COOPER Wetherbee explique qu’il est important que les gouvernements continuent à relever le niveau de leurs ambitions climatiques nationales. « Cela implique d’élaborer des plans nationaux pour le climat et la mise à disposition de ressources pour s’assurer que ces plans sont effectivement mis en œuvre », insiste-t-il. Par ailleurs, les acteurs devront augmenter leurs investissements dans les secteurs autres que le renouvelable. Ils devront aussi prendre des mesures pour se conformer aux principes de l’Accord de Paris. Les institutions publiques devront mettre en place des collaborations plus approfondies avec les acteurs compétents pour évaluer les risques climatiques et y faire face. Pour le secteur privé, il faudra désinvestir des activités les plus émettrices et rediriger ce capital disponible vers des actifs plus propres. Le marché du capital et le secteur bancaire devront également faire leur transition vers la finance verte. Il y a un nombre croissant d’initiatives visant à accélérer cette transition.
Les institutions publiques doivent utiliser plus intelligemment leurs ressources financières. Elles veilleront à ce que chaque dollar compte. Les banques de développement, par exemple, devraient s’assurer que les fonds publics entraînent vraiment une transformation de l’ensemble du système. Une meilleure information permettra un usage plus impactant des fonds destinés au climat, en matière de transformation des marchés.
D’après cet expert, l’engagement de la banque Goldman Sachs de consacrer 750 milliards de dollars à l’action climatique, d’ici à 2030, est un bel exemple du rôle clé que peut jouer le secteur financier dans la lutte contre le changement climatique et la transition vers une économie bas carbone. « La taille du financement climat est importante, mais il est également important de désinvestir de ce que nous appelons l’économie brune qui finance les énergies fossiles. Il s’agit de deux pièces du même puzzle. Et c’est à ça que la banque s’est engagée », déclare-t-il. Et d’ajouter : « Ce mouvement aura un impact certain sur l’implication du secteur financier. Quand les grandes banques, comme Goldman Sachs, réduisent leur soutien aux actifs polluants, elles envoient un signal fort à l’ensemble du secteur financier. Cela encourage les autres prêteurs à prêter attention aux enjeux climatiques et à réduire leur exposition aux actifs fossiles. »
L’Afrique à la traîne
L’Afrique qui est l’une des régions les plus touchées, ne mobilise qu’une infime partie du financement climatique. Cela est principalement dû au fait que 76 % de la finance climatique sont investis localement. « La taille relativement petite des marchés financiers africains par rapport aux autres régions explique aussi la faible proportion de fonds mobilisés. Les investisseurs privés sont plus enclins à investir sur les marchés mondiaux des capitaux dont ils maîtrisent mieux le contexte social, économique et politique. Cela leur permet en effet de mieux évaluer le risque lié aux prêts, par exemple. Le résultat est que la majorité de la finance climatique distribuée sur les marchés va dans les pays qui ont des marchés financiers déjà bien établis », fait remarquer Cooper Wetherbee.
Une autre raison est que la plupart des pays africains sont vulnérables aux changements climatiques. Ils ont donc plus besoin de fonds pour l’adaptation : « Or, la tendance actuelle est que la majorité de la finance climatique est dirigée vers la lutte contre le changement climatique parce que la modélisation de ces circuits financiers, dans l’énergie solaire, par exemple, est plus facile, car déjà connue. Pour les projets d’adaptation tels que la protection côtière où le flux de revenus est moins évident, les prêteurs sont plus réticents à investir. »
Pour améliorer leur capacité de capture du financement, que doivent faire les Africains ? « Le premier pas est d’adopter des objectifs climatiques et de relever les ambitions du plan national d’action climatique afin d’atteindre et même de dépasser leurs contributions nationales déterminées. Ensuite, allouer des ressources gouvernementales significatives pour la mise en œuvre de ces plans. Cela implique un accroissement de la finance verte gouvernementale et la mise en place d’un cadre réglementaire afin de faciliter la mobilisation de fonds climatiques privés ».
Les pays africains peuvent également collaborer avec les institutions financières privées afin de mobiliser plus de fonds privés pour le climat : « Cela peut être fait grâce à des communications formelles, des sensibilisations afin d’éduquer plus d’investisseurs sur les opportunités que présente l’action climatique. Cela pourrait également passer par des canaux plus formels tels que les PPP entre les gouvernements et les investisseurs privés afin d’attirer plus de financement dans l’action climatique. Il est aussi très important de développer des instruments de financement et des stratégies innovants qui ont le potentiel d’entraîner une croissance rapide de la finance climatique en Afrique. Encore une fois, l’innovation est la clé. »