La Belgique n’a pas perdu tout lien avec la République démocratique du Congo. En matière d’aide au développement, la Belgique est active même si cette aide n’est pas très considérable. Sur le plan économique, on peut dire que SN Brussels, ex-Sabena, est actuellement le seul vrai intérêt belge en RDC, parce qu’elle joue le rôle du cordon ombilical entre l’ex-métropole et l’ex-colonie. Et on mesure déjà les lourdes conséquences socio-économiques après la décision des autorités congolaises de réduire le nombre des fréquences (de 7 à 4) de la compagnie belge à destination de Kinshasa. Qui a frappé dur là où ça fait très mal.
En Belgique, la majorité semble pencher du côté de ceux qui estiment que Bruxelles n’a plus à jouer au « père fouettard » à l’égard de Kinshasa. Ce qu’il faut pour la RDC, c’est une souveraineté retrouvée, un État de droit. L’avenir du Congo serait donc dans la lutte pour le développement, le respect des droits de l’homme. On pense que la Belgique, seule, ne peut rien faire face à la RDC car « le Congo est une très grande aventure économique ». Il faut qu’on arrête les prédateurs liés au crime organisé avec des États hypocrites liés à des multinationales », râle un Eurodéputé bruxellois. Pour qui l’État congolais a ménagé à ce jour son ancienne puissance coloniale et, à chaque fois qu’un gouvernement a tenté d’évoquer la question, notamment « le contentieux belgo-congolais », il a été balayé. Ce fut le cas de Lumumba. Ce fut le cas de Mobutu qui dépêcha, pour une « émission de clarification » à la télé belge, RTBF, la crème de son élite politique (Mpinga Kasenda, Me Gérard Kamanda wa Kamanda, Me Nimy Mayidika Ngimbi), pour défier le gouvernement belge sur son territoire et démystifier l’aide au développement.
Pour nombre de Belges, en Afrique, l’Occident n’a que faire des partenaires égaux susceptibles de lui faire face, qui défendraient les intérêts de leurs peuples. Il recherche des hommes liges. Il n’est pas entièrement Belge, mais au moins à moitié, il y vit et il y travaille aussi. Ce médecin luba kasaïen qui exerce en Belgique depuis une quarantaine d’années, s’interroge sur les relations tumultueuses entre Kinshasa et Bruxelles.
Et il ressent chaque crise entre le Congo, son pays d’origine, et la Belgique, son pays d’adoption, comme un « recul ». Il n’arrive pas à « comprendre pourquoi cela continue à resurgir ». Il n’arrive pas à « comprendre pourquoi les évidences sont aussi inaudibles ». Il se demande si un seul pays peut bloquer l’avenir ou décider du sort de la République démocratique du Congo, 80 fois plus grande que lui.
Une vraie alliance économique
« Comment peut-on juger à la fois sur le fond et dans les détails une situation aussi complexe et aussi longuement négociée que celle des relations belgo-congolaises ? », s’interroge-t-il. Comment les gouvernements qui sont à Kinshasa et à Bruxelles peuvent-ils sciemment faire croire que les « méchants » sont ceux qui se trouvent dans l’une ou l’autre capitale ? Comment conjuguer la nécessité de l’efficacité et la nécessité démocratique ? Il y a évidemment des questions… Schématiquement, il considère que les élites pensent à leur façon, les populations selon la leur aussi. « La construction réelle du Congo serait une très grande aventure qui ouvrirait un immense espace de croissance et de paix », dit-il.
« Pourquoi refuser d’avance un nouveau cadre de dialogue ? Qu’a-t-on proposé depuis des lustres pour éviter ce genre de soubresauts ? Y a-t-il réellement un avenir en dehors d’une vraie alliance avec la Belgique ? »
Le Congo, ce pays continent, scandale du sol et du sous-sol, est au centre de convoitises internationales sinon de guerre économique planétaire. L’absence à ce jour du règlement du contentieux belgo-congolais cause de sérieux préjudices à la RDC. Comme le disent certains Belges et certains Congolais, « aussi longtemps que persistera ce litige, il restera à craindre que les relations entre la RDC et la Belgique ne connaissent pas la sérénité nécessaire à une existence harmonieuse et pacifique ». Aujourd’hui, certains milieux évaluent le poids financier du préjudice à quelque 500 000 milliards de dollars. On soutient que la RDC ne pourra s’assurer un quelconque développement économique et social aussi longtemps que resteront troublées ses relations avec la Belgique.
Pour aboutir à cette nécessaire pacification des relations belgo-congolaises, le gouvernement congolais doit comprendre qu’elle devra conclure avec le gouvernement belge un traité général d’amitié, d’assistance et de coopération, ainsi qu’un traité d’une union économique sous la garantie des Nations-Unies.
Comme le dit ce médecin belgo-congolais, « la RDC ne peut se passer de la Belgique sous-peine d’une mort certaine ».