La croissance économique ne contribue pas à réduire le chômage

Dans une perspective de développement, donner du travail et/ou aider les jeunes à créer leurs propres entreprises est une vision qui est largement partagée. Mais dans un contexte difficile, il n’est pas aisé de savoir par où commencer.

Des jeunes chômeurs en quête d’emploi.
Des jeunes chômeurs en quête d’emploi.

Huit ans après son adoption, le gouvernement peine à mettre en œuvre sa politique en matière d’emploi, notamment sur son volet entrepreneuriat des jeunes. En examinant la situation, un constat s’impose : le nombre des chômeurs ne fait qu’augmenter. Selon l’Institut national de la statistique (INS), le taux de chômage au Congo est passé de 66,90 % (en 2000) à 42,98 % (en 2014). De 2012 à 2014, le gouvernement affirme avoir créé 100 000 nouveaux emplois. Ces chiffres contrastent, par exemple, avec ceux de l’Institut national de sécurité sociale (INSS) : environ 600 000 travailleurs seulement sont assujettis au régime de sécurité sociale. Par ailleurs, l’Institut national de préparation professionnelle (INPP) note que 30 millions de jeunes congolais vont être demandeurs d’emplois d’ici 2030, malgré une croissance économique qui avoisine les deux chiffres.

Paradoxe

La problématique de la croissance économique et de l’emploi est donc relancée. Elle a été débattue en 2014 au cours d’un atelier sur l’emploi et le chômage au Congo. Les participants en étaient arrivés à une conclusion sans appel : la forte croissance économique en Afrique, pendant ces dix dernières années, n’a pas permis de créer des emplois et de réduire sensiblement la pauvreté. En 2007, le gouvernement congolais avait organisé un forum national sur l’emploi dont les recommandations semblent avoir été rangées dans les tiroirs du ministère de l’Emploi, du travail et de la Prévoyance sociale. Les participants avaient défini, justement, une politique nationale de l’emploi. Selon le vice-Premier ministre en charge de ce portefeuille, Willy Makiashi, le gouvernement devra mobiliser des ressources financières, matérielles et humaines pour la mettre en œuvre. D’après lui, l’emploi des jeunes est un défi majeur pour l’exécutif.

Willy Makiashi reconnaît que le Plan national pour l’emploi des jeunes, élaboré en 2008, n’a pas été non plus appliqué. À l’occasion de la célébration de la journée mondiale du travail, le 1er mai, il avait déclaré : « Chaque année, en effet, des milliers de jeunes qui terminent l’université, censés être déversés sur le marché de l’emploi, peinent à se procurer un travail décent, chôment ou, carrément, prennent le risque de s’évader à l’étranger où ils espèrent trouver des débouchés plus honorables et plus plantureux ».

La tranche sociale la plus touchée

La population congolaise est dans la majorité jeune, mais la crise de l’emploi touche essentiellement les 15-35 ans. Dans cette tranche d’âge, ceux qui ont 24 ans révolus représentent 44,1%. Selon plusieurs enquêtes, il y aurait, à ce jour, environ 24 millions de jeunes désœuvrés au Congo. Le taux d’activité des jeunes de moins de 25 ans est de 23,9% en milieu urbain et de 40,4% en milieu rural.

La problématique de l’emploi préoccupe les chefs d’État des pays membres de la Conférence internationale pour la région des Grands Lacs (CIRGL) qui se sont prononcés, en juillet, à Nairobi, au Kenya, pour l’élaboration d’une politique régionale en la matière. Et dans cette perspective, Kinshasa a accueilli en septembre le premier salon de l’emploi. Il s’est agi de mettre en contact les demandeurs d’emploi, les  employeurs et les intermédiaires dans ce secteur. Le forum a été organisé à l’initiative de Louis-Michel Mwando, le directeur général de DKavi Services.

Cependant, de nombreux jeunes qui pensaient y trouver de l’emploi en sont sortis tout simplement déçus. Pour les organisateurs, le but n’était pas de donner de l’emploi, mais de constituer une banque de données. « Le premier Salon de l’emploi n’a pas été conçu comme un cadre devant recevoir tous les chômeurs de la République démocratique du Congo. L’objectif était de réunir tous les intervenants autour des questions liées à l’emploi », explique Françoise Bansuya, membre de l’équipe d’organisation, qui rappelle que, en 2014, à Lubumbashi, près de soixante-treize jeunes avaient trouvé du travail lors d’un forum similaire.

Quant à la présidente de l’Union panafricaine de la jeunesse, Francine Muyumba, les entreprises devraient mettre en place une stratégie d’emploi en faveur des jeunes. De plus en plus, les jeunes diplômés complètent leur formation académique par une formation professionnelle dans l’espoir de trouver un emploi ou de se mettre à leur propre compte. Dans sa stratégie dite de « Triangle équilatéral », le gouvernement s’appuie sur l’Institut national de préparation professionnelle pour former une main-d’œuvre qualifiée. L’Institut assure le perfectionnement, l’employabilité et l’amélioration des compétences professionnelles des demandeurs d’emploi. Ce qui lui vaut  souvent l’appui financier et technique de certains organismes internationaux, voire de certains pays dans le cadre de la coopération.