sauté dessus et l’ont tiré du côté rwandais”, a déclaré à l’AFP le lieutenant-colonel Olivier Hamuli, porte-parole de l’armée de RDC dans la province du Nord-Kivu, dont Goma est la capitale.
“C’est un kidnapping (…) Il était dans la zone neutre, pas au Rwanda. C’est la population qui a alerté les autorités. (…) La tension est vive au niveau de la population, on essaie de la calmer car pour elle, il s’agit d’une provocation”, a-t-il ajouté.
Il a précisé que la zone neutre est une “rue de 5 à 7 mètres de longueur qui marque la frontière entre la RDC et le Rwanda” et que le Mécanisme de vérification conjoint (JVM, Joint Verification Mechanism) “va s’occuper” du dossier. Ce mécanisme sous-régional est chargé de surveiller la frontière entre la RDC et le Rwanda.
De son côté, l’armée rwandaise a affirmé dimanche soir dans un communiqué que le sous-officier congolais en question avait été arrêté (…) par les forces de sécurité dans la ville (rwandaise) de Rubavu (…) menant des activités éminemment suspectes”.
Rubavu (nouveau nom de Gisenyi) est jumelle de Goma, dont elle n’est séparée que par la frontière entre la RDC et le Rwanda.
“Il était lourdement armé, habillé en tenue de combat complète et transportait toutes sortes d’équipements militaires”, a précisé l’armée rwandaise, ajoutant avoir saisi elle aussi le JVM.
Un habitant de Goma a raconté à l’AFP, sous couvert de l’anonymat, que “vers 14h00 (12h00 GMT), au moment de l’incident” plusieurs centaines manifestants “en colère mais pas violents” s’étaient massés aux “petite” et “grande” barrières, provoquant la fermeture de ces deux postes-frontières entre Goma et Gisenyi.
“En fin d’après-midi, les deux barrières ont été rouvertes pour permettre aux gens de rentrer (chez eux) de part et d’autre. Mais comme à la petite barrière l’attroupement était important, la plupart des gens sont passés par la grande barrière”, a précisé ce témoin.
En fin de journée, “un déploiement particulièrement impressionnant des FARDC (armée de RDC) et de la police” était visible dans la zone, a-t-il ajouté.
Les autorités de RDC étaient injoignables en fin de journée pour confirmer ou infirmer l’information.
Selon le lieutenant-colonel Olivier Hamuli, le sergent Mulanga Kusakala est originaire de la province du Bandundu (Ouest) et il est détaché dans la 10e région militaire, à Bukavu, capitale de la province du Sud-Kivu (Est).
Les relations entre la RDC et le Rwanda se sont à nouveau tendues avec la création en mai 2012 du Mouvement du 23 mars (M23). Des experts de l’ONU accusent le Rwanda et l’Ouganda, voisins de la RDC, de soutenir cette rébellion, ce qu’ils ont toujours démenti.
Fin août, lors d’une reprise des combats entre l’armée congolaise, appuyée par les Casques bleus de l’ONU, et le M23, Kigali a accusé Kinshasa d’avoir lancé chez elle plusieurs dizaines d’obus, essentiellement dans la zone de Gisenyi.
Le Rwanda avait alors discrètement renforcé son dispositif militaire à la frontière et menacé la RDC de représailles. Mais, selon l’ONU, les obus avaient été tirés par le M23.
“Il y a environ trois semaines, des militaires rwandais se sont postés sur la colline qui se trouvait du côté du cimetière Gabiro (à Goma) en disant qu’ils craignaient une menace des FDLR, qui pourraient passer par là pour les attaquer. Tout s’était réglé à l’amiable: les Rwandais sont repartis et les FARDC se sont déployés”, a indiqué le lieutenant-colonel Hamuli.
Les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) sont une rébellion hutu rwandaise, active en RDC, dont certains membres sont accusés de participation au génocide de 1994 au Rwanda. Elle est régulièrement accusée de commettre des exactions contre les populations civiles dans l’Est congolais.