Après des années de récession, la République démocratique du Congo a renoué depuis 2002, avec la croissance économique. Une forte croissance estimée à plus de 7 % en moyenne depuis 2009.Mais pour la maintenir, il faut sortir du carcan des matières premières.
La performance réalisée est le résultat des politiques macroéconomiques et des réformes structurelles mises en œuvre par le gouvernement et soutenues par la Banque mondiale, le Fonds monétaire international (FMI) et d’autres bailleurs de fonds. Mais le produit intérieur brut (PIB) a une tendance à la baisse depuis la fin des années 1970, relève Chicot Eboue, professeur à l’Université de Lorraine en France, qui animait un séminaire sur le renforcement des capacités d’analyse des questions de politique économique actuelles à l’intention des cadres du ministère du Plan et de certains ministères sectoriels. Un séminaire organisé par le Projet de renforcement des capacités en gouvernance (PRCG) avec le soutien de la Banque mondiale. « Le pic de 500 dollars atteint en 1973-74, soit 25.000 francs, n’a jamais été rétabli depuis. En 2012, le revenu moyen par habitant était de 164 dollars soit 8.300 francs », note le professeur. Entretemps, cette croissance économique ne se traduit pas par une réduction significative de la pauvreté.
L’économie congolaise demeure fragile et toujours largement exposée à la volatilité du secteur minier, principalement du cuivre, l’un des minerais exportés par la RDC. Pour une moyenne de 6.204 dollars la tonne du cuivre, l’écart-type est de 2.225 dollars. « Les exportations de cuivre depuis 10 ans, peuvent donc tantôt rapporter un peu plus de 8000 dollars, tantôt seulement 4000 dollars. Le coefficient de variation est élevé (2,78) », selon Chocot Eboue. Les cours du cuivre subissent une décote tous les deux ans. La crise financière de 2008-2009, a fait perdre près de 6.500 dollars par tonne vendue, les cours de février 2008 étant assez hauts (9.000 dollars), alors que celui de février 2009 se sont effondrés jusqu’à 2.500 dollars. De en février et août 2010, les cours ont perdu 2000 dollars (de 8.000 dollars la tonne à 6000 dollars la tonne seulement). Enfin depuis mars 2011, le cours manifeste une inexorable tendance à la décrue, partant de 10.000 dollars à 6.500 dollars. Au 20 juin dernier, il était évalué à 6.730 dollars la tonne.
L’impérieuse et urgente diversification économique
D’où la nécessité de diversifier l’économie. Le professeur Chicot a défendu la diversification économique comme étant un facteur de croissance soutenue à long terme. Cela, à travers l’action de la productivité globale des facteurs sur l’augmentation quantitative de la valeur ajoutée. La diversification réduit la dépendance vis-à-vis des matières premières sans compter des effets significatifs sur l’emploi et les revenus distribués à long terme. Alors que la dépendance aux ressources naturelles expose, d’après Eboue, à la malédiction des ressources naturelles, ainsi qu’à la volatilité macroéconomique résultant de l’instabilité des cours de ces dernières. Au contraire, la diversification est une ouverture sur un des secteurs nouveaux. Ce qui permet de mobiliser un savoir-produire connexe à celui en vigueur dans le secteur d’intervention. En particulier, l’élargissement de la gamme des produits vers celles des pays à forte productivité et à revenus élevés, permet d’éviter à un pays pauvre, la concurrence des pays émergents à bas salaires.
Expériences de la diversification
La RDC ne sera pas le seul pays à se lancer dans cette voie de la diversification économique. Quelques pays ont sérieusement progressé dans cette approche. C’est le cas de l’Indonésie avec près de 238 millions d’habitants. Elle qui a connu un boom pétrolier dans les années 1960, a utilisé les recettes pétrolières pour diversifier ses hydrocarbures et produire du gaz naturel vendu au Japon. L’Indonésie a également développé son agriculture, grâce à la production des engrais, qui élèvent rapidement les rendements. Elle peut ainsi nourrir une population nombreuse. Des programmes communautaires ont été mis en place pour absorber la main d’œuvre locale. Il s’agit de la construction des infrastructures notamment des écoles, des routes et des bâtiments publics. Et plus près de la RDC, la stratégie de développement économique par la diversification du Kenya est résumée dans la « Vision 2030 ».
Dans ce document, un des objectifs est le métro de Nairobi en 2030, « supposé permettre de faire de la capitale du pays, une cité africaine de classe mondiale, offrant à la fois toutes les facilités pour les affaires et également des résidences de qualité. » La stratégie de diversification économique dépend à présent de l’amélioration des infrastructures routières: à l’ouest, le corridor Mombassa-Ouganda-Rwanda-RDC; et au nord-est le corridor Lamu vers les côtes de l’océan indien jusqu’au Soudan et l’Ethiopie. Autre approche de la diversification, élever l’échelle de capitalisation des ressources naturelles et écologiques pour créer un secteur d’éco-tourisme à la dimension de la richesse écologique de cette région frontalière avec la Tanzanie.
Les infrastructures, un autre facteur de croissance
L’investissement dans infrastructures a des effets sur la croissance. Car, la faiblesse des infrastructures en Afrique a des répercussions humaines directes et indirectes importantes et constitue un frein au développement des entreprises. Pour Eboue, « bien qu’il ne soit pas explicitement inclus dans les Objectifs de Développement du Millénaire, le développement des infrastructures contribue incontestablement à leur réalisation. » «Outre le coût humain du sous-développement des infrastructures, le prix à payer pour entreprendre en Afrique est 30 % plus élevé que dans n’importe quelle autre région du monde.»