Les populations de ce quartier de la commune de Mont-Ngafula sont victimes d’une commercialisation et de la facturation frauduleuses de cette précieuse denrée.
En septembre 2014, les populations de Kimbondo Télécom, un quartier de la commune de Mont-Ngafula, avaient poussé un ouf de soulagement. La raison ? Le lancement officiel de la fourniture d’eau. Grâce à un projet financé par la Banque mondiale, le Projet d’alimentation en eau potable en milieu urbain (PEMU) , d’un montant de 20,3 millions de dollars, la Régie de distribution d’eau (Regideso) devrait non seulement procéder au renforcement de sa capacité de production et de traitement d’eau potable, mais aussi et surtout, réhabiliter tout son réseau et connecter les habitants de Kinshasa, Lubumbashi et Matadi. Objectif poursuivi par la Banque mondiale : permettre à la Regideso de doubler le taux d’accès des populations à l’eau potable. Ce taux devrait passer de 29% en 2012 à 56% en 2016, soit desservir en eau potable plus de la moitié de la population dans les trois villes concernées par le projet PEMU. Ce, conformément à la feuille de route du gouvernement à travers le programme d’actions 2012-2016.
C’est dans le cadre de ce partenariat qu’une station de captage d’eau pour Mont- Ngafula a été construite et équipée, à Kimbondo Télécom et des bornes-fontaines et des compteurs installés. Au total, 86 bornes fontaines et 5000 compteurs domestiques devraient être implantés dans cette commune. Avec tout cela, c’était la fin de la pénurie d’eau potable pour les habitants de Kimbondo. Mais, très vite, elles ont déchanté. : l’eau potable ne coule plus dans la majorité des bornes -fontaines et compteurs domestiques installés. Dans ceux qui sont encore opérationnels, l’eau coule par intermittence. Pour en avoir, il faut se priver de sommeil et se réveiller vers 2 heures afin d’être en bonne position pour être servi. Les moins résistants préfèrent s’y rendre vers 4 heures ou 5 heures. A défaut, ceux qui sont financièrement solides dans des quartiers éloignés de Matadi-Kibala ou Cité Verte pour s’y approvisionner moyennant 100 ou 200 francs le bidon de 25 litres. La pire des solutions reste la descente d’une vallée vers une source d’eau dont la remontée, avec un bidon sur la tête, finit par rendre malade. Ce calvaire imposé par des agents chargés d’assurer de fournir de l’eau à Kimbondo Télécom à partir d’un château d’eau construit pour la circonstance est mal digéré par les riverains qui les accusent de commercialiser frauduleusement l’eau de la Regideso.
Commerce illicite
Le doigt accusateur des habitants est pointé non seulement sur ces agents mais aussi sur leur hiérarchie considérée comme complice. Le réservoir à partir duquel part le dispatching de la précieuse boisson est d’une capacité estimée à 60 m3. En principe, les agents qui ne devraient pas vendre d’eau à la population. Or, ils s’y adonnent désormais, car c’est très lucratif, au grand dam des consommateurs. Ce qui justifie, aux dires de la population, l’interruption arbitraire et intempestive de l’approvisionnement. Objectif inavoué : attirer les habitants pour leur vendre de l’eau à un prix élevé. « Ces agents refusent de nous envoyer de l’eau pour qu’ils nous la vendent à 200 francs le bidon, alors qu’au niveau des bornes-fontaines deux bidons de 25 litres coûtent seulement 50 francs », affirme une habitante du quartier. Un agent commis à l’une des bornes- fontaines soutient pour sa part que « les travailleurs du château censés nous desservir en eau potable n’ont pas d’heure fixe pour le faire. Chacun travaille aux heures de son choix. Certains le font à 2 heures pour arrêter avant 4 heures, d’autres à partir de 5 heures jusqu’à 6 heures ou 6 h 30 ». À en croire une autre dame, « lorsqu’on nous prive d’eau c’est pour la vendre à 200 francs et se remplir les poches. Je confirme ce que je dis parce que l’un des agents, accusé en son temps pour les mêmes faits, a été remercié et présenté sur une télévision privée de la place ». Rarement, la desserte ne va jusqu’à 10 heures dans les deux ou trois bornes fontaines qui fonctionnent encore.
Facturation frauduleuse ?
Les premières factures d’eau pour les usagers domestiques n’ont pas tardé à être envoyées. Depuis, elles continuent de venir. Les montants se situent autour de 10 000 francs bien que l’eau ne coule que rarement des robinets. Pourtant, la Banque mondiale était ferme : pas de facturation avant la fin des branchements sur tous les sites ciblés par le projet PEMU. Les factures avec l’en-tête de la Régideso en noir et blanc alors que les factures régulières ont toujours l’en-tête de couleur bleue. Cette anomalie a convaincu les consommateurs qu’il y a bien fraude.