CONTRAIREMENT aux années précédentes, le ministère du Budget a élaboré un budget général de l’État – certes encore en cours de perfectionnement -, en déséquilibre entre les recettes et les dépenses. Les prévisions des recettes ne sont, en effet, que 6.2 milliards de dollars. Et en dépenses, les prévisions des experts du Budget culminent à 9.1 milliards de dollars. Il sied de rappeler que lors du Séminaire d’orientation budgétaire (SOB), les experts du Budget étaient accompagnés par Pierre Kangudia Mbayi, le ministre d’État, ministre du Budget sortant.
Présomption de prévarication
Et certaines organisations non gouvernementales qui n’ont guère été tendres vis-à-vis de l’ancien régime soupçonnent le ministère de Budget de mauvaise foi doublée de prévarication. Parmi elles, la Ligue congolaise de lutte contre la corruption (LICOCO) qui a participé, pour le compte de la société civile, au SOB organisé par le ministère du Budget.
Cette ONG s’est vivement opposée aux projections du ministère du Budget, estimant que les recettes présentées sapent et sabordent la volonté et les actions envisagées par Félix Antoine Tshisekedi Tshilombo, le chef de l’État, pour l’émergence de la République démocratique du Congo.
« La LICOCO constate que les chiffres présentés violent les engagements du chef de l’État fait au peuple congolais lors de la campagne électorale de 2018 », lit-on dans un communiqué de l’ONG. Qui poursuit : « Il sied de rappeler que lors de la Campagne électorale de 2018, le chef de l’État avait promis de mobiliser 80 milliards de dollars pour les 5 prochaines années afin de financer son programme quinquennal et plus particulièrement la gratuité de l’éducation primaire et secondaire en RDC. Cela veut dire que chaque année la RDC doit avoir un budget de plus au moins 16 milliards des dollars. »
Pour l’exercice budgétaire 2020, le ministère du Budget présente, en effet, un budget en recettes de l’ordre de 10 284,8 milliards des FC, soit 6,2 milliards de dollars et, en dépenses de l’ordre de 15 153,4 milliards de FC, soit 9,1 milliards de dollars. Il se trouve donc que la proposition budgétaire 2020 présente un gap de l’ordre de 3 milliards de dollars. Il revient donc au prochain gouvernement, en fait, le cabinet Ilunga Ilunkamba, de mûrir les voies et moyens pour combler ce manque. De l’avis de la LICOCO, le gouvernement doit emprunter 3 milliards de dollars pour combler ce gap.
Les promesses du président
« La LICOCO estime que les prévisions budgétaires présentées par le ministre du Budget pour l’exercice 2020 ne reflètent pas les engagements du chef de l’État prisent lors de la Campagne électorale 2018. La LICOCO pense qu’avec un budget de 6,2 milliards des dollars, le chef de l’État aura mal à financer l’éducation gratuite, à réhabiliter les camps militaires, à financer les infrastructures, à améliorer les conditions de travail des fonctionnaires, etc. »
Par conséquent, la LICOCO propose au chef de l’État de ne pas accepter la proposition du budget élaboré par le ministère du Budget et d’élaborer une prévision budgétaire qui reflète « vos engagements prisent devant les Congolais à mobiliser annuellement 16 milliards des dollars pour financer la gratuité de l’éducation, la réhabilitation des camps militaires et des policiers, financer les infrastructures, etc. ». Et à l’Assemblée nationale et au Sénat, la LICOCO offre de demander la mise en place urgente d’un gouvernement qui pourra élaborer une proposition du budget prenant en compte la vision du chef de l’État de mobiliser pour les 5 prochaines années un budget de l’ordre de 80 milliards de dollars.
Une autre recommandation de la Ligue congolaise contre la corruption est adressée aux organisations de la société civile de la RDC: demander à ce que le chef de l’État puisse mettre en œuvre son engagement à mobiliser 80 milliards des dollars pour les 5 prochaines années afin de financer la gratuité de l’éducation en RDC.
Il sied toutefois d’indiquer qu’après le Séminaire d’orientation budgétaire, viendront les conférences budgétaires où toutes les institutions publiques dont le Président qui enverrait ses délégués ainsi que des ministères, l’Assemblée nationale et le Sénat, les régies financières, la société civile seront conviés à apporter leur obole en termes de recettes et de dépenses dans l’élaboration du budget 2020. Certains experts estiment que le potentiel fiscal de la RDC titillerait les 20 milliards de dollars l’an. Mais les capacités de captage du pays se sont limitées, ces cinq dernières années, à moins de 5 milliards. Et les apports extérieurs (dons, prêts, legs), même dans la perspective de la relance de la coopération avec le Fonds monétaire international (FMI) n’excèdent guère le milliard de dollars.
Aussi, pour ce qui est de la programmation budgétaire 2020-2022, le ministère du Budget prévoit des dépenses de 2020 à 2022 de l’ordre de 58 041,4 milliards de FC dont, pour le pouvoir central, quelque 48 742,0 milliards de FC ; les provinces, 8 947,9 milliards de FC ; et les ETD, 351,5 milliards de FC. Pour ce faire, de l’avis des experts, il va falloir au nouvel ordre politique de respecter notamment les principes de la rétrocession et de la libre administration des provinces et des ETD sur le plan économique et financière.