Les jeunes s’adaptent à la crise en montant leurs propres boîtes

Autres temps, autres mœurs. « Jadis, même en période de vaches grasses, les bons projets et les dossiers solides n’avaient pas de chance d’espérer trouver un financement. Aujourd’hui, en période de crise, ils ont de bonnes raisons d’en espérer », déclare Maurice Mulenda Mbombo, promoteur d’une start-up. Pour lui, les banques sont pour beaucoup dans cette situation. En clair, reconnaît un cadre de ProCrédit Bank, filiale d’Equity Bank, les banques offrent de nouvelles opportunités aux créateurs de PME. « La crise apporte de nouveaux débouchés. D’un côté, les banques doivent prêter pour tirer des bénéfices et parer aux difficultés. De l’autre, des places vacantes sont laissées par les entreprises disparues », explique-t-il. C’est ce qui s’observe sur le terrain.

Le chômage est un problème avéré en RDC. Pour certains Congolais de 20-40 ans, diplômés ou pas, la crise économique adoubée par la crise financière est tout sauf une bonne raison de baisser les bras. Au contraire, c’est une opportunité pour tenter l’aventure.

Maurice Mulenda, 45 ans, diplôme de l’ISTA, était pendant 13 ans sans travail. Il a décidé en 2015 de monter sa propre boîte. En fait de boîte, il s’agit d’une petite unité de charge de batteries de téléphones et de console de jeu Nitendo pour enfants. Après une année d’activité, il s’est lancé dans le change et a ouvert un petit commerce spécialisé dans l’alimentaire. En janvier 2016, grâce à un crédit bancaire, il a acquis trois motos et en compte désormais une dizaine. « Aujourd’hui, je n’ai rien à envier à quelqu’un qui travaille car je gagne bien ma vie », confie-t-il. Jean Louis Panzu, 28 ans, n’a pas fait des études secondaires. Comme la plupart des jeunes de son quartier à Masina, il s’est lancé dans le système D dès son adolescence. Grâce à un financement d’une institution de microfinance, il fait maintenant des affaires entre Kinshasa, Dubaï et Guanzhou en Chine.

Henriette Luzolo est célibataire. Après des études de droit à l’université de Kinshasa, elle n’a pas trouvé d’emploi. Grâce au conseil d’une tante, elle s’est lancée dans le commerce de braises entre Kinshasa et le Kongo-Central. Après avoir obtenu un crédit bancaire, elle est entrain de réalisé un projet agro-pastoral à Kasangulu. Ils sont nombreux des jeunes qui imaginent des petits projets rémunérateurs pour se sortir de la crise de l’emploi et de la dépendance des parents. Selon François Hurel du forum de l’entrepreneuriat de l’Organisme de coopération et de développement économiques (OCDE), « le ressort entrepreneurial existe d’autant plus en période d’incertitude.

Des mécanismes de création plus simples

Pour les personnes qui souhaitent ouvrir une structure répondant aux intérêts du consommateur, les conditions sont rassemblées ».

En ce qui concerne le cas de la RDC, la lourdeur des démarches administratives et des charges sociales et fiscales freinent les velléités des jeunes congolais à créer leurs propres activités. « Il faudra penser à une loi de modernisation de l’économie facilitant le montage de sa propre entreprise sans être contraint par les lourdeurs administratives ou le poids des charges », préconise-t-il. Par exemple, la forfaitisation et le plafond des charges sociales et fiscales à moins de 10 % pour les activités de commerce et de 20 % pour les activités de services allègeraient le niveau de prélèvements. De nouvelles entreprises peuvent ainsi mettre de nouvelles idées et s’implanter dans le pays, explique François Hurel. Il faut aussi penser à un statut de l’auto-entrepreneur pour permettre par ailleurs à l’entrepreneur de limiter les risques. « En échange d’une simple déclaration devant notaire, la résidence principale et les bien fonciers bâtis et non bâtis non affectés à l’usage professionnel de l’entrepreneur peuvent être insaisissables », insiste-t-il.

Des formations d’aide à la création

En plus des réformes visant à libérer la création d’activité, des formations financées par les collectivités apportent un soutien pratique et financier aux porteurs de nouveaux projets. Les formations financées par les pouvoirs publics sont destinées à maximaliser les chances d’obtenir un financement auprès des banques, explique Stevens Malundama, expert en emploi de jeunes et chargé de mission en création d’entreprises pour Congo Emploi, un organisme qui ambitionne d’assurer la formation aux jeunes sans emploi. Il faudra des mesures incitatives, pour canaliser les idées de création d’entreprises en RDC, insiste-t-il. Il faudra aussi que les banques assouplissent leurs conditions d’octroi de prêts.