Le gouvernement congolais n’a cure des conséquences de la baisse continue des matières premières. Malgré le fléchissement des recettes publiques induit par cette baisse, il compte présenter une projection budgétaire en hausse pour 2016. Pendant que certains observateurs avancent des chiffres en baisse.
La pays traverse une zone de turbulences. Depuis le début de l’année, il est frappé de plein fouet par la baisse drastique des cours des produits miniers et pétroliers, dont il tire pourtant, l’essentiel de ses revenus. Le prix du cuivre a dégringolé pour atteindre le plancher de 5 000 dollars, début septembre. La tonne métrique du métal rouge s’est vendue à 4 958 dollars. Du côté de l’or, la même tendance baissière est observée car l’once s’est vendue à 1 119 dollars au cours de la même période. Un léger mieux du côté de l’or noir où une hausse de plus de 7% du baril a été observée. Le prix du baril s’y était établi à 49,9 dollars. Mais c’est encore loin de la moyenne de 100 dollars par an enregistrée entre 2013 et 2014. Sur le marché de New York, la même tendance haussière, s’agissant du pétrole, a été également observée avec un baril à 45,25 dollars. Dans cette morosité économique, seul le cobalt a gardé la forme, se maintenant à 3 000 dollars la tonne métrique. La question que tous les analystes se posent est celle de savoir quelles vont être les répercussions de cette conjoncture défavorable, marquée notamment par une forte contraction de l’activité manufacturière chinoise confirmée en août. L’économie nationale dont on sait qu’elle est intimement liée aux fluctuations des matières premières, commence à en ressentir les soubresauts.
La baisse continue des cours des matières premières (cuivre, or, pétrole) observée depuis le début de cette année n’est donc pas sans conséquence sur l’économie de la RDC. Le gouvernement a revu à la baisse son taux de croissance économique qui est passé de 9,2% à 8,4% pour l’année en cours. D’après des experts, la baisse du taux de croissance rime automatiquement avec celle des recettes publiques. La relation est mécanique. D’ailleurs, le compte général du Trésor a accusé un déficit de 125 millions de dollars au mois d’août, d’après la Troïka stratégique. Mais, en cumul, les comptes publics demeurent au vert, en excédant de 63 millions de dollars. Cela ne veut pas dire que le gouvernement n’est pas touché par la chute continue et drastique des cours des matières premières. La prochaine réunion devra se pencher sur la question sur la base d’une note stratégique portant mesures d’atténuation des impacts budgétaires que le Premier ministre Matata Ponyo a demandée.
Les différents budgets présentés par les gouvernements successifs sont frappés de plusieurs tares. En 2012 et 2013, ils avaient été conçus autour d’un programme, avec des objectifs regroupés en six axes prioritaires. Les résultats ont été décevants. Et pour cause. Prévues pour 6.609.171.209.773 de francs, les recettes de la loi de finances 2012 ont totalisé 4.333.730.669.670,48, soit une réalisation de 65,57%, se traduisant par une moins-value globale de l’ordre de 2.275.440.540.102,52 (34,43%) de francs. Sur ces réalisations, les recettes internes ont atteint 3.639.437.534.941,42 sur les prévisions de 4.260.292.306.769,00, soit une moins-value de 620.854.771.827,58 (14,57%). Quant aux apports extérieurs, ils ont été largement en-deçà des prévisions, soit 694,293 millions de francs sur des prévisions de 6,609 milliards, avec les mêmes faiblesses que pour les précédents exercices, aussi bien dans les dépenses courantes que dans les investissements.
C’est sur la base de la note technique que l’on connaîtra les mesures idoines que le gouvernement entend prendre. Mais en attendant qu’on s’y penche, l’ancien Premier ministre Adolphe Muzito a déjà sorti sa calculette pour chiffrer les pertes. Selon lui, les recettes courantes de l’État pour 2016 vont baisser sensiblement. Dans sa dernière tribune, ses projections budgétaires devraient se chiffrer à 4 875 milliards de dollars en 2016 au titre des recettes courantes de l’État. Cela représente une baisse de près de 500 millions par rapport au budget de 2015. Dans ce budget, l’État a prévu 5 372 milliards de dollars comme recettes courantes. Si les prévisions de l’ancien Premier ministre se confirment, ce qui est fort probable au vu du contexte économique international, la RDC verra la progression continue de son budget marquer un arrêt après plus d’une décennie. Il va sans dire que l’État devra réduire son train de vie, en arrêtant la multiplication des institutions (politiques et économiques) pour se donner de la marge afin d’investir dans les infrastructures, routières notamment, qui elles, en élargissant le marché intérieur, constitueront à coup sûr le moyen le plus efficace pour se prémunir contre les chocs exogènes.
À l’occasion de la session de septembre du Parlement qui est essentiellement budgétaire, le gouvernement affûte les armes pour présenter au bureau du président de l’Assemblée nationale un texte reflétant la réalité des choses. C’est dans cette optique qu’un communiqué de la primature a annoncé qu’une réunion extraordinaire sur l’avant-projet de la loi de finances 2016 s’est tenue dernièrement. L’objectif de la concertation était de dégager un consensus sur les grandes masses en recettes et dépenses du budget avant sa présentation en Conseil des ministres.
En raison de la morosité de la conjoncture internationale, la croissance économique, estimée sur la base des réalisations de production, a été revue à la baisse à deux reprises: 9,2% à fin mars et 8,4% à fin juin contre un objectif visé de 10,3%. Ainsi, la principale particularité du budget 2016 est le fait que le niveau prévu des recettes est en légère baisse, soit 0,9% par rapport à l’exercice 2015. Le budget serait en équilibre et se situerait autour de 8 418,7 milliards de francs, soit 9,02 milliards de dollars. La consolidation avec les budgets des provinces pourrait situer le budget global à environ 11 milliards de dollars.
Les membres de la Troïka stratégique ont pris une série de mesures destinées à conjurer les effets négatifs de la conjoncture internationale et d’adaptation du budget du gouvernement aux contingences et contraintes du moment. Il s’agira notamment de relayer la baisse attendue des investissements directs étrangers par des investissements publics endogènes porteurs qu’il faudra réaliser dès le dernier trimestre de cette année, afin de capitaliser rapidement leurs effets sur la croissance économique.