LA RECAPITALISATION de la Banque centrale du Congo (BCC) doit être prise en compte à l’occasion du collectif budgétaire projeté à la fin du 1er trimestre 2019 après l’investiture du nouveau gouvernement issu d’imminentes élections. C’est le point de vue de la commission économico-financière et de contrôle budgétaire de l’Assemblée nationale.
D’après cette commission présidée par le député Jean-Luc Mutokambali, la BCC a urgemment besoin d’au moins 104 milliards de nos francs, soit environ 60 millions de dollars. « À défaut de se réaliser intégralement en 2019, la recapitalisation peut être étalée sur deux exercices budgétaires, 52 milliards de FC en 2019 et 52 autres milliards de FC en 2020 », propose la commission Ecofin dont le rapport a d’ailleurs été approuvé par la plénière de la Chambre basse.
La loi organique portant organisation et fonctionnement de la Banque centrale du Congo indique que son capital social doit être réévalué à 213 milliards de francs courants, c’est-à-dire au taux du jour. À ce jour, le capital de la BCC est juste de 60 FC.
Moins de 150 millions USD
La Banque centrale ne tient plus qu’à deux ficelles, les frais financiers et les subventions qu’elle perçoit du gouvernement pour son équilibre. En 2018, les prévisions des dépenses de la Banque centrale étaient de 151.26 milliards de francs. Les prévisions de 2019 sont de 255 487 462 000 FC, soit 146 176 600 dollars.
Les prévisions des frais financiers du gouvernement pour l’exercice 2019 ont connu un accroissement de 104.22 milliards de francs, soit 40.79 % par rapport au budget 2018. « Cependant, pour les intérêts titrisés de la BCC, la commission Ecofin de l’Assemblée nationale relève le non-respect par le gouvernement des clauses de la convention sur la recapitalisation de la BCC, Le cumul des créances de la BCC par le gouvernement au risque que cette dernière connaisse des difficultés de fonctionnement, les 35 % des recettes inscrits en prévisions 2019 restent pour la BCC une difficulté à surmonter. »
Créances et intérêts titrisés
Ainsi, les montants des intérêts payés chaque année par le Trésor public à la BCC, au titre de frais financiers sur la créance titrisée, ne respecte pas l’esprit des dispositions de la convention signée en 2011 et évolue continuellement à la baisse.
Il sied ici de rappeler que les frais financiers comprennent des intérêts sur les dettes intérieures et extérieures. Les intérêts sur la dette intérieure englobent les intérêts sur la dette financière intérieure, les intérêts moratoires et les intérêts titrisés.
Les frais financiers de la dette extérieure comprennent les intérêts sur les dettes du Club de Paris (dette publique), du Club de Londres (dette commerciale), du Club de Kinshasa (fournisseurs locaux) ainsi que des intérêts sur la dette multilatérale.
Engagements réciproques
Normalement, dans le cadre de la recapitalisation de l’Institut d’émission, la Banque centrale et la Direction du Trésor et l’Ordonnancement (DTO) doivent présenter aux conférences budgétaires (NDLR, réunions préparatoires du budget de l’État) un état détaillé des intérêts titrisés à budgétiser au cours de l’exercice 2019, en se fondant sur un plan d’apurement de la créance et sur la convention du caissier de l’État ou l’avenant à la convention signée entre la BCC et le ministère des Finances, explique Pierre Kangudia Mbayi, le ministre d’État, ministre du Budget, dans une note circulaire sur l’élaboration du budget 2019. La commission Ecofin de l’Assemblée nationale rappelle que la convention sur la recapitalisation de la BCC avait assigné des engagements réciproques aux parties prenantes en vue de lui permettre d’atteindre au plus vite son équilibre financier. Deux phases avaient été arrêtées, l’assainissement du bilan de la BCC avec pour conséquence l’émission par le gouvernement d’un titre producteur d’intérêts couvrant les pertes cumulées à la date du 31 décembre 2010 d’une valeur de 1 249,5 milliards de FC.
Et la dotation à la BCC en capital d’un import de 213 milliards de francs dont 109 milliards provenant de l‘incorporation des plus-values sur les immobilisations et 104 milliards d’apports en capitaux frais de l’État propriétaire.
« Malheureusement, après l’amorce de ce processus, faute d’une bonne application de ladite convention, la situation financière de l’Institut d’émission reste toujours problématique », note la commission Ecofin de la Chambre basse. Qui relève qu’« entre 2014 et 2016, le gouvernement a fixé unilatéralement le taux d’intérêt à observer et les sommes inscrites au budget n’étaient pas intégralement payées ».
Toutefois, en 2017, le montant budgétisé était fixé de commun accord mais les paiements effectifs au cours de six premiers mois sont d’un niveau très faible. Au fil des ans, le manque à gagner est donc énorme, soit environ 140,44 milliards de francs.
Ainsi, la commission Ecofin a proposé et la plénière de l’Assemblée nationale a approuvé l’inscription des crédits additionnels d’au moins 52 milliards de francs en faveur de la Banque centrale, « étant donné le contexte difficile dans lequel la Banque centrale du Congo réalise ses misions dont celles en rapport avec la politique monétaire du pays, mais aussi des investisseurs stratégiques qui lui incombent, notamment pour s’implanter dans les nouvelles provinces du fait du découpage territorial et y accompagner l’activité économique qui s’y développe. » Au gouvernement d’agir à temps utile.